Pas facile la vie chez SFR. Recruté il y a un peu plus d’un an, Michel Paulin, le directeur général du deuxième opérateur télécoms français, démissionne cette semaine, confirmant une information des Echos. Le dirigeant ne sera pas remplacé. Michel Combes, à la fois PDG de SFR et directeur général d’Altice, la maison mère de l’opérateur, a décidé d’assumer la direction opérationnelle de la marque au carré blanc et rouge.

Le bras droit de Patrick Drahi, propriétaire d’Altice, sera épaulé par Alain Weill, à la tête de la branche médias du groupe, et surtout par Armando Pereira. D’une discrétion de violette à l’extérieur de l’entreprise, le Portugais, co-fondateur de Numéricable (devenu SFR), et co-actionnaire d’Altice aux côtés de Patrick Drahi est connu comme le loup blanc en interne. Chez SFR, il a mené, au moment du rachat de l’entreprise il y a trois ans, la remise à plat du réseau, réduisant le nombre de sous-traitants, rationnalisant les méthodes de travail.

Lire l’interview de Michel Combes : Avec Altice, « nous avons révolutionné les télécoms »

Mais il a également fait grincer des dents. C’est lui qui s’est chargé des basses œuvres tordant le bras des fournisseurs pour obtenir d’importantes ristournes, décourageant certains collaborateurs. Après SFR, Armando Pereira a fait un passage chez Portugal Telecom, une autre filiale d’Altice, dont il est devenu président, et chez CableVision et Suddenlink aux Etats-Unis, où Altice génère désormais plus d’Ebitda (équivalent du résultat brut d’exploitation).

Pénalisé par une dette importante

Quant à Michel Paulin, son départ ne serait pas une éviction, affirment plusieurs sources proches de la direction du groupe. C’est cet été que le polytechnicien, un vétéran des télécoms qui fut également directeur général de Neuf Telecom (intégré depuis dans SFR) puis de Meditel (une filiale d’Orange), est allé faire part à Patrick Drahi et à Michel Combes de son désir de prendre du recul, évoquant une « forme de fatigue et de lassitude » face à une « discipline et une exigence énorme ».

L’actionnaire et le PDG lui auraient demandé de rester en lui proposant plusieurs alternatives, comme le recrutement d’un adjoint. Mais Michel Paulin n’a pas changé d’avis, malgré ses vacances. Il est vrai que diriger SFR n’est pas de tout repos, tant les chantiers sont nombreux.

Depuis un an, Michel Paulin s’est employé à relancer les investissements dans le réseau, à redresser commercialement l’opérateur, qui a perdu 2,5 millions de clients dans le mobile en trois ans et près de 500 000 clients dans le fixe, tout en faisant partir un tiers des effectifs soit 5 000 personnes dans le cadre d’un vaste plan de restructuration. A son actif, la situation dans le mobile s’est améliorée, il a noué de bonnes relations avec les partenaires sociaux et le réseau a regagné en qualité.

Mais la bataille est loin d’être gagnée pour SFR, toujours pénalisé par une dette importante. La stratégie de convergence entre les médias et les télécoms, qui s’est notamment concrétisé par le rachat à prix fort de la Ligue des Champions, peine encore à porter ses fruits.

L’opérateur devra aussi prouver au gouvernement qu’il est capable de tenir sa promesse d’installer la fibre partout en France et de faire économiser à l’Etat des milliards d’euros. Une nouvelle gouvernance, destinée à mieux marier les activités télécoms et médias du groupe, devrait voir le jour ces prochaines semaines à l’occasion du retrait de la cote de SFR, du rachat total de NextRadio (qui coiffe BFM, RMC etc.) et du déménagement des équipes de l’opérateur dans l’immeuble de Quadrans, dans le sud de Paris, où sont déjà installées les chaînes et radios du groupe. Du pain sur la planche pour Patrick Drahi et ses équipes.