Au lendemain de l’attaque d’Orlando, la colère à la Une des journaux américains

Les tueries de masse prennent souvent, aux Etats-Unis, le nom des villes qui en ont été le théâtre. Orlando, en Floride, où un homme a tué 49 personnes, dimanche 12 juin, dans une boîte de nuit gay, ne devrait pas déroger à la règle. « Orlando se trouve maintenant tragiquement à la tête d’une liste d’infamies, partageant le chagrin de Virginia Tech, Newtown et Aurora », note le quotidien local Orlando Sentinel.

Pourtant, rappelle le journal, il faut « réaffirmer fièrement » que l’identité de la ville, c’est celle d’un « endroit d’accueil, que ce soit pour les personnes qui y vivent ou celles qui le visitent, qu’importe leur origine ou leur orientation ». « La Floride centrale est mise à l’épreuve comme jamais auparavant. Notre réponse, qui vient du fond du cœur, va se renforcer chaque jour », conclut le quotidien, appelant à l’« unité ».

Le Washington Post est pourtant nettement moins optimiste. Le journal craint que la collusion en un attentat de « trois sujets particulièrement propices au débat et à la controverse » – les droits des homosexuels, le contrôle des armes à feu et le terrorisme – ne divise encore plus les Etats-Unis. « Depuis le 11-Septembre, pas un événement tel que celui-ci n’a réussi à rassembler le pays (…). Depuis, les catastrophes semblent pousser encore plus la droite et la gauche chacune de leur côté, tandis que la confiance dans les institutions se détériore », se désole le quotidien dans un article intitulé « La nouvelle norme : quand la tragédie frappe, les Américains se divisent. »

Le « mélange des idéologies de l’EI et de la NRA »

Le journal fait référence aux analyses radicalement différentes, formulées après la tuerie par les camps démocrate et républicain, le premier plaidant pour un contrôle renforcé des armes à feu, le second pour une meilleure régulation de l’immigration. Aussi, poursuit le WP, « il ne semble même plus possible d’examiner – et encore moins de tomber d’accord – les causes et les solutions » à de tels drames. « La réponse est donc embrouillée, alors même que la prochaine tragédie se rapproche. »

Cette division remarquée par le journal est âprement commentée dans la presse, au lendemain de la tuerie. Et comme après chaque meurtre de masse, c’est principalement la question des armes à feu et de leur régulation qui ressurgit. D’autant que, soulignent plusieurs journaux, le fusil d’assaut AR-15 utilisé par Omar Mateen est le même qui a servi à tuer 14 personnes à San Bernardino en décembre 2015, 20 enfants et 6 adultes à l’école Sandy Hook de Newtown en 2012 ou encore 12 spectateurs dans un cinéma d’Aurora, toujours en 2012. « L’arme de choix des tueurs de masse », résume en un titre le Boston Globe.

Cette arme « illustre pourquoi les lois américaines sur les armes rendent les vies des Américains sans valeur. Ces lois sont une aberration », écrit le New York Times. L’auteur de la tuerie « démontre que le mélange des idéologies de l’organisation de l’Etat islamique et de la National Rifle Association (NRA, principal groupe de pression en faveur des armes à feu aux Etats-Unis) est puissant », continue le quotidien sans exonérer Barack Obama, critiqué pour sa politique étrangère et son absence de réaction sur la situation en Syrie pendant des années.

Omar Mateen, en commettant cette tuerie a, selon le NYT, « poussé Donald Trump à la Maison Blanche, la Grande-Bretagne hors de l’Union européenne, Marine Le Pen à la présidence française et le monde dans une spirale descendante de violence ».

La liste des tueries « pas exhaustive, mais épuisante »

« Merci la NRA », écrit en « une » le New York Daily News, avant de s’adresser directement à l’organisation : « à cause de votre opposition continue à l’interdiction du fusil d’assaut, les terroristes, comme ce malade, peuvent légalement acheter une machine à tuer et perpétrer la pire tuerie de masse de l’histoire américaine. »

Même sentiment au Los Angeles Times, pour qui « la NRA a du sang sur les mains », de même que « ses sycophantes au Congrès, qui ont contribué à rendre ce pays plus dangereux ».

« Ces meurtres ont été commis avec une écœurante efficacité parce que le tireur a utilisé une arme à feu de style militaire qui n’a rien à faire dans une société civilisée. »

Le quotidien publie une liste de 28 tueries par armes à feu survenues depuis 2011. Et de commenter pour conclure : « Not exhaustive (…) but exhausting » (pas exhaustif (…), mais épuisant).