Une boucherie de Sao Paulo, au Brésil, le 20 mars. | MIGUEL SCHINCARIOL / AFP

Suspension des importations de la Chine, de l’Union européenne et du Chili : le Brésil, premier exportateur mondial de viande bovine et de volaille, subissait lundi 20 mars les conséquences de la découverte d’un vaste scandale de viande avariée.

Trois jours après le démantèlement d’un réseau de commercialisation de denrées impropres à la consommation, le pays, en pleine récession et déjà secoué par une crise politique majeure, tentait de limiter les conséquences de cette nouvelle affaire. « Le secteur de la viande emploie plus de 7 millions de personnes et représente 15 % des exportations brésiliennes », a tenu à rappeler l’Association brésilienne des exportateurs de viande (Abiec), mettant en garde contre l’impact économique des restrictions des importations de viande.

Mais lundi, les cours des multinationales brésiliennes de l’agroalimentaire JBS et BRF, impliquées dans ce dossier, poursuivaient leur chute à la Bourse de Sao Paulo. Vendredi, BRF avait déjà perdu 10,59 % tandis que JBS avait baissé de 7,25 %.

Entrepôts fermés, enquêtes et limogeages

Pour l’heure, trois entrepôts frigorifiques ont été fermés, dont un appartenant à BRF, selon le ministère de l’Agriculture. Et plus d’une vingtaine d’établissements sont sous le coup d’une enquête et 33 fonctionnaires impliqués ont été destitués.

Le coup commercial le plus rude est venu de la Chine, deuxième acheteur de viande brésilienne au monde, qui a bloqué lundi jusqu’à nouvel ordre les importations de ces produits. « Jusqu’à ce qu’elle reçoive des informations, la Chine ne déchargera pas les viandes importées en provenance du Brésil. Cette nuit, le ministre (de l’Agriculture, Blairo Maggi) tiendra une vidéoconférence avec les autorités chinoises pour mettre les choses au clair », a annoncé le ministère de l’Agriculture.

En 2016, les ventes brésiliennes de viande de poulet vers la Chine ont dépassé les 859 millions de dollars, tandis que celles de viande bovine ont atteint 702,7 millions, selon le ministère brésilien du Commerce (MDIC).

Vigilance de l’UE

Le Chili a également suspendu lundi ses importations, tandis que l’Union européenne a demandé aux autorités brésiliennes des garanties pour ne pas recevoir de viande avariée. « Nous avons demandé au Brésil de retirer immédiatement tous les établissements impliqués dans la fraude de la liste » des sociétés approuvées par l’UE pour l’exportation, a déclaré Enrico Brivio, un porte-parole de la Commission européenne.

Le Brésil est ainsi exhorté à suspendre la certification de ces entreprises, en attendant qu’elles soient définitivement retirées de la liste, a-t-il expliqué.

Sur 21 entrepôts frigorifiques soupçonnés d’avoir commis des irrégularités, quatre ont une licence d’exportation vers l’UE. « La Commission suit (le dossier) de très près avec les Etats membres et nous faisons preuve d’une vigilance supplémentaire dans les vérifications obligatoires sur les importations de produits issus d’animaux en provenance du Brésil », a ajouté Enrico Brivio. Jusqu’à présent aucune alerte n’a été déclenchée sur des produits importés et commercialisés dans l’UE.

Propagande brésilienne

Le principal syndicat européen d’agriculteurs Copa-Cogeca a saisi l’occasion pour appeler de nouveau à la prudence dans les négociations en cours entre l’UE et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) autour d’un accord de libre-échange. « Nous avons besoin d’accords commerciaux équitables et équilibrés dans le domaine agricole. Nous respectons des normes en matière de sûreté des aliments et de bien-être des animaux parmi les plus élevées au monde et il est indispensable que les importations vers l’UE les respectent », a commenté Pekka Pesonen, le secrétaire général du syndicat.

Les négociateurs de l’UE et du Mercosur se retrouvaient justement lundi à Buenos Aires pour un nouveau round de négociations. « Dénigrer la qualité de la viande du principal exportateur mondial n’intéresse que les producteurs des marchés concurrents », s’est défendu l’Association brésilienne des exportateurs de viande, dans une publicité publiée dans les principaux journaux brésiliens.

En 2016, les exportations brésiliennes de viande de poulet ont dépassé les 5,9 milliards de dollars tandis que celles de viande bovine ont atteint 4,3 milliards de dollars, selon le ministère brésilien du Commerce. Le Brésil écoule sa viande dans 150 pays.