Sur les disciplines dites d’« ouverture », en quoi l’approche de la Commission des titres d’ingénieurs (CTI) a-t-elle évolué ?

Pour former de bons professionnels, les écoles d’ingénieurs ont besoin d’un cadre de référence, à savoir le portefeuille de compétences génériques. Ce que nous précisons peu à peu, ce sont les différentes voies d’accès à ces compétences. Ces dernières années, nous avons mis l’accent sur la culture générale et sur la responsabilité sociale, en précisant ce qu’on pouvait en attendre. Idem sur l’innovation et l’entrepreneuriat.

Le nombre d’heures dans le cursus est-il le seul indicateur ?

Il y a d’abord une part significative – mais qui n’est pas quantifiée plus explicitement – de l’enseignement en classe, avec un professeur, qui leur est consacrée. Nous souhaitons que ce temps total, sur les trois années du cycle de formation d’un ingénieur, soit réduit à une fourchette de 1 800 à 2 000 heures, afin que les élèves se consacrent davantage au travail personnel. Sur ce total, les langues occupent autour de 10 % et les sciences humaines et sociales (SHS) entre 15 % et 25 %.

Mais ces pourcentages ne sont pas les seuls indicateurs. Un travail sur un projet, par exemple, permet de faire progresser les élèves en SHS. Enfin, nous regardons si l’école a bien intégré ces enseignements d’ouverture dans son schéma pédagogique, en fonction du métier auquel elle prépare. Le génie industriel, par exemple, demande des compétences en SHS plus larges que celui de concepteur-développeur en informatique.

Les écoles sont donc libres de recourir à des modalités différentes ?

Nous sommes très ouverts sur les modalités d’acquisition de ces compétences. La pédagogie par projet, notamment, peut être un excellent vecteur. Un projet technologique mené en anglais a tout à fait sa place dans la démarche d’acquisition de compétences en langue. Dans notre dernier référentiel, nous insistons aussi sur l’initiation à la recherche.

Cette évolution ne risque-t-elle pas de se faire au détriment de l’enseignement des sciences dures ?

Sur la formation scientifique générale, il n’y a aucun compromis. Et dans le cas d’un double diplôme, nous vérifions que l’acquisition des compétences de base de l’ingénieur est bien prise en compte.

Vous arrive-t-il de retirer votre accréditation à une école ?

Cela est arrivé, de façon ponctuelle. Nous rendons parfois un avis négatif sur tel cursus ou tel nouveau programme mais nous ne sommes pas dans une logique de sanction à l’égard des écoles. Nous préférons agir sous forme de recommandations. L’accréditation est accordée pour une durée de trois ans ou de six ans, au besoin avec un rapport intermédiaire. Les deux tiers des accréditations prévoient un rapport d’étape.

Ces questions font-elles encore débat aujourd’hui ?

Il existe un large consensus parmi les différentes parties prenantes. Quand nous révisons nos référentiels, nous le faisons en liaison étroite avec des DRH, avec la Conférence des directeurs d’écoles françaises d’ingénieurs (Cdefi), et en nous appuyant sur différentes études. La CTI est composée pour moitié de représentants du monde économique. L’objectif reste de former d’excellents ingénieurs, aptes à comprendre les besoins de la société, à dialoguer avec l’ensemble des acteurs de l’entreprise et à apporter des innovations scientifiques et technologiques.

Un dossier spécial pour tout savoir sur les écoles d’ingénieurs

Retrouvez notre dossier spécial dédié aux écoles d’ingénieurs, publié progressivement sur notre site (rubrique Ecoles d’ingénieurs) et dans un supplément de 12 pages publié dans « Le Monde » daté du jeudi 24 novembre, avec des décryptages, des reportages dans les écoles ainsi que des témoignages.