Un album de rap comme projet de fin d’études à Harvard
Un album de rap comme projet de fin d’études à Harvard
Par Big Browser
C’est la première fois qu’un étudiant soumet un album de rap au jury du département d’anglais de la célèbre université américaine. Il a obtenu la meilleure note de sa promotion.
C’est une première dans la prestigieuse université américaine de Harvard : un étudiant vient de rendre un projet de fin d’études sous la forme d’un album de rap. Obasi Shaw, étudiant en informatique et en littérature anglaise, a écrit et enregistré son album pendant un an. Ses textes sont centrés sur les problèmes raciaux aux Etats-Unis et son projet explore les potentialités du rap comme forme poétique.
Interrogé par le journal du campus Harvard Gazette, le jeune homme explique avoir grandi en écoutant du « rap chrétien », des chansons sur la foi et le pardon. C’était avant qu’il ne découvre Kendrick Lamar et Chance the Rapper.
Les étudiants en écriture créative, un programme qui dépend du département d’anglais où est inscrit Obasi Shaw, peuvent rendre des projets sous diverses formes : scénarios, autobiographies, romans, recueils de poèmes ou de nouvelles. Mais c’est la première fois qu’ils doivent examiner du rap, affirme Lauren Bimmler, la directrice du premier cycle d’anglais. Liminal Minds, le nom de l’album, a reçu la meilleure note.
Le rap et « Les Contes de Cantorbéry »
Pour Obasi Shaw, cela signifie la reconnaissance par les instances universitaires du rap comme une forme artistique, dont la validité égale celle de la poésie :
« Certains ne considèrent pas le rap comme une forme élevée d’art. Mais le rap et la poésie sont très proches. Les poèmes rimés étaient très courants dans l’ancienne poésie anglaise. »
Féru de littérature anglaise, il reconnaît que la poésie a influencé son album. Son directeur de recherches, Josh Bell, y voit l’influence des auteurs étudiés en classe. « Ses textes sont intéressants, parce qu’il utilise comme matrice intellectuelle Les Contes de Cantorbéry, de Geoffrey Chaucer », explique celui qui organise des ateliers d’écriture poétique.
Cette série d’histoires, publiées au XIVe siècle en Angleterre, est rédigée en grande partie en vers et prend les points de vue des personnages de chaque conte (le conte du meunier, celui du régisseur, du cuisinier, du juriste, etc.). Obasi Show « raconte des histoires dans chaque chanson d’un point de vue différent, en critiquant la société américaine et le racisme politique », résume son professeur.
L’album évoque, en dix chansons, l’histoire des Afro-Américains, de l’esclavage aux droits civiques, du mouvement Black Lives Matter à Barack Obama. Il a découvert à travers le rap « la manière d’exprimer son identité noire » et voit dans chacune de ses chansons « une exploration de l’état liminal des Noirs américains, leur état entre l’esclavage et la liberté ».
La première piste commence par les premiers mots de la Déclaration d’indépendance américaine – « Nous tenons pour évidentes pour elles-mêmes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux » – et se termine sur les violences policières contre les Afro-Américains.
D’après le Harvard Gazette, le rappeur universitaire ne compte pas tenter le parcours professionnel. Après la remise des diplômes, il commencera un stage d’un an à Seattle, dans l’Etat de Washington, comme ingénieur informaticien.