Manifestation dimanche 4 mars à Mauzé-sur-le-Mignon en Nouvelle-Aquitaine. / Claire Mayer

C’est dans une ambiance festive aux notes pluvieuses, faite de stands de producteurs locaux et de pique-niques improvisés, que s’est ouverte la « Marche des pigouilles », la seconde manifestation à l’initiative du collectif citoyen Bassines Non Merci !, dimanche 4 mars, dans la commune de Mauzé-sur-le-Mignon (Deux-Sèvres).

Le dossier secoue la région depuis plusieurs mois : un projet de dix-neuf retenues d’eau appelées « bassines » – quinze dans les Deux-Sèvres, deux en Charente-Maritime et deux dans la Vienne – destinées à soutenir l’irrigation d’une partie des agriculteurs de la région. Cette zone de la Sèvre Niortaise, déjà soumise à d’importants prélèvements en eau, souffre d’une insuffisance récurrente des ressources hydriques.

« Meilleure étude »

Après une première manifestation en novembre 2017 à Amuré (Deux-Sèvres) qui avait rassemblé 1 500 personnes, 2 200 citoyens étaient présents cette fois. « La mobilisation s’est intensifiée, c’est très encourageant », se réjouit un membre du collectif. Manifestations, rencontre avec Alain Rousset, le président socialiste de Nouvelle-Aquitaine, lettre ouverte aux conseils régionaux : la détermination des anti-bassines ne reste pas sans effet.

« La région devait prendre sa décision la semaine prochaine ; grâce à notre mobilisation, la séance a été repoussée au mois de juin, poursuit le militant. Nous espérons que ce délai permettra une meilleure étude du dossier et nous attendons maintenant d’Alain Rousset qu’il réponde à notre invitation et vienne voir par lui-même ce que devient le Marais poitevin. »

Financées à 70 % par des fonds publics, les futures bassines doivent stocker 6 millions de mètres cubes d’eau prélevés dans les nappes phréatiques. Cette opération voulue par les agriculteurs adhérents de la Coop de l’Eau aurait de lourdes conséquences environnementales et économiques, selon les opposants. Julien Le Guet, membre de Bassines Non Merci !, dénonce un projet contraire à la loi-cadre européenne sur la bonne qualité de l’eau, et des prélèvements qui profiteront uniquement aux 5 % des agriculteurs raccordés, estime-t-il. Le collectif soutient un autre type d’agriculture basé sur des mesures agro-écologiques capables de conserver l’eau dans le sol, tout en mettant en valeur les productions locales.

Deuxième zone humide de France

Comme en novembre, Delphine Batho, ancienne ministre de l’écologie, vice-présidente du groupe Nouvelle Gauche à l’Assemblée, s’est jointe à la journée de mobilisation ; elle soutient l’initiative depuis le début. « Depuis le projet d’autoroute qui devait traverser le Marais poitevin, il n’y a pas eu de manifestation de cette ampleur. Cette question d’irrigation agricole interpelle, observe la députée. Mais malgré cette montée en puissance d’un mouvement d’opposition, le projet en faveur des retenues d’eau continue d’avancer. J’ai posé une question au gouvernement à l’Assemblée la semaine dernière, je n’ai obtenu pour l’instant qu’une réponse consistant à botter en touche. Ce que je demande aujourd’hui, notamment [au ministre de l’écologie] Nicolas Hulot, c’est d’arrêter le laisser faire dans ce dossier qui impacte la deuxième zone humide de France après la Camargue. »

De leur côté, les partisans du projet de bassines refusent d’envisager d’autres solutions. Ils organisaient, ce 4 mars, un contre-événement dans une commune voisine. La problématique de la gestion de l’eau dans la région n’est pas près de faire consensus.

Claire Mayer