Ouf, ça passe ! Mais de peu. La région Normandie a confirmé, jeudi 10 novembre, une commande de 40 trains au canadien Bombardier, après la publication d’un rapport de la SNCF assurant que les rames n’étaient pas trop larges pour pouvoir entrer et sortir de gare Saint-Lazare, sans risque de collision.

« Cette étude a révélé que ça passe, et que ça passe juste », a indiqué à l’AFP Claude Solard, directeur général délégué de SNCF Réseau, la branche de la SNCF qui gère l’infrastructure des voies et des quais. Ces nouveaux matériels à deux étages, les trains Omneo, n’avaient jamais été testés sur le réseau normand (Paris-Rouen-Le Havre et Paris-Caen-Cherbourg). Or, ils sont plus larges de 15 centimètres que les vieux trains Corail actuels auxquels ils vont succéder.

Le problème se posait à Saint-Lazare en raison du rétrécissement rapide du faisceau de voies, notamment pour passer sous le pont de l’Europe. Le risque, même très minime, d’une catastrophe ferroviaire dans la gare immortalisée par Monet n’était évidemment pas envisageable.

« Plus rien ne s’oppose à la commande des trains »

La SNCF a donc travaillé pendant des mois sur le problème, étudiant dans quelle mesure un chantier d’aménagement des voies devait être lancé. Des travaux qui auraient pu occasionner des mois ou des années de retard, et donc un surcoût considérable, sans parler d’une annulation pure et simple de la commande de trains. Heureusement, les conclusions finales permettent à tout le monde de respirer.

La SNCF, d’abord, évite les railleries sur un cafouillage technique analogue à l’épisode des trains régionaux trop larges pour entrer dans les gares, en 2014. Bombardier, ensuite, se voit confirmer un marché de 600 millions d’euros. Mais c’est surtout Hervé Morin, le président (UDI) de la région Normandie, qui est soulagé. « Plus rien ne s’oppose à la commande des trains. Nous allons signer le 24 novembre », a-t-il déclaré jeudi. Trois jours avant, le vice-président chargé des transports Jean-Baptiste Gastinne (LR), avait indiqué que la région était « suspendue aux conclusions de ce rapport » et qu’elle ne « commanderait » que si elle était « sûre de ne pas prendre de risque financier ».

L’enjeu pour la Normandie est de taille. Pour la première fois, une région récupère la gestion de lignes nationales dites Intercité. Lors de la campagne de l’élection régionale, en 2015, M. Morin avait promis que la gestion par ses services améliorerait la qualité et la fréquentation de ces lignes actuellement déficitaires. La région a d’ailleurs obtenu une dotation exceptionnelle de l’Etat de 720 millions d’euros pour acquérir les nouveaux matériels.

La marge sur le gabarit est très faible

Il reste quand même quelques petits soucis. La marge sur le gabarit est tellement faible que des aménagements seront nécessaires pour éviter que les trains ne se frottent dans les courbes à l’entrée et à la sortie des quais. SNCF Réseau indique « qu’il faudra vérifier régulièrement que des travaux ou des circulations ne modifient pas la position de la voie ». De plus, selon la lettre spécialisée Mobilettre, le risque lié à certaines configurations de circulation sur l’aiguillage de Saint-Lazare pourrait conduire à interdire 5 % des itinéraires actuels.

Une potentielle annulation de liaisons qui fait bondir par avance l’opposition normande. Son chef, Nicolas Mayer-Rossignol (PS), a déploré qu’Hervé Morin n’ait « pas rendu publique l’intégralité du rapport ». M. Mayer-Rossignol attend de l’avoir reçu pour « juger sur pièces ». « Tout cela reste inquiétant pour les usagers Normands », a-t-il ajouté.