Le premier minsitre libyen, Faïez Sarraj, le 17 juillet, à Tunis. | FETHI BELAID / AFP

Le Parlement libyen a refusé, lundi 22 août, d’accorder sa confiance au gouvernement d’union nationale (GNA) tout en donnant une « dernière chance » au premier ministre, Faïez Sarraj, de présenter un nouveau « gouvernement restreint » dans un délai de dix jours. Pour la première fois en cinq mois, la Chambre des représentants est parvenue à réunir le quorum requis pour voter, avec 101 députés présents sur un total de 198. Soixante et un députés se sont prononcés contre la motion de confiance, un seul en sa faveur et 39 se sont abstenus. Des députés proches du GNA, dont beaucoup étaient absents lundi, ont contesté la légalité du vote, au motif qu’il n’était pas inscrit à l’ordre du jour.

C’est un revers pour le gouvernement Sarraj, en quête de légitimité pour asseoir son autorité sur l’ensemble du pays et mener à bien l’énorme chantier pour sortir la Libye du chaos dans lequel elle se trouve depuis la chute du colonel Mouammar Kadhafi, en 2011. Formé dans le sillage de l’accord interlibyen parrainé par les Nations unies et signé à Skhirat, au Maroc, le 25 décembre 2015, le GNA s’est installé en mars à Tripoli. Mais il n’a toujours pas obtenu l’aval du Parlement, installé à Tobrouk, dans l’est du pays.

« Ce n’est pas anodin que ce vote intervienne à un moment de victoire à Syrte », estime Jason Pack, chercheur spécialiste de la Libye

Une partie des députés, emmenés par le président de la Chambre, Aguila Saleh, est accusée de bloquer le processus politique. Ils réclament notamment le maintien de leur allié, le général Khalifa Heftar, à la tête de l’armée, ce que refusent les milices de Tripoli et de Misrata, qui ont apporté leur soutien à M. Sarraj.

« La question est désormais de savoir si le Conseil présidentiel [l’organe exécutif composé du premier ministre Faïez Sarraj et des huit vice-premiers ministres] va accepter le vote et présenter un nouveau cabinet. Il est possible qu’il continue à travailler en se passant du soutien de la Chambre des représentants. Les parrains internationaux pourraient l’y encourager. Mais s’il refuse ce vote, cela risque d’aggraver la crise institutionnelle », analyse Claudia Gazzini, de l’International Crisis Group.

La survie du Conseil présidentiel est en jeu

En dépit du blocage au Parlement, le GNA gère depuis Tripoli les affaires courantes, avec le soutien de l’ONU et des parrains internationaux, inquiets de l’expansion de l’organisation Etat islamique (EI). Il a ainsi réuni des forces pour partir à la reconquête, le 12 mai, de Syrte, l’ancien bastion kadhafiste de l’est du pays, tombé aux mains de l’EI. Les djihadistes ne tiennent désormais plus que deux quartiers dans le nord de la ville.

« Ce n’est pas anodin que ce vote intervienne à un moment de victoire à Syrte, estime le chercheur Jason Pack, spécialiste de la Libye. Il vient rappeler au gouvernement que cette victoire ne suffira pas à lui assurer l’autorité sur l’ensemble du pays. » La survie du Conseil présidentiel est en jeu, alors que deux de ses membres ont rallié le camp du refus. Le Parlement les a appelés, lundi, à cesser leur boycottage, dans un geste présenté comme un gage de bonne volonté.

« Une dernière chance est offerte à M. Sarraj. Le Parlement s’inscrit dans une perspective positive de recherche de solution », assure Mohamed Dayri, ministre des affaires étrangères dans l’ancien gouvernement intérimaire, dont le Parlement reconnaît toujours l’autorité. Il se veut optimiste sur les chances de succès des nouveaux pourparlers engagés sous le patronage de l’Egypte, fin juillet au Caire, entre les deux camps.