La ministre de la culture démissionaire, Cho Yoon-Sun, le 20 janvier à Séoul. | JUNG YEON-JE / AFP

La ministre sud-coréenne de la culture a démissionné samedi 21 janvier après avoir été arrêtée pour avoir constitué une « liste noire » de quelque dix mille artistes critiques de la présidente destituée Park Geun-hye, a annoncé l’agence Yonhap. Cho Yoon-sun aurait agi ainsi pour les priver de subventions gouvernementales et d’investissements privés et les placer sous la surveillance des autorités.

Elle a remis sa démission au premier ministre Hwang Kyo-Ahn, qui l’a aussitôt acceptée, a précisé l’agence de presse sud-coréenne. Mme Cho a pris cette décision après que le tribunal de Séoul a émis un mandat d’arrêt à son encontre, pour abus de pouvoir et parjure.

Agée de 50 ans et souvent qualifiée dans les médias locaux comme « la Cendrillon de [la présidente] Park », est une fervente partisane de la chef de l’Etat destituée, pour qui elle avait également servi en tant que ministre pour l’égalité des genres.

Le même tribunal de Séoul a également émis un mandat d’arrêt à l’encontre de Kim Ki-choon, ancien chef de cabinet de Mme Park. Il est accusé d’avoir demandé à Mme Cho d’établir cette liste d’artistes « gauchisants ». « Les charges sont vérifiées, et il y a des risques que les accusés cherchent à détruire des preuves », a précisé le magistrat à l’origine de la procédure.

Ressentiment dans le pays

Dans cette « liste noire » figurent des artistes appartenant tant au milieu du cinéma que du théâtre ou de la musique, ou encore de la littérature, représentant un véritable Who’s who de la scène artistique sud-coréenne. Parmi les personnes visées, la romancière Han Kang, vainqueur en 2016 du Man Booker Prize, l’un des principaux prix littéraires pour les écrivains de langue anglaise, ou encore Park Chan-wook, le réalisateur de Old boy, qui avait remporté le Grand Prix du festival de Cannes, en 2004.

Plusieurs des artistes ciblés ont exprimé leur soutien aux partis de l’opposition ou ont critiqué l’administration de Park Geun-hye ou celle de son père, Park Chung-hee, qui a dirigé le pays de 1961 à 1979.

L’existence de cette « liste noire » a suscité beaucoup de ressentiment dans le pays, ravivant précisément les souvenirs de la dictature militaire des années 1960 à 1980, au cours desquelles le monde de la presse, des arts et des spectacles subissait une censure stricte.

Park Geun-hye a été destituée par le Parlement le mois dernier, en raison d’un vaste scandale de corruption. Sa destitution est encore en cours d’examen par la Cour constitutionnelle sud-coréenne.