Et Hollywood découvrit le féminisme
Et Hollywood découvrit le féminisme
M le magazine du Monde
En incluant une héroine dans son film « La Dame du vendredi », Howard Hawks en rend l’intrigue plus originale. Il est perçu comme un chantre de la condition féminine. La version restaurée est en salle.
Cary Grant, Rosalind Russell et Ralph Bellamy dans « La Dame du vendredi » d’Howard Hawks, en 1940. / Park CircusStars
Réalisé par Howard Hawks en 1940, La Dame du vendredi est l’un des films emblématiques de la screwball comedy. Soit un sous-genre de la comédie hollywoodienne, en vogue avant la seconde guerre mondiale, dont les dialogues sont très agités et où l’intrigue a toujours trait à des questions d’amour. Le sel de la Dame du vendredi tient à l’alchimie tourbillonnante du couple formé par Cary Grant et Rosalind Russell : deux journalistes travaillant pour la même publication, récemment séparés, et dont le film va suivre la réunion, entre sentiments amoureux contrastés et scoops. Les tenues de Rosalind Russell, chapeau très haut et tailleurs aux imprimés excentriques, y sont pour beaucoup dans l’impression que le film laisse au spectateur. Un personnage très fort, que de nombreuses auteures féministes ont par la suite érigé en modèle.
Une comédie romantique hilarante
Sauf que le film de Hawks ne devait pas du tout ressembler à cela. A l’origine, le cinéaste voulait adapter la pièce The Front Page, signée Ben Hecht et Charles MacArthur, jouée à Broadway en 1928. L’intrigue se passe dans le milieu journalistique, mais elle ne comporte pas de premier rôle féminin. Alors qu’il est en pleine préparation du scénario, Hawks veut répéter les dialogues et demande à sa secrétaire de lui donner la réplique. Il prend conscience que l’intrigue serait plus originale en incluant une héroïne, et transforme ce qui était l’histoire d’une amitié rivale entre deux hommes en une comédie romantique hilarante.
La Dame du vendredi ( bande annonce VO )
Si le personnage de Rosalind Russell est resté dans l’histoire du cinéma, c’est surtout grâce à son débit de voix rapide et à ses punchlines désopilantes, lancées à l’adresse de Cary Grant. Pourtant, sur le plateau, elle s’estimait flouée par rapport à son partenaire, jugeant qu’elle avait moins de dialogues percutants. Comme elle le décrivit dans son autobiographie, Life Is a Banquet, l’actrice embaucha, en secret et sur ses propres fonds, un scénariste afin qu’il rende son texte plus drôle. Seul Grant était au courant de ces fausses improvisations qui ont fait du personnage l’un des plus marquants de la comédie hollywoodienne du milieu du XXe siècle.
« La Dame du vendredi » (1 h 22), de Howard Hawks. Version restaurée, en salle le 23 août.