Un plan de lutte contre la maladie de Lyme
Un plan de lutte contre la maladie de Lyme
Par Raphaëlle Maruchitch
Le ministère de la santé veut répondre aux difficultés de prise en charge des patients, alors que l’affection transmise par la tique divise la communauté médicale.
La maladie de Lyme est transmise par la tique, un acarien géant qui se nourrit de sang. | BERTRAND GUAY/AFP
La ministre de la santé, Marisol Touraine, a rendu public, jeudi 29 septembre, un plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les autres maladies vectorielles transmises par la tique. Cet acarien géant, qui se nourrit de sang, a été très médiatisé dernièrement, en particulier parce qu’il peut causer une maladie infectieuse, aisément traitable et identifiable dans sa forme aiguë, mais qui devient bien plus complexe à soigner dans ses formes tardives.
La maladie de Lyme, qui toucherait plus de 26 000 personnes supplémentaires chaque année, présente en effet des signes cliniques subjectifs (maux de tête, troubles de la mémoire) et le diagnostic est alors difficile à poser. Quant aux tests d’aide au diagnostic, ils sont imparfaits.
De fait, la communauté scientifique est divisée sur son épidémiologie comme sur sa prise en charge. Partout dans le monde, les associations de patients se mobilisent pour que cette dernière évolue. En France, après la publication, fin 2014, d’un rapport très complet sur le sujet par le Haut Conseil de santé publique, le ministère de la santé avait annoncé en juin la présentation d’un plan national de lutte, qui était très attendu par les associations de malades.
« La raison de la création de ce plan aujourd’hui est que la maladie de Lyme n’est pas suffisamment reconnue et que nombre de patients se sentent livrés à eux-mêmes, a expliqué au Monde Marisol Touraine. Ce qui frappe, c’est la montée des débats qui ne sont pas toujours maîtrisés et donnent lieu à des interrogations scientifiques. Le plan est l’expression d’une volonté de mieux connaître et de mieux comprendre la maladie. » La ministre de la santé a souligné qu’elle souhaitait « éviter la situation d’abandon et d’errance thérapeutique dans laquelle se trouvent les patients ». D’où, notamment, la mise en place d’un protocole national de diagnostic et de soins ayant pour but d’harmoniser la prise en charge.
Pas de précision sur le budget
A travers cinq axes stratégiques, le plan couvre les sujets de la surveillance et de l’amélioration des connaissances sur les tiques, de la prévention, de l’amélioration de la prise en charge des malades, de l’amélioration des tests diagnostiques, ainsi que celui de la recherche. En outre, la ministre de la santé a précisé que les « formations initiales et continues [des médecins] seraient très certainement revues en fonction des résultats des travaux qui seront menés dans le cadre du plan ». Nulle mention, cependant, du budget qui devra être mobilisé pour le mettre en œuvre.
Pour leur part, les associations de patients attendaient beaucoup des mesures du ministère. « Nous souhaitons qu’il y ait une reconnaissance officielle de la maladie, mais aussi une reconnaissance sociale et une prise en compte de la prévention de façon massive », résumait Anne Colin, présidente de Lympact, l’association de prévention et d’action contre les maladies vectorielles à tiques. Le plan fait d’ailleurs état de l’évaluation en cours de « l’opportunité d’inscrire la maladie de Lyme dans la liste des affections de longue durée ».
Parmi les revendications des associations apparaissait également celle de l’arrêt des poursuites engagées par l’Assurance maladie envers certains médecins, qui dérogent aux protocoles établis pour soigner les malades en prescrivant des antibiotiques sur de longues durées. Marisol Touraine a rappelé au Monde que « l’objectif du protocole national de diagnostic et de soins, mesure phare du plan, est précisément de mettre en place un parcours conforme aux pratiques des médecins et aux dernières données scientifiques ».
Dans le monde médical, la maladie de Lyme fait débat. Le 20 septembre, l’Académie de médecine organisait une séance à laquelle ont participé des experts du sujet, aux visions bien différentes. Son organisateur, l’infectiologue François Bricaire, mentionnait en préambule que le « sujet [prenait] même des proportions assez excessives ».
Parfois franchement houleux, les échanges ont illustré l’opposition entre ceux qui redoutent un surdiagnostic de la maladie et ceux qui dénoncent une grave sous-évaluation de son impact. « Face aux médecins divisés, il ne m’appartient pas de trancher, a indiqué la ministre. Je suis extrêmement attentive à ne pas me substituer aux chercheurs ou aux médecins. Ma responsabilité est de mobiliser la recherche et de donner les moyens de prévenir cette maladie. »