Une foule nombreuse était rassemblée, à San Pedro de Macoris mercredi, pour l’enterrement de Leonidas Martinez, un des deux journalistes assassinés. | ERIKA SANTELICES / AFP

Suicide ou exécution extrajudiciaire ? L’assassin présumé de deux journalistes dominicains, tués par balles, mardi 14 février, lors d’une émission retransmise sur Internet, a été retrouvé mort le lendemain du double crime. Selon les autorités, José Rodriguez, 59 ans, le suspect, se serait suicidé d’une balle dans la tête alors qu’il était encerclé par une patrouille de la police dans la banlieue de San Pedro de Macoris, à 70 kilomètres à l’est de Saint-Domingue. Des personnes résidant dans la zone affirment que la fusillade a duré plus de dix minutes.

Le président du Collège dominicain des journalistes (CDP), Olivo de Leon, a toutefois mis en doute la version officielle. Selon lui, les policiers auraient délibérément tué José Rodriguez, qu’ils recherchaient depuis qu’il avait été identifié par Dayana Garcia, la secrétaire de la station de radio, blessée à l’abdomen lors de l’attaque, mardi. « Plusieurs hypothèses ont été avancées à propos de ce crime, qui n’aurait pu être éclairci qu’avec l’arrestation de l’assassin », a déploré Olivo de Leon.

Talk-show à succès

Aux cris de « justice », plusieurs centaines de personnes ont assisté, mercredi à San Pedro de Macoris, aux funérailles de Leonidas Martinez et de Luis Manuel Medina, les deux journalistes assassinés. Tous deux étaient connus et appréciés dans cette ville, où leur talk-show Milenio Caliente jouissait d’une audience importante.

« Mon frère n’avait pas d’ennemi personnel, mais il n’hésitait pas à dire la vérité pour le bien de la communauté, à dénoncer la corruption et la délinquance. Il n’a jamais accepté de pots-de-vin pour se taire », a déclaré Magalys Santana, la sœur de Luis Manuel Medina, lors de l’enterrement.

Le programme Milenio Caliente dénonçait fréquemment des scandales de corruption et de narcotrafic et avait récemment critiqué, avec véhémence, une entreprise textile accusée de polluer la lagune de Mallen, une importante réserve naturelle proche de San Pedro de Macoris.

En direct sur Facebook

On sait peu de choses sur l’assassin présumé. Selon la presse dominicaine, il aurait été lié au narcotrafic et avait été renvoyé récemment des Etats-Unis.

Le double crime a été enregistré en direct sur Facebook. M. Medina était en train de lire les dernières nouvelles au micro lorsque l’assassin est entré dans la station de radio 103.5 FM, installée dans un centre commercial de San Pedro de Macoris.

Le meurtrier a d’abord tué le directeur de la station, Leonidas Martinez, dans son bureau, avant de se diriger vers la cabine d’enregistrement et de tirer sur Luis Manuel Medina, puis sur la secrétaire, Dayana Garcia. Cinq douilles neuf millimètres ont été retrouvées dans les locaux de la station.

L’archevêque de Saint-Domingue, Mgr Francisco Ozoria, a appelé les autorités « à faire quelque chose » pour freiner la vague de criminalité qui ensanglante le pays, plongé, selon lui, « dans une grande insécurité ». Le chef de l’opposition, Luis Abinader, présent aux obsèques des deux journalistes, a lancé un appel dans le même sens et a dénoncé une « atteinte à la liberté d’expression ».

Plusieurs directeurs de médias ont demandé aux autorités de renforcer la protection de leurs installations et d’en interdire l’accès aux personnes armées.