Chelsea Manning sommée de s’expliquer sur sa présence à un rassemblement d’extrême droite
Chelsea Manning sommée de s’expliquer sur sa présence à un rassemblement d’extrême droite
L’ancienne source de WikiLeaks, désormais candidate aux sénatoriales américaines, a participé à un événement organisé par Mike Cernovich, un des soutiens de Donald Trump.
Chelsea Manning, candidate aux sénatoriales américaines, a assisté à un rassemblement de l’« alt-right » américaine, le 21 janvier à Nantucket. / Steven Senne / AP
L’ancienne lanceuse d’alerte de WikiLeaks a-t-elle commis un faux pas ? Chelsea Manning, qui a annoncé le 14 janvier se porter candidate à l’investiture démocrate aux prochaines sénatoriales américaines, a été aperçue à un rassemblement d’extrême droite à New York, dimanche 21 janvier dans la soirée. Ses soutiens l’ont sommée de s’expliquer sur cet épisode. Il s’agissait selon elle d’une manœuvre, a-t-elle twitté le lendemain :
« Je suis candidate parce que notre monde devrait être meilleur pour tous, toujours. Les fascistes-l’alt-right ne méritent aucune tribune, nous nous opposons fermement à eux. J’ai saisi une occasion de collecter des renseignements sur eux parce que l’idéologie qu’ils colportent menace tout le monde. »
im running b/c our world should be better for everyone, always 🌍🌏🌎
fascists/alt-right deserve no platform ❌📢 we sta… https://t.co/QfroKnHz1s
— xychelsea (@Chelsea E. Manning)
L’événement, baptisé « A Night for freedom », était organisé par Mike Cernovich, influente figure de l’extrême droite américaine, dite « alt-right », pour fêter la première année de Donald Trump à la Maison Blanche. Celui-ci décrit cette soirée comme « un rassemblement de patriotes et de dissidents politiques lassés des rassemblements mainstreams ». Mike Cernovich a notamment été un des principaux relais de la théorie conspirationniste du PizzaGate, selon laquelle une pizzeria de Washington servirait de lieu de réunion à un réseau pédophile proche du Parti démocrate. Masculiniste, il s’est également investi en 2015 dans la récupération du GamerGate, un mouvement de joueurs de jeu vidéo antiprogressiste, dont une partie a grossi le corps de l’alt-right.
Mike Cernovich s’est félicité que Chelsea Manning soit passée à son rassemblement :
« Oui, j’ai littéralement serré la main à Chelsea Manning ce soir, la gauche flippe, ce n’était pas grand-chose. C’était une énorme fête, folle. Je suis ravi qu’elle soit passée. Tout le monde est bienvenu quand il s’agit de faire la fête avec moi. »
L’ancienne lanceuse d’alerte de WikiLeaks, emprisonnée en 2013 pour avoir transmis à l’organisation des milliers de documents secrets de l’armée américaine, puis graciée en 2017 par Barack Obama, s’était une première fois justifiée le soir même sur Twitter. Elle expliquait alors « avoir appris en prison que la meilleure façon de se confronter à [ses] ennemis, c’est de leur faire face sur leur territoire. »
« Le bénéfice du doute »
La présence de Chelsea Manning à ce rassemblement a suscité des commentaires irrités dans son propre camp, qui s’inquiète d’éventuelles amitiés. La militante américaine Linda Sarsour, qui se bat pour les droits des musulmans aux Etats-Unis, a qualifié une photo de la lanceuse d’alerte au milieu de militants d’extrême droite de « pire du pire ».
En décembre, l’ancienne lanceuse d’alerte de WikiLeaks avait déjà été photographiée en compagnie de militants d’extrême droite, comme le journaliste du média conspirationniste The Rebel, Jack Posobiec. Celui-ci avait été parmi les premiers à relayer les « Macron Leaks », ces documents volés à l’entourage d’Emmanuel Macron durant l’entre-deux tours de l’élection présidentielle française, en mai dernier.
Le journaliste de The Intercept Glenn Greenwald, célèbre pour avoir publié les révélations du lanceur d’alerte Edward Snowden en 2013, a quant à lui pris sa défense :
« Il est 100 % légitime de se poser des questions, mais quelqu’un avec son histoire – elle a été en prison sept ans pour avoir rendu publics des crimes de guerre américains, supporté des abus qualifiés d’inhumains par l’ONU et défendu les droits des trans alors qu’elle était enfermée dans une prison militaire – mérite le bénéfice du doute sur le fait qu’elle ne soit pas une fasciste. »
Depuis fin 2016, WikiLeaks est accusé par de nombreux commentateurs d’avoir fait le jeu de Donald Trump lors de la campagne présidentielle 2016 en publiant de nombreux documents contre Hillary Clinton. Son cofondateur, Julian Assange, est visé par une enquête aux Etats-Unis depuis 2010, date à laquelle WikiLeaks a publié les documents transmis par Chelsea Manning. Celle-ci assurait toutefois le 18 janvier au Guardian ne plus être en contact avec Julian Assange depuis.