Robert Mugabe, vieil homme affaibli mais politicien habile
Robert Mugabe, vieil homme affaibli mais politicien habile
Par Ghalia Kadiri
Revue d’anecdotes sur un président de 93 ans qui reste redoutable malgré la maladie et un putsch qui le forcera peut-être à quitter le pouvoir.
Le président zimbabwéen Robert Mugabe, le 22 août 2013 à Harare. / ALEXANDER JOE / AFP
Les Zimbabwéens se sont souvent demandé, ces dernières années, si leur président était toujours en vie. Ils en ont désormais la pleine confirmation. Robert Mugabe s’accroche au pouvoir et se montre intraitable dans les négociations en cours sur son éventuelle démission.
Redoutable politicien, il a montré ces derniers temps des signes de grande faiblesse mais aussi une étonnante résilience. En voici les derniers épisodes.
Délits de sieste
Ce n’est pas son statut de plus vieux président en exercice de la planète qui le fera renoncer, mais il lui arrive parfois de flancher. A 93 ans, Robert Mugabe a été surpris plusieurs fois en « délit de sieste » lors de prestations publiques. Les photos du président zimbabwéen assoupi pendant les réunions internationales ont fait rire toute la planète. Mais son porte-parole dément les signes de fatigue : selon lui, Robert Mugabe ne dort pas, il ferme les yeux pour les protéger de la lumière.
Robert Mugabe lors d’un dîner du sommet Afrique-France, le 13 janvier 2017 à Bamako. / SEBASTIEN RIEUSSEC/AFP
Erreur de discours
La gêne était telle que personne n’a réagi. En 2015, au Parlement, le chef d’Etat a prononcé pendant vingt-cinq minutes le même discours qu’il avait récité un mois plus tôt, mot pour mot. Manifestement sans s’en apercevoir. Même les députés de l’opposition sont restés silencieux. Ils auraient reçu un SMS anonyme les mettant en garde contre toute perturbation pendant le discours présidentiel.
Escapades médicales à Singapour
L’état de santé du président Mugabe, qui lutte depuis plusieurs années contre un cancer, est un constant sujet de spéculations, entretenu par ses visites médicales régulières à Singapour et à Dubaï. Ces déplacements suscitent depuis plusieurs années des critiques acerbes des Zimbabwéens. Imperturbable, son porte-parole justifie les escapades en rappelant que le chef d’Etat ne se rendait à Singapour que pour consulter « les meilleurs spécialistes ».
Honourable President of #Zimbabwe #Mugabe who runs the country in his sleep or in Singapore, the poor continue to s… https://t.co/PdkDEEwCuN
— AliceChigumira (@AliceColes(Chigumira)
Chutes publiques
Robert Mugabe peine à dissimuler le poids des années. En 2015, plusieurs chutes en public ont fait planer le doute sur ses capacités physiques. Un an plus tôt, il était tombé sur les genoux en descendant d’un podium après avoir prononcé un discours à Hararé. Filmées, les vidéos de ses chutes ont fait le tour des réseaux sociaux.
Robert Mugabe falls down steps after speech in Harare
#ThisFlag #Tajamuka #Tasvinura #Zzimbabwe https://t.co/chM4Md5pyf
— povonewsafrica (@Povo News)
Mais le chef d’Etat zimbabwéen n’a pas que des faiblesses. Intraitable « père de la libération », Robert Mugabe, qui se dit plus déterminé que jamais à conserver les rênes du pays, est un homme politique habile et discipliné, jusque-là capable de renverser toutes les situations.
Sauver Grace Mugabe
Visée par une plainte pour agression en Afrique du Sud cet été, Grace Mugabe, la première dame, avait réussi à revenir dans son pays sans encombre grâce à la bénédiction du ministère des affaires étrangères sud-africain qui lui a accordé l’immunité diplomatique. L’ombre de son époux plane évidemment sur cette décision controversée.
President Robert Mugabe listens to his wife Grace Mugabe at a rally of his ruling ZANU-PF party in Harare, Zimbabwe, November 8, 2017.REUTERS/Philimon Bulawayo / PHILIMON BULAWAYO / REUTERS
Ambassadeur de l’OMS
Cette année, le président Mugabe a été choisi comme ambassadeur de bonne volonté par le directeur général de l’Organisation mondiale de santé (OMS). Mais il n’aura eu que cinq jours pour savourer cet honneur puisque ce titre, essentiellement honorifique, lui a été retiré à la suite du tollé suscité par sa nomination. Il n’empêche que l’aura de Robert Mugabe continue de rayonner sur le continent africain et notamment sur ses pairs chefs d’Etat.
Homme de fer
A 93 ans, celui qui dirige le Zimbabwe depuis trente-sept ans n’a jamais plié. Ni son état de santé ni les critiques de ses détracteurs ne l’ont fait vaciller. Aux commandes depuis l’indépendance en 1980, le « libérateur » du Zimbabwe a conservé une main de fer sur le pouvoir. En 2016, le président le plus vieux du monde avait répondu à tous ceux qui doutaient de sa résilience : « Je suis mort plusieurs fois. J’ai battu le Christ. Il n’est mort qu’une seule fois et n’a ressuscité qu’une seule fois. »