Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, et russe, Vladimir Poutine, à Saint-Pétersbourg, le 9 août 2016. | SPUTNIK / REUTERS

Entre Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan, le sujet de la Syrie est tellement brûlant qu’il a nécessité, mardi 9 août, une rencontre à part, à laquelle ont été conviés des militaires côté russe, et, côté turc, le chef des services secrets (MIT), Hakan Fidan. « Nos points de vue sur la question syrienne ne coïncident toujours pas (…), mais nous avons un objectif commun : régler la crise (…), et nous allons chercher une solution commune acceptable pour tout le monde », a déclaré M. Poutine.

A ce sujet, les retrouvailles russo-turques ne pouvaient pas tomber plus mal. Elles sont survenues au moment où les groupes de combattants rebelles opposés au régime de Bachar Al-Assad ont soudain repris la main à Alep, brisant le siège imposé par les troupes du régime, lesquelles sont soutenues par l’aviation russe.

Le 2 août, Moscou a subi sa plus grosse perte en dix mois d’opérations aériennes en Syrie, quand un hélicoptère Mi-8 a été abattu au-dessus d’Idlib avec cinq militaires à son bord. L’hélicoptère venait de livrer de l’aide aux troupes loyalistes qui combattent à Alep et s’apprêtait à regagner sa base de Hmeimim, dans la région de Lattaquié, lorsqu’un tir venu du sol a interrompu sa course.

Inquiétude d’Ankara

Venu d’une zone contrôlée par le Front Fatah Al-Cham (le nouveau nom du Front Al-Nosra), soutenu par la Turquie, le Qatar et l’Arabie saoudite, le tir est provenu d’un système portatif de défense aérienne (Manpad) de fabrication américaine, comme les experts militaires russes n’ont pas manqué de le souligner.

L’utilisation de ce type d’armes par les rebelles pourrait changer la donne en Syrie, comme ce fut le cas dans l’Afghanistan des années 1980, lorsque des missiles Stinger fournis par les Etats-Unis donnèrent l’avantage aux rebelles afghans en lutte contre l’armée soviétique.

Les systèmes portatifs de défense inquiètent aussi Ankara dans la guerre qui l’oppose aux rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, autonomiste, interdit en Turquie). Le 14 mai, les rebelles avaient publié la vidéo d’un de leurs combattants en train d’abattre un hélicoptère Cobra de l’armée turque à l’aide d’un Manpad dans la province d’Hakkari (sud-est).

L’état-major turc avait fini par reconnaître que le Cobra avait été touché par un tir de missile russe, de type Igla (SA-18 Grouse, selon la terminologie de l’OTAN), tiré depuis Çukurca, non loin de la frontière avec l’Irak. Qu’une arme russe de ce type se retrouve entre les mains du PKK avait ravivé les inquiétudes turques sur le risque de régionalisation du conflit syrien, où Moscou et Ankara s’affrontent par rebelles interposés.