L’accident, dont les causes sont toujours inconnues, s’est produit vendredi à la mi-journée, près de la gare d’Eseka, à environ 120 km à l’ouest de Yaoundé. | STRINGER / AFP

« C’était la deuxième fois que je prenais ce train ». Glenn Zao, jeune Brazzavillois résidant à Yaoundé, devait se rendre au port de Douala pour des raisons professionnelles. Après le déraillement du train survenu le vendredi 21 octobre qui a fait au moins 79 morts et entre 500 et 600 blessés, selon le dernier bilan du ministère de la santé lundi matin, il est encore « sonné » mais s’estime chanceux de s’en être sorti avec seulement quelques égratignures.

« Au départ, il y avait beaucoup de wagons. Ils étaient tous pleins », témoigne le jeune homme, qui, comme de nombreux voyageurs, n’avait pas pu rejoindre Douala par la route suite à l’effondrement d’un pont pour cause de fortes pluies.

Pour pallier à l’affluence de voyageurs sur le trajet de l’intercity 152 Yaoundé – Douala du vendredi matin, la société Camrail, dont l’actionnaire principal est le groupe français Bolloré, décide d’ajouter huit wagons aux neuf voitures prévues du train. Au total, plus de 1 300 personnes voyagent à son bord. Suite à la catastrophe, le ministre du Transport camerounais déclinait toute responsabilité sur RFI vendredi soir : « pas la peine de chercher un bouc émissaire du côté du gouvernement » tandis que la société ferroviaire lançait une enquête technique pour déterminer les causes de l’accident.

« Le train a commencé à fumer »

« Quelques kilomètres avant le lieu du drame, le train a commencé à fumer », détaille Glenn, alors situé quatre wagons après la locomotive. « Puis il a ralenti. Après, tout d’un coup, il a accéléré, un truc de malade. La locomotive s’est détachée et a continué à rouler. Nous, notre wagon s’est retourné à une vitesse de mort. Et derrière c’était pire ».

Vers 13 heures, heure locale, quatre voitures s’écrasent dans un profond ravin en gare d’Eseka, à environ 120 kilomètres à l’ouest de Yaoundé. Glenn raconte avoir eu la vie sauve grâce à sa fenêtre fermée, sans quoi il aurait été expulsé hors de la voiture pendant les tonneaux. N’ayant pas pu s’accrocher à son siège, il se retrouve propulsé de l’autre côté du wagon. Il s’en extirpe par le haut, sonné mais avec pour seules blessures une bosse au visage et une plaie au pied.

« C’était la désolation : des gens blessés, des bras coupés, des morts coincés sous les wagons… Je ne pouvais pas supporter de rester sur place », se souvient-il. Ce sont les habitants de la commune d’Eseka qui sont arrivés les premiers pour porter secours aux victimes. « Avec des voitures, ils emmenaient les blessés à l’hôpital », raconte le rescapé, qui garde en souvenir ces cadavres et blessés entassés dans un pick-up qui faisait des allers retours vers la morgue et le centre de soin. Le jeune homme n’avait pas encore vu les secours arriver lorsqu’il quitte finalement Eseka vers 15 heures. Sur la route de retour à Yaoundé, en milieu d’après-midi, il croise enfin des ambulances et des militaires.

Le président du Cameroun Paul Biya a décrété lundi 24 octobre journée de deuil national. L’extraction des morts sur le site de l’accident s’est achevée dimanche, et de retour dans le pays dans l’après-midi, le dirigeant a promis une enquête approfondie.

Caroline Chauvet, contributrice Le Monde Afrique