Le rappeur Luaty Beirao au président dos Santos : « L’Angola, c’est pas ton poulailler ! »
Le rappeur Luaty Beirao au président dos Santos : « L’Angola, c’est pas ton poulailler ! »
Par Le Monde Afrique
Le mucisien militant angolais était l’invité du « Monde Afrique » et a chanté pour dénoncer l’emprise du clan du président sur le pays.
Le rappeur et militant angolais Luaty Beirao était l’invité du Monde Afrique lors d’un Facebook Live, mercredi 25 janvier, pour répondre aux nombreuses questions des auditeurs.
En ouverture et en fermeture de cette discussion, Luaty Beirao a chanté deux raps en portugais dont voici les traductions. L’Angola est dirigé depuis 1979 par le président José Eduardo dos Santos, qui a placé le pays en coupe réglée et sous la férule économique de ses propres enfants qui se partagent les richesses des revenus du pétrole. Selon l’Unicef, en 2015, plus de 43 % des 26 millions d’habitants vivent sous le seuil de pauvreté. L’ONG Transparency International classait en 2014 l’Angola à la 161e place sur 175 du classement sur la perception de la corruption.
« Renforcer la désobéissance »
« Kitumba a pris la nation à la gorge [surnom du président José Eduardo dos Santos, JES]
A décrété, choisi et exonéré, frère,
Jusqu’à la nausée, il a pillé le bien public,
Comme un porc vorace,
Et maintenant il veut l’offrir sur un plateau à son héritier.
Zénu et ses 5 milliards [José Filomeno de Sousa, fils du président]
Coréon avec la télévision [autre fils de JES]
Et avec la « Zungueira des œufs », contrôle la communication (surnom d’Isabel, fille de JES)
Avec comme prétexte l’avènement de la bourgeoisie,
JES veut servir de trampoline à une dynastie, putain de merde !
Ah, c’est comme ça ?!
Moi quand je suis né, t’étais déjà là,
Alors viens ici,
Guleiro !….
Zé, ramène-toi fissa,
Mélange pas tout grand-père !
L’Angola, c’est pas ton poulailler
Tu préfères avoir des perroquets
Autour de toi pour t’aduler.
Certains parlent beau,
Mais ils font pas de miracles,
Et le jour où le peuple dira :
« ça suffit, casse-toi ! »,
Ils feront la même chose avec ton successeur,
Car flatter, c’est un art.
Tu ne fais plus rien de censé,
T’as mis l’Angola en couche-culotte !
Avec cette politique incontinente,
Un coup, ça se nettoie,
Un coup, ça s’étale.
T’ignores ton peuple,
Qui implore, prostré :
« Kitumba, va-t’en !
Laisse-nous tranquille »
Putain !
Vieil orgueilleux,
Dès que ta descendance s’effondrera,
On va enlever ta tête des billets de banque,
On va enlever ta tête des pièces d’identité
Tu vas prendre tes enfants
Et sortir du pays,
Et avec un peu de chance
Tu finiras au TPI [Tribunal pénal international]
Luaty Beirao : Je rêve pour l'Angola d'une élite qui cesse d'être rapace
Durée : 03:44
« Nous et les autres »
C’est vous qui m’avez inspiré ces mots,
Le silence de vos cris est un rasoir, il mutile,
C’est un appel au bon sens, parce qu’un seul geste
Sauvera beaucoup de gens de la mort,
Parmi vous, y a de la merde,
Mais aussi des gens alertés,
Des frères avec un peu de conscience.
Notre Angola est malade, de quelle preuve avez-vous besoin ?
Toi tu fais taire tes pensées pour ne pas compromettre tes parents,
toi pour ne pas perdreton emploi, pour ne pas perdre tes amis,
Pour ne pas perdre de clients dans le groupe des bandits,
Si tu veux garder ta Bourse,
Tu peux pas ouvrir ta bouche,
Pour garder ton business, pour conserver ton rang !
Pour pas avoir de bazar à la maison,
On parle de séries télé et du Barça, en oubliant toujours le mal qui ronge,
C’est le mal qui nous divise,
Mais ça ne devrait pas être comme ça.
Dans la vie il y a des moments où c’est urgent de se définir.
Traduction libre de Marie-Line Darcy