Un record d’exportations d’alcools français en 2016
Un record d’exportations d’alcools français en 2016
LE MONDE ECONOMIE
Le succès du cognac a tiré les ventes de vins et de spiritueux hexagonaux. L’excédent commercial du secteur atteint 10,5 milliards d’euros.
Rémy Martin affiche une croissance de 11,2 %, sur les neuf derniers mois de 2016. | Flickr / Joz Jimenez
Si la balance commerciale française s’est dégradée en 2016, les ventes de vins et de spiritueux ne sont pour rien dans cette contre-performance. Bien au contraire. Même si la progression est limitée à 1,2 % par rapport à 2015, elles ont signé un nouveau record historique à 11,9 milliards d’euros. De même pour l’excédent commercial, qui atteint 10,5 milliards d’euros, en hausse de 1 %, selon les chiffres publiés jeudi 9 février par la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux de France (FEVS).
« C’est une bonne performance qui fait des vins et spiritueux le deuxième contributeur à l’excédent commercial de la France derrière l’aéronautique, en baisse de 16 %. Et devant les cosmétiques qui, eux, progressent de 2 % », affirme Christophe Navarre, président de la FEVS. Un résultat qui doit beaucoup aux excellentes performances du cognac.
« Alcools bruns en effervescence »
En effet, en Charente, l’année 2016 est aussi qualifiée d’historique. Près de 179 millions de bouteilles de la précieuse eau-de-vie ont été vendues. Essentiellement hors de France. Car le cognac n’a toujours pas réussi à renouer avec les consommateurs français. Ils n’en ont acheté que 4 millions de flacons, un chiffre en recul par rapport à 2015. Contrairement aux Américains, qui plébiscitent cet alcool et alimentent sa croissance. Le nombre de bouteilles écoulées outre-Atlantique a bondi de 14 %, de quoi conforter une place de premier marché du cognac.
« Cette catégorie des alcools bruns est en effervescence aux Etats-Unis », explique Alexandre Ricard, PDG du groupe Pernod Ricard. Pour séduire les Américains, le deuxième groupe mondial de spiritueux vient d’ailleurs de commercialiser une nouvelle déclinaison de sa marque Martell, Martell Blue Swift. Ce n’est pas à proprement parler du cognac, mais une eau-de-vie de vin vieillie dans des fûts de bourbon. Autre bonne nouvelle : une stabilisation des ventes en Asie et un retour à la normale en Chine, après le trou d’air qui secouait le marché depuis trois ans.
Un contexte favorable dont profitent les grands noms du cognac : LVMH, avec sa marque Hennessy ; Pernod Ricard avec son fleuron Martell ; et Rémy Cointreau avec son emblématique Rémy Martin. Au second semestre 2016, les ventes de Martell ont ainsi progressé de 7 %. Et Rémy Martin affiche, pour sa part, une croissance de 11,2 %, sur les neuf derniers mois de 2016.
Vins de bordeaux restent en pole position
Globalement, selon la FEVS, les exportations de cognac ont pesé 2,77 milliards d’euros en 2016, en progression de 6,5 %. De quoi griller, pour ce millésime, la politesse au champagne, autre grande figure des alcools français. Les expéditions de bulles sont en léger retrait de 2,5 %, pour un montant de 2,625 milliards d’euros. « Cette baisse est liée au marché britannique. A la suite du vote favorable au Brexit, la livre sterling a chuté, et les enseignes se sont livrées à une guerre des prix », explique M. Navarre.
Les vins d’appellation d’origine contrôlée (AOC), point fort de la France qui valorise au mieux ses terroirs, confortent leur position. Le montant des exportations atteint 3,811 milliards d’euros, en légère progression de 0,7 %, malgré un volume qui s’érode de 0,5 %. Les vins de bordeaux restent en pole position, avec un total de 1,77 milliard d’euros bien qu’en baisse de 2,9 %. Ils sont suivis par les prestigieux bourgogne, en hausse de 4,4 %, à 782 millions d’euros. A souligner, le bond de 28 % des exportations de vins de Provence, à 169 millions d’euros.
Cognac, champagne et vins français ont donc pour première destination les Etats-Unis. En 2016, les Américains, aidés, il est vrai, par une parité euro-dollar favorable, ont dépensé 2,8 milliards d’euros, soit 8 % de plus qu’en 2015. Cela représente près d’un quart des exportations totales.
Le Royaume-Uni reste en deuxième position, mais les achats régressent, livre sterling flageolante oblige.
« Marché chinois » normalisé
La Chine, qui complète le podium, confirme un retour à meilleure fortune. La vente d’alcools français y a progressé de 12,7 %, à 938 millions d’euros. « On assiste à une normalisation du marché chinois, avec une reprise de la demande, mais il n’y aura pas de retour aux niveaux atteints avant la prise par le gouvernement de Pékin des mesures anti-ostentation », estime M. Navarre.
Le président de la FEVS reste prudent pour 2017, même si les exportateurs vont, précise-t-il, « commercialiser des millésimes de qualité ». Il continue à plaider pour « un accroissement de [leur] capacité de production ». Il estime que « les vins et spiritueux français souffrent d’un déficit structurel de disponibilité pour répondre aux demandes des consommateurs ».
Un sujet très délicat qui oppose négociants et vignerons. L’attribution de nouveaux droits de plantation de vignoble en Europe, et donc en France, depuis janvier 2016 a d’ailleurs jeté le trouble en Charente-Maritime.
Le syndicat Jeunes Agriculteurs a dénoncé l’achat de droits de plantation dans des vignobles en crise hors de la zone d’appellation de cognac pour produire in fine la fameuse eau-de-vie. Le succès du cognac suscite la convoitise…
Pernod Ricard porté par la dynamique américaine
Selon les chiffres semestriels (juillet à décembre 2016) publiés jeudi 9 février, Pernod Ricard a vu son chiffre d’affaires interne progresser de 4 %, à 5,06 milliards d’euros. Le résultat opérationnel évolue au même rythme. Le deuxième groupe mondial de spiritueux profite de la dynamique américaine. Aux Etats-Unis, son premier marché, ses ventes augmentent de 5 % grâce au succès de son whiskey Jameson et de son cognac Martell, deux marques qui avec Perrier-Jouët sont les locomotives du groupe.…