Football : au Real Madrid, Zidane fait face à sa première crise
Football : au Real Madrid, Zidane fait face à sa première crise
À un mois d’affronter le PSG en huitièmes de finale de la Ligue des champions, Zinedine Zidane ne trouve pas de solution pour redresser le club madrilène.
Par Rodolphe Ryo
Zinedine Zidane sur le banc du Real Madrid face à Villarreal, en Liga, le 13 janvier 2018. / JAVIER BARBANCHO / REUTERS
Deux ans : c’est le temps, exceptionnellement long dans le football moderne, qu’aura duré l’état de grâce de Zinedine Zidane sur le banc du Real Madrid. Deux ans avant que « Zidane » et « crise » ne puissent être prononcés dans une même phrase par les médias espagnols, toujours pressés de déclarer que la Maison blanche brûle.
Mais la nouvelle défaite à domicile samedi 13 janvier contre Villarreal (0-1) a fini de plonger le Français dans cette vase qui aspire inexorablement tous les entraîneurs madrilènes. La fin malheureuse d’une semaine contrastée : d’un côté, sa prolongation jusqu’en 2020 a été confirmée ; de l’autre, les révélations des Football Leaks sur les revenus de Lionel Messi et la tentative, en 2013, d’attirer l’Argentin au Real Madrid ne peuvent que perturber davantage sa star égotique, Cristiano Ronaldo.
Défaits pour la deuxième fois consécutive au Santiago Bernabéu, après leur déroute face au Barça (3-0), les champions d’Espagne en titre restent englués à la quatrième place du classement. Les hommes de Zidane n’ont remporté qu’un seul de leurs cinq derniers matches.
Un revers de fortune subit pour celui à qui, jusqu’à présent, tout souriait : au printemps, il était devenu le premier entraîneur à remporter deux Ligues des champions d’affilée depuis Arrigo Sacchi en 1990. Avec sept titres gagnés en dix-neuf mois, il avait obtenu, au bout de sa première saison complète comme entraîneur, le titre de meilleur entraîneur du monde décerné par la Fifa.
Comme il l’a dit dans un entretien à France Football début janvier, Zidane savait que ces temps difficiles allaient un jour arriver « J’ai envie de montrer que je peux être un bon entraîneur aussi dans la difficulté. Elle ne me fait pas peur. Je suis armé contre ça. Je me suis préparé à ce que ce soit compliqué », assurait-il, sûr de lui. Après la rencontre face à Villarreal, perdue malgré vingt-huit frappes tentées, il a pourtant donné l’impression d’être impuissant en conférence de presse en plaidant avant tout un « manque de chance » dans la surface adverse.
« Je n’ai pas d’explication. Le problème, c’est que le ballon n’a pas voulu entrer. C’est une question de mauvaise série, a-t-il avancé, presque fataliste. Il faut continuer à travailler et se tourner vers le prochain match. » Ce sera sur le terrain de Leganes en quart de finale aller de la Coupe du Roi, jeudi 25 janvier.
« Il doit se corriger lui-même »
Cette rencontre sera-t-elle l’occasion pour Zidane de modifier ses plans tactiques, ce qu’il se refuse à faire jusqu’à présent ? Cette semaine, la presse espagnole, notamment Marca, s’interrogeait sur le sort réservé au prodige espagnol de 21 ans, Marco Asensio. Révélation de la saison dernière au Real, l’ancien de l’Espanyol est assez peu utilisé cette année, alors que son talent pourrait faire du bien à une formation en panne d’inspiration offensive. À l’inverse, certains joueurs semblent bénéficier d’un étonnant totem d’immunité, à l’instar de Marcelo.
Malgré des prestations en demi-teinte, voire carrément catastrophiques comme face au Celta Vigo le 7 janvier (2-2), le latéral gauche brésilien continue d’avoir la confiance de Zidane.
Zinedine Zidane, ici face à Villarreal le 13 janvier 2018, traverse sa première crise au Real Madrid. / Paul White / AP
S’il bénéficie encore d’un important crédit à Madrid, hérité à la fois de son passage en tant que joueur et de sa première saison et demie, Zidane a vu son étoile pâlir à l’issue du Clasico face au Barça, pendant les fêtes. Pour tenter de contrer le génie de Lionel Messi, il avait choisi d’aligner Mateo Kovacic au détriment de son meneur de jeu habituel, Isco. Le Croate avait été fautif sur deux des trois buts inscrits par les Catalans.
Ancien attaquant et directeur sportif des Merengue, Jorge Valdano lui a récemment demandé de se remettre en question dans une interview accordée à la radio espagnole Onda Cero : « À l’époque, il devait corriger Rafa Benitez [à qui il a succédé sur le banc]. Aujourd’hui, il doit se corriger lui-même. Il y a un problème qui est clairement lié à l’entraîneur », a soutenu Valdano, rejoint dans son analyse par un autre historique du Real. Dans les colonnes de L’Équipe, l’ancien gardien Santiago Cañizares a regretté de n’avoir « pas encore vu sa patte d’entraîneur » cette saison :
« Depuis septembre, on attend que Zidane soit capable d’inverser la dynamique, avec des ajustements tactiques, certaines décisions importantes. Il ne l’a pas réussi. »
Une place en C1 en danger
Cañizares, comme d’autres observateurs, réclame l’arrivée d’un attaquant lors du marché des transferts de janvier, pour suppléer Cristiano Ronaldo, Karim Benzema et Gareth Bale en total manque de réussite.
Mais ce vœu a peu de chances d’être exaucé, Zidane ayant répété à plusieurs reprises depuis le début du mercato qu’il n’avait besoin d’aucune recrue. Il avait tenu le même discours l’été dernier après le départ du buteur Alvaro Morata, parti à Chelsea pour 65 millions d’euros. Le Colombien James Rodriguez et le Portugais Pepe avaient eux aussi été mis à la porte, sans que le Real ne les remplace par des joueurs d’expérience. Seuls des jeunes talents prometteurs (Theo Hernandez, Dani Ceballos) étaient arrivés mais ils ne sont pas encore parvenus à se faire une place dans le onze de départ.
« Mécontent, mais pas abattu », selon ses mots, Zidane doit rapidement trouver la formule. Distancés par le trio Barça - Atlético - Valence, les Madrilènes semblent condamnés à lutter en Liga pour la quatrième place, dernier ticket qualificatif pour la phase de poules de la C1, et sont talonnés par Villarreal et Séville.
Surtout, dans un mois jour pour jour, le Paris Saint-Germain se présentera au Bernabéu en huitième de finale aller, avant d’accueillir la seconde manche le 6 mars.
« On ne va pas arriver le 14 février et se dire : « Youpi, on est là ». Ça se prépare avant. Il faut remotiver les troupes », a-t-il rappelé mardi, après s’être adressé pendant près d’une heure à son effectif en marge de l’entraînement collectif. Sous une pression qu’il n’a jamais subie auparavant, l’ancien Galactique ne pourra pas se manquer face aux Parisiens.
Les prochaines semaines diront comment Zidane l’entraîneur réagit à la pression. Dans France Football, il s’interdisait de paniquer : « Jouer au football, on sait faire, donc les choses finissent toujours par s’arranger. »