La médecine sans frontières fait rêver les étudiants
La médecine sans frontières fait rêver les étudiants
Par Agathe Charnet
Les associations humanitaires œuvrant dans les pays en développement attirent un nombre croissant d’apprentis médecins français.
A l’étranger, les étudiants se confrontent à d’autres manières de soigner. Ici, un centre d’accueil des réfugiés de Médecins Sans Frontiere (MSF) en Sicile. REUTERS/Darrin Zammit Lupi / DARRIN ZAMMIT LUPI / REUTERS
« Le dernier jour de mon stage, la sage-femme vietnamienne m’a tendu une paire de gants et on a fait l’accouchement à quatre mains. C’était un moment intense. » Après sa quatrième année de médecine, Julie Archimbaud a effectué un stage d’été dans la plus grande maternité du sud du Vietnam. « Un choc culturel à tous niveaux » pour l’étudiante lyonnaise, qui a découvert « une pratique médicale totalement différente » et qui projette de repartir « en Amérique du Sud » d’ici à la fin de ses études.
Depuis une dizaine d’années, les étudiants en médecine sont de plus en plus nombreux à vouloir découvrir leur futur métier hors de l’Hexagone. « Presque tous nos étudiants partent, décrit Frédéric Batteux, vice-doyen chargé des relations internationales à l’université Paris-Descartes. C’est un esprit un peu “grande école” : ils choisissent autant de faire de la médecine humanitaire que des destinations high-tech comme la Chine ou les Etats-Unis. Quoi qu’il en soit, il y a toujours un avant et un après ce genre d’expérience. »
« Aller là où on est le plus utile »
« C’est lors d’un stage au Sénégal, à la fin de mon externat, que j’ai compris pourquoi je faisais médecine, confirme Jean Duval-Destin, interne en pédiatrie à Lille. Pour la première fois, j’ai pris des décisions thérapeutiques, j’ai eu des responsabilités. » Un désir de se confronter à d’autres manières de soigner qui fait des émules. La nouvelle spécialité d’internat « maladies infectieuses et tropicales » a été prise d’assaut, à la suite de la réforme du troisième cycle. Et si la médecine sans frontières attire les étudiants, c’est parce qu’elle suscite de véritables vocations.
Amel Filali, 32 ans, en est un exemple probant. Passée par une année de spécialisation en médecine tropicale et méditerranéenne à l’université d’Aix-Marseille (lire ci-dessous) en 2017, l’infectiologue s’est rendue durant un mois sur l’île de Lesbos où elle a travaillé auprès des populations réfugiées. « Cette expérience – d’une très grande intensité – m’a réconciliée avec mon travail, affirme t-elle. A la base de mon engagement, il y a ce besoin d’aller là où on est le plus utile. Et aussi la révolte. Comme l’écrit Aragon, “le monde tel qu’il est que follement je nie”. »
Un DIU de médecine tropicale à Aix-Marseille
Durant une année, une quarantaine d’étudiants issus d’horizons divers – soignants, internes, militaires – ont la possibilité de suivre le Diplôme d’études supérieures interuniversitaires en médecine tropicale et méditerranéenne de l’université d’Aix-Marseille. « La discipline dépasse le paludisme ou le cadre de l’infectiologie, précise le Dr Philippe Parola, responsable de la formation. C’est aussi comprendre en contexte le diabète, l’obésité ou la malnutrition, fléaux du monde tropical. » Pour s’orienter vers la médecine tropicale, le Dr Parola affirme qu’il faut « avoir une envie d’ailleurs, une vraie curiosité ». De ce point de vue, « rien ne vaut le terrain ».