Total devient le numéro deux mondial du Gaz naturel liquéfié
Total devient le numéro deux mondial du Gaz naturel liquéfié
LE MONDE ECONOMIE
Le groupe va acquérir, pour 1,49 milliard de dollars, une partie des activités GNL d’Engie. Le développement de ce secteur est au cœur de la stratégie du pétrolier.
Patrick Pouyanné, le PDG de Total, à Paris, le 5 octobre. / ERIC PIERMONT / AFP
Total renforce durablement sa position dans le gaz naturel liquéfié (GNL). Le pétrolier va acquérir une partie des activités d’Engie (ex-GDF Suez) pour une valeur d’entreprise (dette comprise) de 1,49 milliard de dollars (1,28 milliard d’euros). Il pourrait ajouter 550 millions de dollars si le prix du pétrole repartait à la hausse. La finalisation de l’accord devrait intervenir mi-2018.
Ce rachat illustre la stratégie de Patrick Pouyanné, le PDG du groupe, de continuer à investir massivement dans les différentes étapes de la chaîne du gaz. Autrefois concentré principalement sur le pétrole, Total défend aujourd’hui un mix énergétique axé sur le gaz, jugé moins émetteur de CO2 que le pétrole.
Avec ce rachat, le groupe français devient numéro deux mondial du marché du GNL, loin derrière Shell. Total a produit 11 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié en 2016, pour une production mondiale de 250 millions. Le rachat des activités d’Engie lui permettra d’atteindre 23 millions en 2020.
« Le développement du GNL est un élément clé de la stratégie du groupe », répète-t-on chez Total. Le pétrolier français est ainsi associé au russe Novatek dans le gigantesque chantier Yamal LNG, en Sibérie, et participe au projet offshore Ichthys en Australie. Deux projets destinés à fournir massivement du gaz au marché asiatique.
Un marché en forte croissance
Le GNL désigne le gaz naturel transformé à l’état liquide, après refroidissement à une température d’environ – 161°C. Ce processus permet de transporter le gaz par bateau, plutôt que par gazoduc, et sur de très longues distances. C’est ainsi, par exemple, que le gaz du Qatar est exporté, en majorité vers la Corée du Sud ou le Japon.
L’arrivée à maturité des technologies de liquéfaction du gaz ces dernières années a provoqué une explosion des volumes échangés par ce biais, qui sont passés de 97 millions de tonnes par an en 2000 à 258 millions de tonnes en 2016, selon l’Union internationale du gaz.
Le GNL représente près de 10 % de la demande mondiale de gaz, elle-même en constante augmentation. « Le GNL est un marché en forte croissance, à la fois de la demande et de l’offre. La demande du côté asiatique croît beaucoup, avec de nouveaux importateurs comme la Chine, l’Inde et le Pakistan », explique Sébastien Zimmer, bon connaisseur du marché gazier et consultant chez Emerton.
Ce marché est devenu plus difficile à appréhender, en l’absence de prix à l’échelle mondiale : « Il y a des prix par zones, qui fonctionnent chacune avec sa logique », explique M. Zimmer. En Asie, gros consommateur de GNL, le prix est ainsi indexé sur le pétrole.
Alors que les pays signataires de l’accord de Paris sur le climat de 2015 cherchent tous à réduire leurs émissions de CO2, le gaz est perçu par certains acteurs comme une énergie moins polluante que le pétrole ou le charbon. Ainsi, la Chine en consomme de plus en plus pour réduire l’effet du charbon.
Engie continue son virage
Pour Engie, cette cession a d’abord un motif économique : cette activité est très fortement soumise aux variations du marché du gaz. Or celui-ci a été mis à mal par la montée en puissance du gaz de schiste aux Etats-Unis.
L’offre abondante due à la forte production américaine continue de tirer les prix vers le bas. Et le marché peut devenir risqué pour Engie. « Les prix du GNL ont plutôt baissé avec le développement du gaz de schiste américain », note Sébastien Zimmer de chez Emerton, qui note que « des projets d’exportation aux Etats-Unis sont en développement et vont arriver en production très bientôt ».
Mais ces cessions annoncées illustrent aussi la poursuite de la stratégie d’Engie, qui cherche à se recentrer sur des activités en aval plutôt qu’en amont de la chaîne énergétique. « On ne fait plus ce qui ne rentre pas dans nos activités », expliquait simplement en octobre, Isabelle Kocher, la directrice générale du groupe, lors d’un séminaire presse.
Dans ce cadre, Engie s’est engagé à vendre 15 milliards d’euros d’actifs entre 2016 et 2018, en particulier ses activités les plus polluantes. L’entreprise est ainsi en train de céder ses activités dans les hydrocarbures au britannique Neptune Energy. En finalisant cet accord avec Total, le groupe aura réalisé 83 % de ce plan de cessions.
Autre point positif pour l’énergéticien français : l’opération contribue à le désendetter de 1,4 milliard de dollars.