Mairie de Châlus (Haute-Vienne), en mars 2014. | THIERRY ZOCCOLAN / AFP

Dans la salle des fêtes de Saint-Vincent-de-Boisset, un sifflotement harmonieux pour conclure : une élue bretonne rejoue, trois minutes durant, l’air d’une chanson de Piaf. Près de son église et de rares exploitations bovines, cette commune de la Loire accueillait ce week-end le congrès annuel de l’Association des maires ruraux de France (AMRF).

A six mois de la présidentielle, les quelque 130 maires réunis lors de l’assemblée générale de clôture sont pourtant loin de voir La Vie en rose. « On souffre d’une image rétrograde, négative, passéiste, comme si le monde rural, connu pour ses paysages et sa qualité de vie, n’existait plus ou était en voie de disparition », regrette le centriste Vanik Berberian, président de l’association et maire d’un village dans l’Indre, Gargilesse-Dampierre.

Pour faire entendre les revendications de ses 10 000 communes membres, mais aussi démontrer « la vitalité, le potentiel » de leurs 8 millions d’habitants, l’AMRF a lancé à la rentrée les « Etats généreux de la ruralité ». Derrière le jeu de mots facile, l’ambition est d’organiser des réunions départementales pour ficeler un programme destiné aux futurs candidats à la présidence de la République.

L’une des propositions prévoit rien de moins que de « réviser la Constitution ». Et en particulier son article 2, pour qu’y apparaisse une référence explicite aux « territoires » de la France, et que « la prise en compte de l’espace, de la superficie » devienne « une réalité contraignante au même titre que l’égalité entre les citoyens ».

Sur ses terres, Bernard Fournier, sénateur (LR) de la Loire, va jusqu’à dénoncer une « injustice criante » à propos des aides de l’Etat aux collectivités. Jugement partagé chez les congressistes de droite comme de gauche. En 2017, la dotation dévolue à l’équipement des territoires ruraux augmentera pourtant de 800 millions à 1 milliard d’euros. Mais l’insatisfaction se cristallise toujours autour de la dotation globale de financement. Celle-ci « varie de 64,46 € à 128,93 € par habitant (...), en fonction croissante de la taille des communes », rappelait en 2014 le ministère des finances et des comptes publics. Du simple au double, selon que l’on habite à la campagne ou en ville.

« Je choisis Lutte ouvrière »

Entre deux groupes de travail sur l’école et la santé, Catherine Saumont dit comprendre « l’exaspération générale » de ses administrés. Mais la maire trouve toujours aussi « douloureux » de constater que ce sentiment profite au Front national. Même dans son village de Rousset, 155 âmes, dans les Hautes-Alpes.

Sans étiquette, l’élue redoute aussi l’application de la loi du 7 août 2015 réformant l’organisation territoriale de la République (dite « NOTRe ») qui transférera certaines de ses compétences vers une intercommunalité, à compter de janvier. Au point de se sentir en situation de « non-écoute », sauf quand des militants ou conseillers lui proposeront – « à chaque fois, je choisis Lutte ouvrière » – d’apporter son soutien à tel candidat en quête des 500 parrainages nécessaires à toute campagne présidentielle.