Magazine sur France 2 à 22 h 40

Après l’agression de trois surveillants de prison par un détenu djihadiste dans la ­prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais), le 10 janvier, l’institution ­pénitentiaire a connu un mouvement social tel qu’elle n’en avait pas connu depuis vingt-cinq ans. Après quinze jours de conflit, qui vit 72 établissements touchés par des débrayages, un accord était conclu entre les syndicats et la ­ministre de la justice, Nicole ­Belloubet, portant sur la sécurité des surveillants de prison, une augmentation des primes, une prise en charge renforcée des ­détenus radicalisés, ou encore la création de 1 100 postes supplémentaires d’ici quatre ans.

Mais ces mesures sont loin de résoudre les problèmes endémiques qui touchent les prisons françaises, épinglées par les ONG et les instances européennes pour leur surpopulation (le taux d’occupation y est de 118 %), le nombre de suicides (deux fois ­supérieur à la moyenne européenne), sans parler de la vétusté et l’état de délabrement de ­certains établissements. Telle la prison de la Santé à Paris, qui aura attendu de longues ­années avant que ne soit lancée une vaste opération de réno­vation, et dans laquelle Thomas Sotto a choisi d’installer les fauteuils rouges de « Complément d’enquête ».

Sans être exhaustifs sur les maux – et les remèdes proposés par la garde des sceaux, invitée du magazine –, quatre reportages tentent de saisir au plus près « la vraie vie en prison » des détenus et des surveillants, dont la grogne fait l’objet d’un des sujets que nous n’avons pas pu visionner.

Le centre pénitentiaire de Nancy-Maxéville en juin 2009. / JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN/AFP

Pour autant, on peut aisément imaginer certains motifs de leur blues, à travers le reportage assez sidérant sur la perméabilité de la plupart des établissements, dans lesquels circulent alcool, drogue et téléphones portables. En 2017, selon Baptiste des Monstiers,qui a mené l’enquête, près de 31 000 auraient été saisis. « Les prisons sont des passoires où tout peut entrer », explique Tadila Douki, surveillante et déléguée syndicale au centre pénitentiaire de Nancy-Maxéville qui, faisant visiter les abords, montre la facilité avec ­laquelle peuvent être coupés les grillages et projetées diverses marchandises. Parfois des plus improbables, comme une piscine gonflable… L’affaire pourrait presque prêter à sourire si ne se posait la question de la sécurité. Une question qui, faute de moyens adéquats et efficaces – comme à Lille, où les systèmes brouilleurs n’empêchent guère de se connecter à la 4G –, semble passer au ­second plan. « Le haschisch et le téléphone, ça achète la paix sociale dans les prisons », explique un détenu sous couvert d’anonymat qui, chaque soir, après la ronde des gardiens, appelle son fils de 8 ans pour l’aider à faire ses devoirs.

Au-delà de l’aspect passoire des prisons françaises, ce reportage met en évidence toute la complexité tant dans la dimension sociale et humaine que sé­curitaire de la situation des prisons, au sein desquelles la crise couve toujours.

Complément d’enquête, magazine présenté par Thomas Sotto (Fr, 2017, 81 min.)