Volkswagen a bénéficié de prêts européens pour développer le moteur qui est au cœur du « Dieselgate »
Volkswagen a bénéficié de prêts européens pour développer le moteur qui est au cœur du « Dieselgate »
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen)
La Banque européenne d’investissement a prêté, en 2009, 400 millions d’euros au groupe allemand, qui assurait vouloir « poursuivre la réduction des émissions et de la consommation » de ses moteurs.
L’Office de lutte antifraude de l’Union européenne (OLAF) ajoute une pierre au scandale du « Dieselgate » : une enquête lancée en novembre 2015, et dont les conclusions ont été publiées il y a quelques jours, révèle que le groupe Volkswagen (VW) a bénéficié d’un prêt de 400 millions d’euros de la Banque européenne d’investissement (BEI) pour développer le moteur EA 189 qui est au cœur de cette affaire.
La BEI, qui finance des projets industriels et de grands équipements, a accordé le prêt en 2009. Il était destiné à aider VW à développer un moteur diesel conforme aux règles antipollution de plus en plus contraignantes imposées à l’époque, tant en Europe qu’aux Etats-Unis.
Avant d’octroyer les 400 millions, la banque avait obtenu des garanties : un courriel du constructeur l’assurait que le projet EA 189 cadrait avec les aspirations de VW de devenir « le plus innovant des constructeurs de voitures de série », soucieux surtout de « poursuivre la réduction des émissions et de la consommation » de ses 12 marques.
En février 2011 encore, rapporte le site Politico, la firme allemande rassurait ses prêteurs, en leur faisant savoir que le moteur était conforme à leurs engagements en matière de politique climatique. Elle évoquait des réductions de 90 % des émissions de particules, de 30 % des oxydes d’azote (NOx) et de 20 % de CO2 (gaz carbonique).
Onze millions de voitures équipées de logiciels truqueurs
En réalité, comme l’ont révélé par la suite diverses investigations, les ingénieurs avaient mis au point des systèmes minimisant les niveaux réels de gaz nocifs et permettant de déjouer les tests antipollution.
A la fin de 2011, le constructeur a reconnu qu’il avait équipé 11 millions de voitures de logiciels truqueurs. Aux Etats-Unis, où 600 000 véhicules sont concernés, il a déjà acquitté 22 milliards de dollars d’amendes et de dédommagement et sept de ses dirigeants sont mis en examen.
En Europe, où d’autres enquêtes sont en cours pour déterminer si des concurrents de VW n’ont pas utilisé le même stratagème, le constructeur allemand poursuit sa « correction » des dizaines de milliers de moteurs.
En Allemagne, le parquet de Brunswick (Basse-Saxe), mène des investigations criminelles. L’OLAF lui a transmis ses conclusions. Ainsi qu’à la BEI, qui entend, affirme-t-elle, examiner quelles « actions précises » elle pourrait entreprendre.
Volkswagen a remboursé son prêt en 2014 et le rapport de l’Office antifraude européen ne permet d’affirmer que celui-ci a servi directement à mettre au point le système de trucage des émissions.
Ces nouvelles révélations sont mises au jour, en tout cas, alors que les autorités allemandes ont prévu de tenir, mardi 2 août, à Berlin un « sommet de crise » avec les constructeurs. Avant cette rencontre, les dirigeants de VW ont porté à 4 millions le nombre de véhicules à « améliorer » pour réduire leurs émissions.
Comme d’autres marques, le groupe Volkswagen redoute la multiplication des menaces d’interdiction pour les véhicules au gazole alors que plusieurs villes allemandes ont déjà adopté de telles dispositions. Les autorités fédérales entendent définir des mesures précises, valables dans tout le pays, pour lutter contre la pollution.