Affaire Barroso : Juncker revoit le code de conduite de la Commission
Affaire Barroso : Juncker revoit le code de conduite de la Commission
LE MONDE ECONOMIE
Le président s’engage à réformer les pratiques en matière de passage au privé pour les commissaires européens.
Après quatre longs mois de polémique, Jean-Claude Juncker a fini par céder face à la vague d’indignation qu’avait suscitée, début juillet, l’annonce du départ de son prédécesseur, José Manuel Barroso, pour la banque d’affaires américaine Goldman Sachs. Le président de la Commission a fini par admettre, dans une interview au quotidien belge Le Soir, samedi 5 novembre, que le code de conduite s’appliquant aux commissaires devait être réformé.
« Il faut changer le code éthique », a déclaré M. Juncker, qui s’engage à proposer d’allonger de 18 mois à 3 ans, pour le président de la Commission, la période dite de « refroidissement », durant laquelle il doit demander une autorisation à l’institution pour rejoindre un groupe privé. M. Juncker suggère aussi un allongement de 18 à 24 mois de la « période de carence » pour les simples commissaires.
Vivement critiqué
Il a dit vouloir soumettre ces modifications du code de conduite au collège de ses 27 commissaires, sans cependant préciser quand. « Si le collège [les 28 membres de la Commission] devait ne pas accepter cette position, je dirais publiquement que je ne prendrais pas d’emploi dans une banque ou une entreprise quelconque pendant trois ans. Même si par ailleurs je ne compte pas le faire plus tard non plus », a assuré Jean-Claude Juncker au Soir.
L’ex-premier ministre du Luxembourg a été vivement critiqué pour n’avoir que mollement dénoncé le pantouflage de M. Barroso (président de la Commission entre 2004 et 2014) dans la plus grande banque d’affaires au monde, qui plus est pour s’y occuper de sujets liés au Brexit. Il n’a saisi le comité d’éthique (un conseil de trois personnalités supposées indépendantes) au sujet de ce débauchage qu’en septembre dernier, et encore, sur pression de la médiatrice des droits européens, la pugnace Emily O’Reilly.
Image abîmée
La mobilisation – inédite – d’un certain nombre de fonctionnaires européens, d’ordinaire tenus par un strict devoir de réserve, a aussi compté. A l’origine d’une pétition particulièrement suivie sur Change.org (un peu plus de 150 000 signataires en ligne), ils ont été rejoints par une partie des syndicats maison, réclamant un changement du code de conduite et la saisine de la Cour de justice de l’Union pour non-respect, par M. Barroso, de l’article 245 du traité de l’Union, recommandant aux commissaires une conduite « intègre » et « discrète ».
Le comité d’éthique a rendu son verdict le 31 octobre, jugeant « peu judicieux » le choix de M. Barroso d’aller travailler chez Goldman Sachs, mais blanchissant en grande partie l’ex-premier ministre portugais, qui a de fait respecté l’actuelle période de carence de 18 mois. Cet avis n’a pas empêché Mme O’Reilly, la médiatrice des droits, de maintenir la pression, laissant entendre qu’elle se tenait prête à lancer une enquête…
La Commission en aura t-elle bientôt fini avec cette « affaire Barroso » qui a terni un peu plus une image déjà bien abîmée ? Pas sûr… « M. Juncker a fait une proposition qui va dans le bon sens [la réforme du code de conduite] mais qui peut encore être rejetée par le collège, et finalement il ne résout pas le cas Barroso, alors que l’ex-président doit être sanctionné. C’est la Cour de Justice de l’UE qui doit être saisie [au titre de non-respect de l’article 245] », estime un des initiateurs de la pétition, visiblement déterminé.