Les forces de l’ordre marocaines ont dispersé jeudi 20 juillet des rassemblements à Al-Hoceïma, épicentre d’un mouvement de contestation dans le nord du Maroc, empêchant la tenue d’une manifestation prévue de longue date.

Les partisans du « Hirak », nom donné localement au mouvement qui agite le Rif – région historiquement frondeuse –, avaient commencé à se regrouper en fin d’après-midi dans plusieurs points de la ville, mais les forces de l’ordre sont immédiatement intervenues pour charger les manifestants et disperser tout début de marche.

En début d’après-midi, la police avait commencé à quadriller les principales places de la ville, y interdisant tout accès, alors que la quasi-totalité des commerces étaient fermés. Les forces de l’ordre ont utilisé des bombes lacrymogènes, donnant lieu à des face-à-face tendus avec des jets de pierre entre les deux parties.

Protester « contre la répression »

Interdit par les autorités, l’appel à une grande marche pour réclamer la libération de nombreux partisans arrêtés avait été maintenu. Prévue de longue date, cette manifestation visait à l’origine à dénoncer la marginalisation de la région. Cette « marche pacifique » visait également à protester « contre la répression » et à « maintenir le combat populaire contre le makhzen [pouvoir] », selon ses organisateurs.

« Vive le Rif, vive Zefzafi ! », criaient des centaines de manifestants, en référence au leader du mouvement, Nasser Zefzafi, arrêté fin mai. Ils sont parvenus à défiler brièvement dans le quartier de Sidi Abed, avant d’être dispersés.

« Nous sommes dans un pays où il n’y a pas de liberté d’expression. On réclame des hôpitaux, du travail, du transport. Où est le mal ? », s’est indigné un sympathisant du mouvement, la trentaine, un drapeau amazigh sur les épaules.

Le président pour Al-Hoceïma de l’Association marocaine des droits de l’Homme (AMDH), Mustapha Allach, a de son côté déploré d’« importantes entraves aux libertés », faisant état de « nombreuses arrestations de manifestations. » Des journalistes sur place ont dit à l’AFP avoir été témoins d’une dizaine d’arrestations, dont celle de Hamid El Mahdaoui, patron d’un site d’information local.

De nombreuses manifestations

De leur côté, les six partis de la majorité avaient appelé dans un communiqué conjoint à ne pas prendre part à la manifestation, afin de « restituer un climat de confiance et d’apaisement ».

Depuis la mort fin octobre 2016 d’un vendeur de poisson, broyé accidentellement dans une benne à ordures, la province d’Al-Hoceïma a été le théâtre de nombreuses manifestations pour exiger le développement de cette région que ses habitants jugent marginalisée.

La relance par l’Etat d’un vaste plan d’investissements et de chantiers d’infrastructures n’a pas suffi à désamorcer la colère.

Le mois de mai a été marqué par un durcissement des autorités, avec l’arrestation des figures du mouvement. Selon un dernier bilan officiel, 176 personnes ont été placées en détention préventive. Cent vingt sont actuellement jugées, et des peines de prison ont déjà été prononcées en première instance.

Sous la pression, les manifestations ont cessé début juillet 2017 et la tension était retombée d’un cran avec le retrait des policiers de lieux publics emblématiques de la ville.