LA LISTE DE NOS ENVIES

Au menu cette semaine : la captivante exposition de photographies de famille à la Maison européenne de la photographie – à Paris – et le bouleversant « Vangelo », écrit et mis en scène par Pippo Delbono au Théâtre du Rond-Point.

PHOTOGRAPHIE : Des albums de famille tout sauf ennuyeux

Une photo tirée de la série de Nicholas Nixon. Collection Maison européenne de la photographie, Paris. | courtesy Fraenkel Gallery, San Francisco

Voilà la preuve qu’il n’est pas forcément besoin de trouver un thème exotique ou de voyager bien loin pour être un grand artiste. La Maison européenne de la photographie, à Paris, a tiré de ses riches collections les œuvres de photographes américains qui ont tous pris leur famille comme sujet. Et le résultat est surprenant, intriguant, captivant, bouleversant. Eugene Meatyard fait poser ses enfants avec des masques dans des maisons abandonnées pour faire naître de drôles d’histoires.

Richard Avedon photographie sans pitié la déchéance de son père atteint d’un cancer. Mais la série la plus frappante (et la plus célèbre) est sans conteste celle de Nicholas Nixon, qui a photographié depuis 1974 sa femme en compagnie de ses trois sœurs, toujours dans le même ordre : on les voit vieillir à l’image, s’adoucir et changer, passer de l’état de jeunes filles à celui de femmes âgées. Et on voudrait arrêter la photographie pour retenir le temps dont le passage devient si cruellement visible. Claire Guillot

Family Pictures, Maison européenne de la photographie, 5-7, rue de Fourcy, Paris 4e. Jusqu’au 29 janvier. 4,5 € et 8 €. Du mercredi au dimanche, de 11 heures à 19 h 45.

THÉÂTRE : Le bouleversant évangile de Pippo Delbono, au Théâtre du Rond-Point

Pippo Delbono sur la scène du Théâtre du Rond-Point, à Paris, dans sa pièce « Vangelo ». | LUCA DEL PIA / THEATRE DU ROND POINT

Le nouveau spectacle de Pippo Delbono est magnifique. Comme l’indique son titre, Vangelo, c’est un évangile, mais un évangile à la façon de l’Italien. En colère contre tous les dieux de la peur, en accord avec l’amour sans frontière. Sur le plateau, il y a un réfugié afghan, Safi Zakria, que Pippo Delbono a rencontré pendant qu’il préparait le spectacle. Safi est à sa place, comme Gianluca, Bobo et tous ces êtres un peu bizarres et bouleversants qui nous invitent à ne pas lâcher. Pippo Delbono les guide, il est dans la salle, ou sur scène, il parle, danse avec les autres, il convoque Saint-Augustin, Led Zeppelin, Pier Paolo Pasolini, dans des tableaux rouges et noirs où l’enfer côtoie la rédemption. C’est une ode à la vie qui nous est offerte. Une ode dédiée par Pippo Delbono à sa mère, qui lui disait avant de mourir : « Pippo, pourquoi tu ne fais pas un spectacle sur l’Evangile ? » Brigitte Salino

Théâtre du Rond-Point, 2 bis, Avenue Franklin-Roosevelt, Paris 8e. Métro : Franklin-Roosevelt. Tél. : 01-44-95-98-21. A 21 heures ; dimanche, à 15 heures. De 12 € à 38 €. Durée : 1 h 50. En italien surtitré.

MUSIQUE : Les 40 ans du Chœur de l’Orchestre de Paris

La Biennale d’art vocale inaugurée en 2003 tiendra sa huitième édition à la Philharmonie de Paris. Invité de marque les samedi 21 et dimanche 22 janvier, le Chœur de l’Orchestre de Paris, chœur symphonique amateur, aujourd’hui dirigé par le charismatique Lionel Sow, qui fête quarante ans de bons et loyaux services. En 1976, le grand Te Deum de Berlioz avait ouvert les bans avec l’Orchestre de Paris à l’initiative de Daniel Barenboïm qui en était alors le directeur musical. C’est à nouveau le mastodonte choral du bouillonnant Hector (300 choristes au compteur) qui clôturera la soirée, après la Symphonie n° 2 « Le double » de Dutilleux, puis la commande d’une création mondiale faite à Philippe Hersant, La Lumière et l’Ombre. Le lendemain, hommage au chef de chœur anglais Arthur Oldham, pionnier de l’ensemble parisien, qui composait aussi à ses heures, et à son maître Benjamin Britten. Marie-Aude Roux

Philharmonie de Paris, Paris 19e. Le 21 janvier à 20 h 30, le 22 janvier à 11 heures. Du 20 au 29 janvier. De 10 € à 50 €. Philharmoniedeparis.fr

EXPOSITION : En mer avec Marco Polo et Ibn Battûta, à l’IMA

L’arche de Noé dans Jâmimi al-tawârîkh (Histoire universelle) : Rashîd al-Dîn, 1314-1315, Tabriz, Iran. | NOUR FOUNDATION/ KHALIL FAMILY TRUST / BNF

Un splendide boutre omanais, dont les bordées et le pont sont en teck nu, de 31 mètres de long avec son gréement – mât, baume et boute-dehors –, repose jusqu’au 26 février, sur le parvis de l’Institut du monde arabe (IMA), à Paris. Du nom de Nizwa, ancienne capitale du sultanat d’Oman, ce bateau est l’emblème de ces « aventuriers des mers » qui ont sillonné la Méditerranée, la mer Rouge et l’océan Indien en quête de nouveautés, et auxquels l’IMA consacre une exposition. Colportant aussi bien les denrées que les croyances, les ­cultures et les modes de vie, ils couraient les mers d’un continent à l’autre avec à leur bord des Marco Polo et Ibn Battûta.

De rares manuscrits enluminés sont montrés dans l’exposition, qui s’ouvre sur le spectacle d’une tempête en Méditerranée, telle cette carte de l’océan Indien, du Livre des ­curiosités (Egypte, XIe siècle), représenté comme un espace fermé, ou encore ces traités d’astronomie provenant d’Anatolie (XIVe siècle) et d’Iran (XVIe). Mais aussi des instruments de navigation, astrolabe du Yémen, globe céleste d’Iran, céramiques, ou encore meubles portugais incrustés d’ivoire venus de Goa, qui racontent les conquêtes, les razzias des marchands et les trésors convoités. Florence Evin

Institut du monde arabe, 1, rue des Fossés-Saint-Bernard, Paris 5e. En semaine, de 10 à 18 heures, sauf le lundi ; le week-end, jusqu’à 19 heures. 10 à 12 euros. Imarabe.org Jusqu’au 26 février.

PHOTOGRAPHIE : Brassaï fait le mur

Brassaï, Sans titre, de la série Graffiti © Centre Pompidou – Estate Brassaï | Centre Pompidou/Estate Brassaï

Les graffitis de Brassaï sont archiconnus : à partir des années 1930, le photographe hongrois a collecté les images de dessins gravés par des inconnus sur les murs de la capitale parisienne. Le Centre Pompidou, qui possède de nombreux tirages de cette série publiée en livre en 1961, lui consacre une exposition très fouillée dans sa galerie de photographies en sous-sol (entrée gratuite). On y découvre, outre ces images pleines de magie et de mystère, le contexte et les interprétations successives qui les ont accompagnées. Obsédé par ses graffitis au point de répertorier ses trouvailles sur des carnets de dessin et des cartes, Brassaï ne se voyait pas pour autant comme un enquêteur sociologique. C’est plutôt la poésie des motifs qui l’intéressait, leur capacité à traduire l’essence de la condition humaine : la mort, l’amour, le sexe. Claire Guillot

Centre Pompidou, Paris 4e. De 11 heures à 21 heures. Gratuit. Tous les jours sauf mardi, de 11 heures à 22 heures Jusqu’au 30 janvier.