A 93 ans, Stan Lee, le prolifique créateur de Spiderman et de dizaines d’autres super-héros, n’entend pas cesser de publier. Cette semaine sort Zodiac Legacy, son premier roman, coécrit avec Stuart Moore et Andie Tong, et publié chez Pika en France. Destiné aux adolescents, l’ouvrage raconte les aventures très super-héroïques d’un jeune homme qui découvre par accident l’existence de pouvoirs surnaturels liés aux signes du zodiaque chinois.

Zodiac Legacy se lit quasiment comme un « comics ». Pourquoi avez-vous choisi le format d’un roman pour raconter cette histoire ?

Il nous a semblé que c’était une histoire si large qu’il nous faudrait faire les choses de manière différente. Et nous avons compris qu’il nous faudrait l’écrire sous la forme d’un roman, parce qu’il y avait énormément de personnages et tellement de choses à raconter… Ce qui ne nous empêcherait pas d’avoir des illustrations dans le roman. C’était aussi l’occasion de faire quelque chose de nouveau et de différent !

En quoi était-ce différent ?

Lorsque je travaille sur une bande dessinée, je discute avec un artiste et j’essaye de faire en sorte que chaque case de chaque page raconte l’histoire de la meilleure manière possible. Dans un roman, tout ce que vous pouvez faire, c’est d’espérer que vous écrivez de la meilleure manière pour raconter l’histoire. Le processus est similaire dans les deux cas, mais quand vous n’avez pas recours aux illustrations, vous pouvez vous concentrer sur l’écriture et vous n’avez pas à vous demander en permanence si les dessins sont justes.

Une des planches illustrées qui accompagnent le roman « Zodiac Legacy ». | 2016 Disney

Pourtant, Zodiac Legacy est un roman illustré, avec de nombreux dessins au fil des chapitres.

Bien sûr, il y a des illustrations. Mais on peut parfaitement lire l’histoire sans. Les illustrations sont juste un plaisir supplémentaire pour le lecteur.

Le roman débute à Hongkong. Doit-on comprendre que vous vous êtes lassé de New York, où se déroulent l’écrasante majorité de vos précédents scénarios ?

[Rires.] Non ! Une histoire peut débuter n’importe où. La plupart de nos super-héros viennent de New York parce que je voulais que tout soit lié et que l’univers soit réaliste. Mais l’histoire de Zodiac n’avait pas besoin de se dérouler à New York – au contraire, je voulais qu’elle se situe en Asie. C’était très intéressant pour moi qu’elle aborde la thématique de l’Orient.

Mais il y a beaucoup de villes très différentes en Asie, pourquoi Hongkong ?

Parce que tout le monde connaît HongKong ! Bien sûr, l’histoire aurait pu se dérouler à Singapour ou n’importe où ailleurs. Il fallait bien faire un choix, et j’aime la sonorité de « Hongkong ».

Ce n’est donc pas la ville qui vous a inspiré cette histoire. Quelles ont été vos sources d’inspiration ?

C’est le zodiaque chinois. Nous avons considéré que ce serait très intéressant d’utiliser le zodiaque comme base d’un roman : il est connu dans le monde entier, tout le monde en a entendu parler, et pourtant personne ne sait rien ou presque à son propos. Nous pouvions donc raconter l’histoire de notre choix.

Steven, au centre, le personnage principal de Zodiac. | 2016 Disney

Steven Lee est un adolescent, tout comme Spiderman. Pourquoi racontez-vous autant d’histoires centrées sur l’adolescence ?

Tous les âges sont intéressants ! Daredevil est un adulte, The Hawk et Captain America aussi. Mais je pensais que pour parler du zodiaque, un adolescent serait plus approprié. Quand vous créez, vous avez toujours de nombreuses options. Qui sera le héros ou l’héroïne ? Sera-t-il ou elle fort ou faible ? Jeune ou âgé ? Vous devez faire tous ces choix, et la seule question qui vaille, c’est de vous demander « qu’est-ce qui fonctionnera le mieux pour raconter ce que je veux raconter ? » Pour cette histoire, en particulier, je voulais évoquer quelqu’un qui découvre subitement l’existence des pouvoirs du zodiaque et y est directement confronté – c’était plus intéressant que ce personnage soit un adolescent.

Steven Lee porte aussi le même nom que vous… Faut-il voir dans le roman des éléments de votre propre adolescence ?

Ce n’était pas du tout ma démarche. Lee est un nom extrêmement courant en Asie, cela semblait juste être le plus logique. Ce n’était pas une tentative pour me mettre en avant !

Jamais les super-héros n’ont autant pénétré le quotidien des adolescents et des jeunes adultes d’aujourd’hui. Comment l’expliquez-vous ?

Je suis sûr que quand vous étiez enfant, vous lisiez des contes de fées. Tous les enfants lisent des contes, des histoires de sorcières, de gobelins, de dragons et de géants. Et puis quand vous grandissez, vous ne pouvez plus lire de contes. Vous avez passé l’âge. Mais je pense qu’on n’est jamais trop vieux pour aimer ce type d’histoires, avec des scénarios plus grands que nature et plus imaginatifs que le monde réel. Les histoires de super-héros sont des contes pour les plus grands.

Vous reste-t-il encore des héros que vous voudriez voir portés à l’écran ?

Eh bien, en vérité, non : ceux qui ne l’ont pas encore été sont en cours d’adaptation. Même Iron Fist, dont vous n’auriez probablement pas imaginé qu’il ait droit à son film un jour ! Et puis, bien sûr, il y aura aussi Dr. Strange et Black Panther… Je suis très heureux qu’ils soient tous portés à l’écran. Mais il reste beaucoup de possibilités : j’aime faire en sorte que mes héros vivent dans le monde réel, et que dans n’importe quelle bande dessinée, n’importe quel film, bref dans n’importe quelle histoire, deux héros puissent se rencontrer. Spiderman peut rencontrer Daredevil, les X-Men rencontrent n’importe qui d’autre… Le fait qu’on ne sache jamais si un autre personnage ne va pas apparaître dans l’histoire est précieux.

Vous faites vous-même des apparitions régulières dans les films et les séries adaptées de vos héros, notamment dans « Doctor Strange » qui va bientôt sortir au cinéma. C’est une chose que vous allez continuer à faire ?

Bien sûr, je ne voudrais pas décevoir mon public !

Est-ce que vous comptez créer de nouveaux héros ?

Oui, je continue d’inventer en permanence de nouveaux super-héros. J’ai cette entreprise, Purveyors of Wonders (fournisseurs d’émerveillement), et nous avons un certain nombre de films en chantier. Ces deux prochaines années, vous me rappellerez peut-être pour discuter d’un personnage appelé « The Annihilator ». Ça, c’est ce qui est prévu pour l’instant, mais il y a encore beaucoup de choses que nous voulons faire.

Vous écrirez d’autres romans ?

Je pense que je reviendrai plutôt à la bande dessinée. Zodiac est un projet particulier, quelque chose que je voulais essayer. Je suis très content qu’il marche bien, mais j’adore travailler en binôme avec un dessinateur. Ecrire une bande dessinée, c’est un peu comme réaliser un film : sauf qu’au lieu de dire aux acteurs ce qu’ils doivent faire, vous dites à un artiste ce qu’il doit dessiner. J’adore ça, voir émerger une histoire en images.

Zodiac Legacy, tome 1 sur 3 publié le 12 octobre chez Pika éditions (chez Disney aux Etats-Unis), 14,90 euros.