Capture d’écran du site de WayzUp. / WayzUp

L’heure du covoiturage de courte distance est-elle venue ? Cette pratique, consistant à partager le trajet domicile-travail en automobile, est réputée pouvoir mettre fin aux bouchons qui congestionnent les villes. En Ile-de-France, augmenter le nombre moyen de passager par voiture de 1,1 (son niveau actuel) à 1,7 ferait disparaître les embouteillages, affirment les experts.

Là où le bât blesse, c’est que ce mode de déplacement reste marginal, avec une part modale modeste – même si elle est difficile à évaluer – et, surtout, pas vraiment intégrée aux plans transports des grandes métropoles. Seules quelques start-up sont pour le moment arrivées à « professionnaliser » ce qui, jusqu’ici, relevait du bricolage sympathique entre voisins et amis.

L’un des leaders de ce secteur balbutiant, WayzUp, vient de prendre une initiative visant à convaincre les autorités organisatrices des transports de huit grandes villes françaises de participer au financement du covoiturage domicile-travail, comme elles le font pour les bus, trains ou métros.

Deux trajets par jour de 40 kilomètres maximum

La jeune entreprise, qui revendique 80 700 trajets quotidiens inscrits sur son réseau, propose, à partir du mardi 5 septembre, d’intégrer son offre de covoiturage dans les cartes transports de Paris – et son fameux passe Navigo –, mais aussi de Lyon, Lille, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Rennes et Grenoble. Dès qu’un abonné aux transports en commun de l’une de ces huit villes s’inscrit en tant que passager sur l’application WayzUp, le covoiturage sera gratuit pour lui. Pour le conducteur, en revanche, pas de changement : il gagne 10 centimes par kilomètre et par passager transporté.

« Nous n’avons pas signé d’accord spécifique avec les métropoles pour ce projet, précise Julien Honnart, président-fondateur de la start-up. Nous le finançons intégralement sur fonds propres grâce à l’investissement de 1,4 million d’euros réalisé par la RATP et l’incubateur de start-up Via ID. Il appartient maintenant aux collectivités locales de s’en saisir pour pérenniser le financement et proposer à leurs habitants un réseau de transport étendu à un coût compétitif. » L’offre, qui s’arrêtera à la fin de l’année, est limitée à deux trajets par jour de 40 kilomètres maximum.

Arrivée de Blablacar

Si la jeune pousse a décidé de secouer le cocotier des collectivités locales, c’est qu’elle a maintenant besoin de relais de croissance. WayzUp, l’un des acteurs phares du covoiturage pendulaire (domicile-travail) avec IDVroom (filiale de la SNCF) et Karos, a fondé son succès sur sa capacité à tisser des réseaux en étoile autour de grandes entreprises à main-d’œuvre nombreuse, comme Renault, La Poste, le Crédit agricole ou Vinci, sociétés avec lesquelles elle a conclu des accords spécifiques.

Mais la voilà confrontée à l’arrivée sur son terrain de l’ogre du secteur, Blablacar, devenu hégémonique dans les trajets partagés de longue distance. Depuis cette année, Blablacar teste des « lignes » de trajet domicile-travail. De quoi préoccuper les « petits » du covoiturage, même si M. Honnart s’en défend.

Comme dans ses accords avec des groupes privés, WayzUp cherche à constituer des masses critiques de covoitureurs, clé de la rentabilité dans ce métier. « Dans les métropoles que nous avons choisies, les autorités organisatrices de la mobilité nous semblent mûres pour franchir le pas », souligne M. Honnart. C’est le cas en Ile-de-France, où Valérie Pécresse, la présidente (LR) de la région, a déclaré à plusieurs reprises vouloir encourager ce mode de mobilité.

Attirer des voyageurs en commun par défaut

L’opération « pass transport » est aussi une occasion de motiver les voyageurs du quotidien à s’inscrire comme passager. « Il est bien plus difficile de trouver des personnes qui renoncent à leur voiture que des chauffeurs potentiels », confie M. Honnart. WayzUp espère attirer ainsi des voyageurs en commun par défaut, en leur proposant des trajets plus confortables, à petit prix et même plus rapide dès lors qu’ils résident dans une zone mal desservie par le transport public.

C’est aussi le pari d’un autre acteur du covoiturage, Karos, qui a testé pendant deux mois un système de covoiturage dans l’Essonne en partenariat avec le conseil départemental. L’opération « Printemps du court-voiturage » permettait de desservir efficacement les communes rurales ou périurbaines peu denses oubliées par le transport public. Le bilan – 11 000 trajets en deux mois, en hausse de 150 % – a été salué comme positif par François Durovray, président (LR) du conseil départemental.