« Le Jour de mon retour » : le naufrage de Donald Crowhurst
« Le Jour de mon retour » : le naufrage de Donald Crowhurst
Par Thomas Sotinel
James Marsh signe une adaptation très sage de l’odyssée du navigateur solitaire qui, en 1968, berna le public britannique avant de disparaître.
Pour la troisième fois, Donald Crowhurst reprend la mer à l’écran. Le navigateur solitaire britannique, disparu en mer en 1968, a déjà inspiré un film de fiction, Les Quarantièmes rugissants (1982), de Christian de Chalonge, et un documentaire Deep Water, de Louise Osmond et Jerry Rothwell, sorti en 2006. Le producteur et interprète du premier de ces longs-métrages, Jacques Perrin, est d’ailleurs au générique du Jour de mon retour, à travers sa société Galatée.
Il faut dire que l’histoire de ce petit entrepreneur anglais, marin du dimanche qui s’improvisa hauturier du jour au lendemain lorsque le Sunday Times organisa, il y a un demi-siècle, la première course autour du monde en solitaire sans escale a de quoi fasciner, voire obséder. Si on ne la connaît pas, le film de James Marsh offre l’occasion de la découvrir. Hélas, le destin de cet honnête homme dont la mer a d’abord fait un escroc avant de le mener à la folie reste rétive au cinéma. Le Jour de mon retour reste l’illustration littérale d’une histoire dont tout l’intérêt réside dans l’indicible.
Bulletins fantaisistes
Inventeur d’un système rudimentaire de géolocalisation, Donald Crowhurst (Colin Firth) embarqua pour la course du Sunday Times dans des conditions que plus d’un organisateur ne tolérerait aujourd’hui. Financé par un homme d’affaires du petit port de Teignmouth, le bateau de Crowhurst, un trimaran au dessin inédit, avait à peine navigué le jour où il prit la mer. Le skipper lui-même n’avait aucune expérience de la navigation océanique, ce dont son épouse Claire (Rachel Weisz) était bien consciente.
En passant l’Equateur, le néophyte se rendit compte qu’il n’avait aucune chance de remporter la course, ce qui le condamnait à la ruine. Il avait gagé sa maison et son entreprise pour financer l’aventure. En cette ère d’avant les satellites, Donald Crowhurst se mit alors à envoyer des bulletins fantaisistes qui firent croire à sa famille et à son publiciste, Rodney Hallworth (David Thewliss, qui se vautre avec délice dans l’ignominie) qu’il faisait la course en tête.
Spectaculaires séquences maritimes
Sur un scénario de Scott Z. Burns, spécialiste en quêtes quichottesques et néanmoins britanniques (voir The Lost City of Z, de James Gray), James Marsh applique les recettes de la biographie filmée. Le cinéaste ne fait qu’esquisser le contraste entre une terre ferme qui découvre les joies de la société de consommation et de communication et l’océan qui offre à l’apprenti-héros une infinité de possibles.
Il préfère se reposer sur son interprète principal pour imposer une version sympathique et pitoyable de Donald Crowhurst, rêveur contraint au mensonge et à l’autodestruction par des circonstances hors de son contrôle. Ainsi présenté, entre reconstitution historique soignée et spectaculaires séquences maritimes, le film manque de la folie que l’on devine au centre de cette histoire.
LE JOUR DE MON RETOUR – Bande-annonce Officielle VOSTF - Colin Firth / Rachel Weisz (2018)
Durée : 01:36
Film britannique de James Marsh. Avec Colin Firth, Rachel Weisz, David Thewliss (1 h 41). Sur le Web : www.facebook.com/STUDIOCANAL.FRANCE et www.studiocanal.com/fr