Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, et Alexis Tsipras, le premier ministre grec, à Athènes le 21 juin. | ARIS MESSINIS / AFP

C’est une excellente nouvelle pour Athènes. Mercredi 22 juin, la Banque centrale européenne (BCE) a décidé de rouvrir, dès le 29 juin, l’accès des banques grecques à ses opérations classiques de refinancement, dont celles-ci étaient exclues depuis début 2015. « C’est un bol d’air considérable pour ces établissements et surtout la reconnaissance des efforts du gouvernement grec », confie une source européenne, proche des créanciers du pays (BCE, Mécanisme européen de stabilité, Commission européenne, Fonds monétaire international).

Cette décision est intervenue au lendemain du versement d’un nouveau prêt de 7,5 milliards d’euros à Athènes, dans le cadre du troisième plan d’aide de 86 milliards signé l’été 2015 avec ses partenaires européens. « La Grèce a franchi un cap critique », a félicité le 21 juin Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, saluant « le courage et la détermination » de son peuple.

Cette nouvelle aide a été accordée en échange de l’adoption d’une série de réformes. Saluant ces efforts, la BCE a, comme l’espérait le gouvernement grec, fait à son tour un geste envers le pays. En février 2015, lorsque la gauche radicale de Syriza menaçait de rompre les liens avec ses créanciers et de ne pas appliquer les mesures exigées, l’institution avait, en effet, suspendu une dérogation essentielle pour les établissements hellènes, une décision vécue comme un coup de tonnerre.

Cette exemption leur permettait de déposer à la BCE les bons du Trésor grec qu’ils détenaient comme garantie en échange de prêts de liquidité. Mais ces titres étant classés en catégorie « spéculative » par les agences de notation, la BCE n’avait en théorie pas le droit de les accepter, sauf dérogation…

L’arme des liquidités

Privées de ce robinet principal, les banques grecques s’étaient alors tournées vers le guichet d’urgence de la BCE, celui des « ELA », beaucoup plus cher (1 % à 1,5 % de plus), où elles se financent toujours. Une situation délicate, alors que la plupart d’entre elles sont fragilisées par des années de récession et de crise de confiance. Choqués par la décision de la BCE, nombre d’observateurs avaient, en février 2015, dénoncé un « chantage » et un « coup d’Etat financier » envers Athènes.

De fait, l’institut monétaire a déjà utilisé l’arme des liquidités pendant la crise. En 2010, Jean-Claude Trichet, président de la BCE à l’époque, avait ainsi menacé de couper le robinet d’urgence aux banques irlandaises si le gouvernement de l’île n’entrait pas sous un plan de sauvetage européen. Ce qu’il fit presque aussitôt… De son côté, la BCE a toujours affirmé que son rôle n’était pas de prendre des risques en acceptant des titres peu sûrs si, en échange, les Etats concernés ne font pas d’efforts.

En rétablissant la dérogation suspendue en février 2015, la banque centrale recommencera, dès le 29 juin, à accepter les titres d’Etat grecs comme garantie. Une étape importante pour le retour à la normale du financement de l’économie grecque, toujours sous contrôle des capitaux. Selon les experts, cela contribuera à rétablir la confiance dans le secteur bancaire. Et au retour progressif des dépôts, que les particuliers et entreprises grecs ont massivement retiré ces dernières années.

Le gouvernement grec rêve que, dans la foulée, l’institut de Francfort accepte également les titres souverains hellènes dans son programme de rachat de dettes publiques, l’assouplissement quantitatif (quantitative easing en anglais, ou QE). Cela aiderait beaucoup le pays, en tirant à la baisse les coûts de financement de son économie. Et en le protégeant de la spéculation contre sa dette. La BCE a indiqué qu’elle se pencherait sur la question « à une date ultérieure ». D’ici là, la Grèce devra encore faire preuve de bonne volonté dans l’application des réformes exigées par ses partenaires.