Birmanie : 250 000 personnes privées d’aide alimentaire dans le nord-ouest du pays
Birmanie : 250 000 personnes privées d’aide alimentaire dans le nord-ouest du pays
Le Monde.fr avec AFP et Reuters
Les distributions du Programme alimentaire mondial (PAM) ont été suspendues en raison des combats entre l’armée et la rébellion rohingya.
Des réfugiés rohingya tentent de passer la frontière du Bangladesh le 1er septembre 2017. / MOHAMMAD PONIR HOSSAIN / REUTERS
Au moins 250 000 personnes sont privées d’aide alimentaire dans le nord-ouest de la Birmanie où les distributions du Programme alimentaire mondial (PAM) ont été suspendues en raison des combats en cours, depuis une semaine, entre l’armée et la rébellion rohingya.
La situation est très tendue sur le terrain pour les équipes des organisations humanitaires depuis que le gouvernement birman, dirigé par l’ex-dissidente et Prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, les a mises en cause, affirmant que des rations avaient été retrouvées dans des camps de rebelles.
Appel « à la retenue et au calme » de l’ONU
« Toutes les opérations d’aide alimentaire en Etat Rakhine ont été suspendues depuis le début des attaques ce qui affecte 250 000 déplacés et autres populations vulnérables », a expliqué samedi à l’AFP Pierre Peron, porte-parole du bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires.
Dans cette région, quelque 120 000 Rohingya vivent dans des camps depuis des violences interconfessionnelles en 2012. Ils n’ont pas accès au marché du travail et leurs déplacements sont limités, ce qui les rend dépendants de l’aide alimentaire. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé vendredi « à la retenue et au calme pour éviter une catastrophe humanitaire ».
Au cours de la semaine écoulée, les combats ont fait plus de 400 morts et quelque 40 000 personnes ont réussi à fuir au Bangladesh, d’après les derniers chiffres de l’ONU. Et des dizaines de milliers d’autres sont bloquées à la frontière.
En Birmanie, la persécution des musulmans Rohingya continue
Durée : 01:48
Malgré des décennies de restrictions et de persécutions en Birmanie, où cette minorité musulmane (1 million de personnes) est marginalisée et considérée comme étrangère, les Rohingya n’avaient jusqu’à présent presque jamais recouru à la lutte armée.
Autorités birmanes et Rohingya s’accusent mutuellement
Selon le gouvernement birman, plus de 2 600 maisons ont été incendiées au cours de la semaine écoulée dans les secteurs du nord-ouest de la Birmanie, majoritairement peuplés de musulmans rohingya. Les autorités birmanes imputent ces incendies à l’Armée du salut rohingya de l’Arakan (ARSA). Ce groupe rebelle a revendiqué les attaques coordonnées contre des postes militaires qui ont fait au moins 89 morts et déclenché il y a plus d’une semaine ce nouveau cycle de violences et une vaste contre-offensive de l’armée birmane.
Les Rohingya réfugiés au Bangladesh rapportent pour leur part que l’armée birmane mène une campagne de meurtres et d’incendies destinée à les faire fuir. S’appuyant sur l’observation d’images par satellite et des témoignages de réfugiés, l’organisation non gouvernementale Human Rights Watch accuse, elle aussi, les forces birmanes de mettre volontairement le feu à des habitations.
« De nouvelles images par satellite montrent la destruction totale d’un village musulman et soulèvent de profondes inquiétudes sur le fait que l’ampleur des dévastations (…) pourrait être bien pire que ce que l’on pensait initialement », a dit Phil Robertson, directeur adjoint pour l’Asie de HRW.
Ces violences ont fait près de 400 morts et plus de 11 700 « résidents ethniques » ont été évacués de la région, selon le gouvernement, qui désigne ainsi les non-musulmans de l’Etat Rakhine. Environ 58 600 Rohingya ont fui au Bangladesh voisin face à cette éruption de violences, estime le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
Plus de 400 000 réfugiés Rohingya vivent déjà au Bangladesh dans des conditions très précaires après avoir fui lors de vagues de violences précédentes. Le pays dit ne plus vouloir en accueillir davantage. Le sort réservé au 1,1 million de Rohingya dans une Birmanie à prédominance bouddhiste est devenu l’un des plus gros défis lancés à Aung San Suu Kyi, qui exerce de facto les fonctions de chef du gouvernement birman depuis près d’un an et demi.