La ministre de la santé envisage de rendre onze vaccins obligatoires
La ministre de la santé envisage de rendre onze vaccins obligatoires
Dans un entretien au « Parisien », Agnès Buzyn souligne la recrudescence de maladies infantiles. Aujourd’hui, seuls trois vaccins sont obligatoires.
Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, participe au conseil des ministres au Palais de l'Elysée à Paris, le 18 mai. | JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE
La ministre des solidarités et de la santé Agnès Buzyn affirme dans un entretien au Parisien, vendredi 16 juin, qu’elle envisage d’élargir l’obligation vaccinale pour les enfants.
Seuls trois vaccins sont pour l’heure obligatoires : contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. Cette médecin de profession souhaite porter ce nombre à onze, alors que certaines maladies infantiles connaissent une recrudescence. « Je déteste la coercition (…) mais là, il y a urgence », estime-t-elle.
« Aujourd’hui, en France, la rougeole réapparaît. Il n’est pas tolérable que des enfants en meurent. Dix sont décédés depuis 2008 », fait ainsi valoir Mme Buzyn.
Aux yeux de la ministre, la mise en place d’une obligation « pour une durée limitée » – « qui pourrait être de cinq à dix ans » – permettrait de prévenir certaines épidémies. « Il y a des moments où l’obligation est une bonne chose pour permettre à la société d’évoluer », poursuit-elle, sans toutefois prendre d’engagement clair. Et de souligner que l’Italie a pris cette décision « la semaine dernière ».
Un sujet polémique
« Dès que l’on parle d’obligation vaccinale cela déclenche des polémiques », prévient dans les colonnes du quotidien le professeur Alain Fischer, président de la concertation citoyenne sur les vaccinations. « Malheureusement, il n’y a pas d’autres solutions. »
« Ce serait une hérésie », estime de son côté Jacques Bessin, président de l’Union nationale des associations citoyennes de santé. Selon lui, « les vaccins ont des effets secondaires neurologiques, musculaires mal mesurés et parfois irréversibles ».
Face à cette hostilité, la ministre répond qu’il « faut faire œuvre de pédagogie ». « Ce n’est pas seulement l’intérêt qu’on y trouve soi-même, c’est un enjeu de solidarité, une façon de protéger l’ensemble de la société. »
Quant aux critiques estimant que cette décision ferait la part belle aux entreprises pharmaceutiques, Mme Buzyn les balaie : « Oui, les industriels gagnent de l’argent, mais on ne peut pas réduire la question de la vaccination à l’intérêt des laboratoires. »
Ce dossier avait été engagé par la précédente ministre de la santé, Marisol Touraine, qui lors de la passation des pouvoirs en mai 2017 avait rappelé avoir « préparé un texte de loi ». « Je suis convaincue que c’est cela qui doit être engagé, maintenant la responsabilité est la vôtre », avait-elle lancé à sa successeure.
Les onze vaccins qui pourraient être rendus obligatoires :
- Polio
- Tétanos
- Diphtérie
- Coqueluche
- Rougeole
- Oreillons
- Rubéole
- Hépatite B
- Bactérie Haemophilus influenzae
- Pneumocoque
- Méningocoque C
Déserts médicaux et prévention
Dans l’entretien au Parisien, Mme Buzyn détaille également ses priorités au ministère : « la lutte contre les déserts médicaux » et la « prévention ». Elle affirme ainsi ne pas être « contre » le paquet de cigarettes à 10 euros, une des promesses du candidat Emmanuel Macron. « Il faut une prise de conscience surtout chez les jeunes et les femmes », argue-t-elle.
Elle explique par ailleurs « qu’une enveloppe sera dédiée à la lutte contre la désertification médicale », dans le but de permettre aux territoires de mettre en place des actions selon leurs besoins spécifiques.
Mme Buzyn esquisse ainsi la piste de création de « maisons de santé pluridisciplinaires » dans les « zones sensibles » ou encore de détachement hebdomadaire de médecins hospitaliers dans les zones rurales. La télémédecine, pour certaines spécialités, doit en outre être « déployée », selon elle. « Des expérimentations auront lieu dans les prochains mois », promet la ministre qui exclut en revanche toute restriction de la liberté d’installation des praticiens.