Le retour de PSA en Iran s’annonce fructueux
Le retour de PSA en Iran s’annonce fructueux
Par Éric Béziat (Téhéran, Kashan)
Peugeot a signé plusieurs accords stratégiques à Téhéran pour être à nouveau un acteur de poids sur le marché automobile iranien.
Le président d’IKCO, Hashem Yekkeh-Zareh, et son homologue de PSA, Carlos Tavares, le 5 octobre à Téhéran. | ATTA KENARE / AFP
Pour un patron de Peugeot, l’Iran c’est un peu comme un rêve. Carlos Tavares, président de PSA, accompagné de son comité exécutif, a pu le vivre, lors de son premier voyage en République islamique, du 3 au 6 octobre. Quatre millions de Peugeot roulent en Iran, et la griffe au lion y détient un gros tiers de la part de marché. Il y en a littéralement partout.
Le plus frappant est l’omniprésence sur les routes iraniennes des 206 et surtout des 405 Peugeot – une voiture lancée en 1987. Elles prennent là-bas toutes sortes de formes : rafistolées, renommées, restylées, relookées, reformatées par les constructeurs locaux qui les proposent un peu à toutes les sauces, y compris en forme de pick-up vendu sous le nom assez peu iranien de « Harrison ».
C’est sur ce territoire presque conquis d’avance que Carlos Tavares a signé, jeudi 6 octobre, un accord stratégique avec Saipa, deuxième constructeur iranien d’automobiles, pour relancer en pays persan la marque Citroën. La coentreprise créée dans ce but sera détenue à stricte parité par les deux constructeurs et produira à partir de 2018, à Kashan, dans le centre du pays, trois modèles Citroën adaptés au cœur du marché iranien. L’usine de Kashan deviendra propriété du groupe PSA pour 50 %. L’investissement total, dont la part dévolue à PSA n’a pas été révélée, s’élève à plus de 300 millions d’euros sur cinq ans.
La veille, mercredi 5 octobre, M. Tavares avait officiellement lancé IKAP, l’autre coentreprise qu’il a fondée dans le pays pour la marque Peugeot. Il s’est associé cette fois-ci avec Iran Khodro (IKCO), premier constructeur automobile iranien et féroce concurrent de Saipa. La cérémonie, qui réunissait le patron de PSA, son homologue d’IKCO, Hashem Yekezareh, et les cadres du groupe automobile, avait attiré plus de cent journalistes.
« Levier stratégique »
La coentreprise (détenue par les deux groupes à 50-50 également) investira 400 millions d’euros sur cinq ans, pour beaucoup dans la rénovation d’une partie de l’usine d’IKCO à Téhéran, un site monstre qui s’étend sur cinq kilomètres et qui emploie 30 000 personnes. Des chaînes remises à neuf sortiront trois Peugeot de facture récente : le petit 4 × 4 urbain Peugeot 2008, dès 2017, suivi de la berline moyenne 301 et de la petite cinq-portes 208.
Cette tournée acte le retour de PSA en Iran, quatre ans après son départ précipité. En 2012, le groupe français avait déguerpi pour éviter d’être pris dans la tourmente des sanctions internationales ciblant le régime et l’économie du pays, pour cause de programme nucléaire menaçant. A l’époque, PSA était en négociation pour créer une alliance avec le géant américain GM. Toute activité économique ou commerciale avec l’Iran aurait menacé l’existence même de l’entreprise française.
Un peu plus d’un an après l’accord de Vienne, qui lève les principales sanctions visant l’Iran, revoilà donc PSA. Dans sa marche en avant iranienne, Peugeot-Citroën – on l’a vu – a choisi de marcher sur deux jambes : IKCO pour Peugeot, Saipa pour Citroën. Détail piquant, les deux marques « amies » de PSA se retrouvent, en Iran, sous des bannières fortement concurrentes. Pour sa troisième (et récente) marque, DS, destinée à une clientèle aisée (le premier prix s’établit à plus de 50 000 euros en Iran), PSA se contente d’un partenariat commercial avec la société Arian, spécialisée dans la distribution automobile et qui vendra les DS importées.
Dans cette partie du monde, Carlos Tavares fait de l’Iran son « levier stratégique numéro 1 ». « L’Iran va être la première base d’approvisionnement pour la région », a-t-il expliqué en rappelant l’objectif de PSA de vendre un million de véhicules dans la zone Moyen-Orient et Afrique en 2025. PSA ambitionne de parvenir à 350 000 unités produites en Iran à l’horizon 2021, 200 000 Peugeot et 150 000 Citroën. Le groupe assigne à ses deux coentreprises un taux d’exportation de 30 % de la production conforme aux exigences du ministère iranien de l’industrie et en ligne avec le plan de croissance de PSA.