L’ex-espion russe a été victime d’une attaque par un agent innervant, selon la police britannique
L’ex-espion russe a été victime d’une attaque par un agent innervant, selon la police britannique
Le Monde.fr avec AFP
Sergueï Skripal, ancien espion russe recruté par les services secrets britanniques, et sa fille Youlia ont été victimes dimanche 4 mars d’une attaque par une substance chimique qui agit sur le système nerveux.
Sergeï Skripal à Moscou, au moment de son procès, le 9 août 2006. / REUTERS TV / REUTERS
L’ex-agent double russe Sergueï Skripal et sa fille Youlia ont été victimes d’une « tentative de meurtre par l’administration d’un agent innervant », a déclaré mercredi 7 mars le chef de la police antiterroriste britannique, Mark Rowley, devant la presse à Londres, sans préciser de quel agent il s’agit.
Sergueï Skripal, 66 ans, et fille Youlia, 33 ans, avaient été retrouvés le dimanche précédent inconscients et sans blessure visible, sur un banc d’un centre commercial à Salisbury (sud de l’Angleterre), où réside l’ex-officier des services de renseignement militaire russes. Ils sont depuis hospitalisés dans un état critique. « Ils ont été visés spécifiquement », a souligné M. Rowley, précisant que l’affaire était traitée comme « un incident majeur ».
Un officier de police, « l’un des premiers à arriver sur les lieux de l’incident, est aussi dans un état grave à l’hôpital », a-t-il précisé.
Un agent innervant est une substance chimique qui agit sur le système nerveux. Ces agents pénètrent l’organisme par inhalation ou à travers la peau pour l’agent VX. Les symptômes incluent des brûlures aux yeux, des douleurs, de la toux et des difficultés à respirer et peuvent rapidement évoluer vers un évanouissement ou des convulsions, voire la mort.
« Nous ne pensons pas qu’il y ait le moindre risque pour la population », a ajouté le chef de l’antiterrorisme, appelant tout témoin à se manifester.
Sergueï Skripal, ex-agent double russe condamné en 2006
Sergueï Skripal avait connu une longue carrière au sein du GRU, les services de renseignements de l’armée russe, jusqu’à en devenir colonel. Sa position privilégiée avait attiré l’attention des services de renseignements britanniques, qui l’avaient recruté à partir de 1995, selon ses déclarations à la justice russe.
A partir de cette date, et jusqu’à son arrestation, en 2004, il avait fourni l’identité de plusieurs dizaines d’agents secrets russes opérant en Europe, des informations concernant les unités militaires russes ainsi que leur état de préparation au combat. En échange, il aurait reçu 100 000 dollars, perçus par un compte bancaire en Espagne.
Lors de son procès, M. Skripal avait reconnu sa culpabilité. Il avait été condamné en août 2006 à treize ans de camp et son titre de colonel lui avait été retiré. En 2010, il avait fait l’objet d’un échange d’espions entre Moscou d’une part, Londres et Washington d’autre part, et s’était installé en Angleterre.
Londres envisage un boycottage de la Coupe du monde de football
Sur le plan diplomatique, l’affaire Skripal a provoqué des remous entre Londres et Moscou. Bien que la police antiterroriste ait affirmé étudier toutes les pistes, le ministre des affaires étrangères, Boris Johnson, a accusé Moscou dès mardi.
Devant les députés, il a estimé que cette affaire faisait écho à l’empoisonnement au polonium-210 d’Alexandre Litvinenko, un ancien agent des services secrets russes, à Londres en 2006. Une enquête britannique avait mis en cause la responsabilité de Moscou.
« Si l’enquête démontre la responsabilité d’un Etat, le gouvernement répondra de façon appropriée et ferme », a prévenu M. Johnson devant les députés, avant de qualifier la Russie de « force néfaste et perturbatrice dans bien des aspects ».
La première ministre britannique, Theresa May, a déclaré que son gouvernement pourrait considérer un éventuel boycottage diplomatique de la prochaine Coupe du monde de football qui aura lieu en juillet 2018 en Russie.
« Cette histoire a dès le début commencé à être utilisée pour doper la campagne antirusse dans les médias », a dénoncé de son côté la porte-parole du ministère russe des affaires étrangères, Maria Zakharova. « Cette histoire va finir comme d’habitude : d’abord, des accusations sans fondement, puis ils garderont leurs secrets et ni les journalistes, ni la population, ni les politiques ne sauront ce qui s’est réellement passé », a-t-elle affirmé.