Martin Schulz, le 20 décembre 2017 à la chancellerie. / HANNIBAL HANSCHKE / REUTERS

Les conservateurs allemands (CDU-CSU) en sont convaincus : s’ils ont échoué à former un gouvernement avec les libéraux (FDP) et les Verts après les élections législatives du 24 septembre 2017, cela tient notamment à la façon trop publique dont se sont déroulés les pourparlers. Avec les sociaux-démocrates, sur qui ils comptent désormais pour constituer une « grande coalition », ils ont décidé de procéder différemment.

A l’automne 2017, la CDU-CSU, le FDP et les Verts s’étaient donné un mois pour dire s’ils estimaient possible de gouverner ensemble. Pendant ce mois, les négociateurs des trois partis se sont largement exprimés dans les médias et sur les réseaux sociaux pour exposer leurs exigences et leurs griefs. Parallèlement, ils ont abondamment profité du balcon du bâtiment où avaient lieu leurs réunions, en face du Bundestag, à Berlin, pour se mettre en scène. Grâce aux cameramen et aux photographes postés face à ce fameux balcon pour saisir les jeux de regard et la géographie des apartés entre les uns et les autres, les Allemands ont pu suivre, pratiquement comme au spectacle, l’évolution des tractations.

Papier occultant sur les fenêtres

Cette fois, les dirigeants de la CDU-CSU et du SPD ont estimé que cinq journées suffiraient pour constater, ou non, la possibilité de s’entendre sur un programme de gouvernement. Au terme de ce délai, soit vendredi 12 janvier, l’idée est d’aboutir à un document de 6 à 8 pages listant les principaux points d’accord. Le 19 novembre 2017, le mois de pourparlers avait accouché d’un texte de travail de 61 pages qui, parce qu’il se voulait peut-être trop précis, se révéla finalement impossible à boucler. Enfin, les trente-neuf négociateurs de la CDU-CSU et du SPD ont été priés de se faire discrets sur les réseaux sociaux et dans la presse afin d’éviter que des expressions médiatiques intempestives ne compliquent les discussions à huis clos.

La consigne a été respectée, dimanche 7 janvier, au premier jour des pourparlers. Après dix heures de discussions à l’abri des regards indiscrets – au point que du papier occultant avait été mis aux fenêtres derrière lesquelles elles avaient lieu, au siège du SPD –, seul un dirigeant social-démocrate a pris la parole devant les journalistes pour indiquer, au nom des trois partis, que les échanges avaient été « constructifs » et « ouverts », et que les participants partageaient la conviction suivante : « On ne peut pas simplement continuer comme avant, car les temps ont changé et cette nouvelle époque appelle une nouvelle politique (…) et un nouveau style politique. » Il n’en a pas dit davantage.