Mahmoud Abbas reste sceptique sur les efforts de paix américains
Mahmoud Abbas reste sceptique sur les efforts de paix américains
Par Claire Bastier
Une délégation emmenée par Jared Kushner, conseiller et gendre de Donald Trump, a rencontré le président palestinien à Ramallah.
Jared Kushner et Mahmoud Abbas à Ramallah, le 24 août. / HANDOUT / REUTERS
La rencontre entre Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, et Jared Kushner, conseiller et gendre de Donald Trump, jeudi 24 août, à Ramallah, en Cisjordanie, a clôturé la tournée de la délégation américaine pour la paix au Proche-Orient qui avait débuté le 20 août. Pour la première fois depuis plusieurs semaines, Mahmoud Abbas a mis de côté son scepticisme sur la capacité de l’administration Trump à résoudre le conflit israélo-palestinien, comme s’y est engagé le président américain. Il a même salué les efforts diplomatiques de Donald Trump en la matière. « Les choses sont difficiles et compliquées, mais rien n’est impossible quand les intentions sont bonnes », a-t-il assuré.
Cet optimisme affiché contredit les critiques récemment émises par l’Autorité palestinienne contre la Maison Blanche, laquelle serait jugée plus favorable à Israël et surtout n’aurait pas de stratégie claire pour une reprise concrète du processus de paix. Le 30 août, M. Abbas expliquait ainsi à une délégation israélienne de l’opposition (parti Meretz, gauche), à Ramallah, que les émissaires américains rencontrés « à vingt reprises » depuis le début du mandat de M. Trump avaient « à chaque fois » soutenu « une solution à deux Etats et le gel des constructions dans les colonies israéliennes [en Cisjordanie] ». Mais ils n’en avaient jamais avisé le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, déplorait M. Abbas.
Clairement et publiquement
Donald Trump a envoyé M. Kushner ainsi que Jason Greenblatt, son représentant spécial pour les négociations internationales, et Dina Powell, conseillère adjointe à la sécurité nationale, pour envisager « la tenue de pourparlers de paix substantiels entre Israéliens et Palestiniens ». Avant leur étape à Ramallah, ils sont ainsi passés par l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, le Qatar, la Jordanie et l’Egypte. Jeudi dans l’après-midi, avant la rencontre avec M. Abbas, un entretien a eu lieu en Israël avec M. Nétanyahou, qui a principalement porté sur des enjeux régionaux. Le conflit israélo-palestinien n’a pas été évoqué explicitement dans un communiqué commun publié au terme de la rencontre.
Avant la visite de la délégation à Ramallah, les dirigeants palestiniens avaient pourtant insisté pour que la Maison Blanche se prononce clairement et publiquement sur ces deux points essentiels que sont la solution à deux Etats et le gel de la colonisation. Jeudi, à l’issue de la rencontre, M. Abbas a reconnu que « la délégation américaine œuvr[ait] pour la paix » et s’est même engagé à coopérer avec elle pour parvenir à un accord.
« Désinvolture »
M. Kushner a, lui, affirmé que le président américain était « très optimiste » quant à cet accord qui assurera un « avenir meilleur » aux deux peuples. Mais aucun des deux points essentiels n’a été mentionné au cours de l’entretien, a relevé l’agence de presse palestinienne Wafa. « L’administration américaine n’a simplement pas de vision ni de plan d’action, observe Ghassan Khatib, professeur en études internationales et ex-ministre du travail. Mahmoud Abbas et les Palestiniens devraient s’inquiéter d’une telle désinvolture. »
Outre le processus de paix, en coma profond, et la poursuite de la colonisation israélienne à un rythme effréné, l’Autorité palestinienne se heurte en interne à la défiance du public palestinien et à l’échec de son projet de réconciliation avec le Hamas, qui contrôle la bande de Gaza depuis 2007. « Mahmoud Abbas commence à envisager de nouvelles stratégies pour faire reconnaître l’Etat palestinien, explique Ghassan Khatib. Il s’assure d’abord des soutiens locaux : en Arabie saoudite, en Jordanie ou encore en Turquie », où il se rend dimanche 27 août. Quitte à porter de nouveau la cause palestinienne devant les instances internationales, pratique qui avait été suspendue pour laisser sa chance à M. Trump.