Le troisième film de votre réalisateur préféré est probablement le meilleur
Le troisième film de votre réalisateur préféré est probablement le meilleur
Par Pierre Breteau
Quel est, statistiquement, le meilleur film d’une carrière ? Nous avons étudié les 2 000 films de 110 réalisateurs et réalisatrices, ainsi que 99 millions de votes en ligne.
« Que Viva Mexico ! », dixième long-métrage de Sergueï Eisenstein (1931), est le film le mieux noté de notre échantillon avec 9,3/10. | Sovkino/Sergueï Eisenstein
« Film de la maturité », « génie d’un premier film qui s’est affranchi des codes », « chance du débutant », « fraîcheur de la nouveauté »… les poncifs sont nombreux pour qualifier la qualité d’un long-métrage. Que disent les statistiques du public quant à l’œuvre globale d’un réalisateur ?
Pour le savoir, nous avons analysé près de deux mille films de cent dix réalisateurs et réalisatrices (la méthodologie se trouve à la fin de notre article).
Selon nos calculs, c’est le troisième film qui s’en sort le mieux, avec une note médiane de 7,4/10. Cette médiane signifie qu’il y a autant de longs-métrages qui ont obtenu moins de 7,4 – comme le Dune de David Lynch sorti en 1984 et son 6,6 – que de longs-métrages qui ont obtenu une note supérieure, tel le Pulp Fiction de Quentin Tarantino (et son 8,9/10). On peut donc estimer que de manière générale, le troisième film d’un réalisateur est en moyenne le plus apprécié.
Une qualité qui baisse (très faiblement) avec l’âge
Si c’est le troisième film qui ressort, de La La Land de Damien Chazelle (2016) à Z de Costa-Gavras (1969) en passant par La Famille Tenenbaum de Wes Anderson (2001) ou Platoon d’Oliver Stone (1986), les notes attribuées – souvent par plusieurs millions d’internautes – montrent une autre chose : en général, plus on avance dans la filmographie d’un réalisateur, plus la qualité de ses œuvres (ou en tout cas les notes moyennes des critiques) baisse, mais elle baisse très faiblement avec le nombre d’œuvres réalisées.
Si, avec le temps, la note médiane passe de plus de 7 à environ 6,5 autour du trentième long-métrage, ce n’est pas simplement que les réalisateurs sont moins bons, même si cela peut jouer. D’une part, l’échantillon dont nous disposons se réduit au fur et à mesure : certains jeunes réalisateurs, comme Damien Chazelle, n’ont réalisé que trois films. Ainsi, sur nos cent dix artistes, ils sont 78 à avoir réalisé dix films, et seulement 35 à avoir atteint les vingt longs-métrages.
Certains stakhanovistes, comme Francis Ford Coppola, émargent à 28 films, ou 32 pour Akira Kurosawa, voire même 52 pour Jean-Luc Godard et… 118 pour John Ford. D’autre part, du fait du choix de la liste des réalisateurs – les plus récompensés et reconnus –, les résultats de nos calculs sont forcément tirés vers le haut, puisque aucun réalisateur cher à Nanarland, un site spécialisé dans les « nanars » et autres « navets », ne s’y trouve.
110 réalisateurs, 2 000 films et 99 millions de votes : comment nous avons travaillé
Pour établir ce classement, il a fallait une liste de réalisateurs et de réalisatrices : nous avons choisi la liste des 50 plus grands films selon le BFI britannique – soit 38 réalisateurs, auxquels nous avons ajouté les réalisateurs récompensés aux Oscars (32 de plus) ou par une palme d’or (encore 27 de plus).
Enfin, nous avons également sélectionné 13 réalisateurs dont 10 réalisatrices (parmi lesquelles Nicole Garcia, Andrea Arnold, Sofia Coppola, Alice Rohrwacher, Naomi Kawase, Liliana Cavani, Pascale Ferran mais aussi Jim Jarmusch, Wes Anderson ou Paul Verhoeven). A partir de cette liste de 2 000 films, classés par ordre et par réalisateur, nous avons aspiré les notes de la Internet movie database (IMDB), avant d’en calculer la note médiane. Certains films ont été notés plusieurs millions de fois. Notre échantillon réunit ainsi 99,79 millions de votes pour établir les notes de tout le corpus de films.
C’est ainsi que le premier film des réalisateurs retenus obtient une note médiane de 7/10, le deuxième une note de 7,2/10, et le troisième une note de 7,4/10.