Université Toulouse-II : le ministère dissout le conseil d’administration
Université Toulouse-II : le ministère dissout le conseil d’administration
Le Monde.fr avec AFP
Le gouvernement a convoqué de nouvelles élections et a nommé un administrateur provisoire. Les syndicats du personnel et des étudiants s’inquiètent d’une mise sous tutelle inédite et « brutale ».
Assemblée générale à l’université Toulouse Jean-Jaurés, le 19 mars. / Ben Art'core via Campus
Frédérique Vidal a dissous, mardi 20 mars, l’ensemble des conseils de l’université Toulouse Jean-Jaurès (sciences humaines), après qu’une réunion du conseil d’administration « n’a pu se tenir dans ces conditions normales, et ce, pour la cinquième fois consécutive ». « L’ensemble des organes statutaires de l’université sont ainsi, depuis plusieurs mois, dans l’impossibilité de se réunir et de délibérer. Il en résulte des perturbations graves et durables du fonctionnement pédagogique et administratif de l’établissement », poursuit le ministère. Il rappelle que le budget de l’université pour 2018 n’a pu « ni être examiné, ni être adopté » et juge « la capacité de l’établissement à garantir notamment le paiement des traitements des agents désormais directement mis en cause ».
La dissolution du conseil d’administration et des autres instances législatives de l’université « permettra la tenue d’élections » dans un délai de trois mois, et ainsi à la communauté universitaire de « se prononcer à nouveau » sur un projet d’établissement. D’ici là, le ministère a désigné Richard Laganier, professeur et ancien président de l’université de Guyane, pour assurer l’administration provisoire de l’université, jusque-là présidée par Daniel Lacroix, élu en 2016.
Projet de fusion d’établissements contesté
La décision de la ministre est annoncée après plusieurs mois de divisions sur un rapprochement avec l’université Paul-Sabatier (Sciences) et deux écoles d’ingénieurs, l’INSA (Institut national des sciences appliquées) et l’INP (Institut national polytechnique), rapprochement destiné à obtenir le label Initiatives d’excellence (IDEX) et les financements supplémentaires qui en découlent.
Lors d’un conseil d’administration à Jean-Jaurès le 12 décembre, la moitié des membres avaient voté en faveur du projet, l’autre moitié contre. Le président de l’université avait alors fait jouer sa voix prépondérante pour valider le rapprochement. Cette décision avait suscité l’incompréhension, alors que lors d’un vote consultatif, 53 % du personnel et 15 % des étudiants participants (soit un taux de participation deux fois supérieur à celui habituellement constaté lors des élections étudiantes) s’étaient clairement prononcés contre ce projet.
« Décision brutale » du ministère
S’en sont ensuivies une grève de certains membres du personnel administratif et quelques journées de blocage votées lors d’assemblées générales étudiantes, tout à la fois pour protester contre le rapprochement et pour s’associer aux mobilisations nationales contre la réforme de l’accès aux études supérieures. A la mi-février, la direction comme les étudiants disaient au Monde que les examens du premier semestre s’étaient déroulés comme prévu. « Environ 80 % des cours ont pu se tenir, il y a eu des ajustements en fonction de l’organisation des salles. Mais, en règle générale, l’accès aux cours n’a été empêché que lors des grosses journées de mobilisation », confirmait le président de l’université. Un blocage continu a été décidé par les étudiants le 7 mars, et se poursuit depuis.
La dissolution annoncée par le ministère « nous engage dans un processus extrêmement lourd et nous laisse dans une grande incertitude », regrette le Snesup, tandis qu’une intersyndicale, dont font partie les syndicats UNEF et Solidaires Etudiants, s’est « indignée de (cette) décision brutale », « sans précédent dans l’histoire des universités ». Elle dit craindre « une intervention des forces de l’ordre » pour évacuer les amphithéâtres occupés, alors que la situation « est calme, comme elle l’a toujours été ». Le 6 mars, une salle de cours avait été évacuée à l’université de Bordeaux, dans des conditions dénoncées par les étudiants qui l’occupaient.