Armes à feu : comment la position de Donald Trump a évolué depuis la fusillade de Parkland
Armes à feu : comment la position de Donald Trump a évolué depuis la fusillade de Parkland
Le Monde.fr avec AFP
En l’espace de quinze jours, les déclarations du président américain sur les armes à feu, qu’il se dit désormais prêt à encadrer davantage, ont beaucoup fluctué.
La tuerie du lycée de Parkland (Floride), le 14 février, au cours de laquelle 17 personnes ont trouvé la mort, a relancé une nouvelle fois le débat aux Etats-Unis entre ceux qui réclament un contrôle plus strict des armes et ceux qui y sont opposés, au premier rang desquels la National Rifle Association (NRA), le très puissant lobby des armes à feu.
Dans ce débat, le président américain Donald Trump, fervent défenseur du deuxième amendement de la Constitution (qui garantit à tout citoyen le droit de porter des armes) et soutenu par la NRA durant sa campagne présidentielle, joue les équilibristes depuis deux semaines.
S’il est resté prudent sur d’éventuelles modifications législatives dans la foulée de la tuerie, son discours a depuis connu des inflexions. Au point que Donald Trump a pris tout le monde de court mercredi 28 février, lors d’une réunion avec des membres démocrates et républicains du Congrès, en déclarant : « Nous devons faire quelque chose. Nous devons agir. »
Retour sur les fluctuations du discours présidentiel depuis quinze jours.
- 14 février : l’argument du déséquilibre mental
Dans les heures qui suivent le drame, c’est le silence de Donald Trump sur la question des armes à feu qui frappe : il présente dans ses premiers tweets le drame en Floride comme l’acte d’un déséquilibré mental, sans relever que le tireur, âgé de 19 ans, a pu s’équiper d’un fusil d’assaut.
So many signs that the Florida shooter was mentally disturbed, even expelled from school for bad and erratic behavi… https://t.co/3mSYrtTng6
— realDonaldTrump (@Donald J. Trump)
Dans des situations similaires, ses prédécesseurs avaient été prompts à s’exprimer pour appeler à l’unité et consoler une nation régulièrement endeuillée par les tueries de masse.
Il faudra attendre dix-sept heures après l’annonce du bilan de la tuerie pour que le président américain s’adresse enfin avec gravité à la nation. Mais il passe alors sous silence la question des armes à feu et met plutôt l’accent sur la nécessité de repérer les personnes souffrant de problèmes psychiatriques.
- 18 février : le FBI pris pour cible
Accusé par des lycéens, présents lors du drame, de ne pas en faire assez pour le contrôle des armes à feu, le président choisit de répliquer, le 18 février, en s’en prenant à son meilleur ennemi du moment : le FBI. Il accuse la police fédérale de n’avoir pas su empêcher cette tuerie, jugeant qu’elle passe « trop de temps » à enquêter sur les interférences russes dans l’élection de 2016.
En l’occurrence, le FBI a reconnu une défaillance : il avait reçu en janvier un appel d’un proche du tueur, alarmé par son comportement déviant et ses intentions meurtrières, sans donner suite à ce signalement.
- 19 février : l’ouverture à un renforcement du contrôle des antécédents
Face à la colère grandissante d’une partie de la population, Donald Trump commence à montrer des signes d’inflexion : le 19 février, le président américain se dit favorable à un renforcement du contrôle des antécédents lors de l’achat d’une arme à feu.
- 20 février : le souhait d’interdire les « bump stocks »
Face à la vague d’indignation, M. Trump affiche, le 20 février, sa volonté d’interdire les mécanismes connus sous le nom de bump stocks, utilisés par le tueur de Las Vegas en octobre 2017, qui permettent à un fusil de tirer en rafales quasi automatiques.
Dans la foulée de la fusillade de Las Vegas, la plus meurtrière de l’histoire des États-Unis (58 morts), en octobre 2017, la Maison Blanche, des élus républicains, mais aussi, fait rare, la NRA, avaient estimé que ces mécanismes devraient être soumis à davantage de contrôle, mais rien n’avait bougé.
Le même jour, M. Trump se montre aussi ouvert à une discussion sur un éventuel relèvement de l’âge légal pour l’achat d’armes semi-automatiques de type AR-15, comme celle utilisée par le tireur de Parkland.
- 21 février : la proposition d’armer les enseignants
Pour empêcher les tueries, Trump souhaite armer les enseignants
Durée : 00:49
Après ses premiers signes d’inflexion, le locataire de la Maison Blanche émet des signaux opposés, destinés à rassurer le lobby des armes, en reprenant l’une de leurs propositions : le 21 février, devant des étudiants et des proches des victimes de la fusillade de Parkland, il défend l’idée d’armer environ 20 % des enseignants, option controversée qui suscite une fronde dans le milieu éducatif et parmi la population.
Donald Trump réitère par ailleurs sa promesse de prendre des mesures « fortes » sur les vérifications des antécédents judiciaires et psychiatriques des acheteurs d’armes. Il promet aussi la « fermeté » sur l’âge légal pour acheter une arme à feu, mais sans autres précisions.
- 28 février : le défi à la NRA
« [La NRA] a un grand pouvoir sur vous. Elle a moins de pouvoir sur moi. Je n’ai pas besoin d’elle ».
Alors que ce genre de déclaration aurait semblé inimaginable quinze jours avant, le président américain invite, mercredi 28 février, les parlementaires à « ne pas avoir peur de la NRA » et soutient des mesures pour le contrôle des armes plus fortes que celles prônées par son parti.
Le président annonce vouloir aller au-delà d’une loi centrée sur le renforcement du contrôle des antécédents d’acquéreurs d’armes à feu. Il souhaite établir un plan d’ensemble, même si ce plan comprend des mesures auxquelles s’oppose la NRA. « Je la signerai », promet Trump à propos de cette éventuelle future loi.
Il se dit notamment favorable au relèvement, de 18 à 21 ans, de l’âge minimum requis pour acquérir un fusil.
En ce qui concerne le renforcement du contrôle des antécédents, le président demande que les mesures soient plus larges : « Il faut être très, très efficace sur le contrôle des antécédents. Ne soyez pas timides. »
M. Trump exprime aussi, pour la première fois, son soutien à des lois prises par des Etats qui autorisent la police à saisir temporairement les armes des personnes jugées dangereuses. Le président va même plus loin en disant que la police n’a pas besoin d’obtenir un mandat pour ce faire.
M. Trump restera-t-il sur ses dernières positions ? Les républicains le suivront-ils ou hésiteront-ils à contrarier leurs électeurs pro-armes juste avant les élections de mi-mandat, en novembre ? La Maison Blanche pourrait présenter dès jeudi une liste des décisions de Donald Trump sur la sécurité en milieu scolaire.
NRA : pourquoi le lobby des armes est devenu si puissant aux Etats-Unis
Durée : 04:36