En Russie, Macron veut « avancer » avec Poutine malgré les « incompréhensions »
En Russie, Macron veut « avancer » avec Poutine malgré les « incompréhensions »
Le Monde.fr avec AFP
Le président français est arrivé jeudi à Saint-Pétersbourg pour une visite de deux jours. Il a évoqué avec son homologue russe le nucléaire iranien, la Syrie et l’Ukraine.
Vladimir Poutine accueille Emmanuel Macron sur la terrasse du Palais de Constantin à une vingtaine de kilomètres de Saint-Pétersbourg, en Russie, jeudi 24 mai. / JEAN CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH POLITICS POUR LE MONDE
Malgré les « incompréhensions » accumulées, Emmanuel Macron a assuré jeudi 24 mai à Vladimir Poutine vouloir « avancer » avec lui aussi bien sur le nucléaire iranien, la Syrie et l’Ukraine, tout en appelant le président russe à la « responsabilité » liée à son « rôle renforcé » sur la scène internationale.
Un an après leur premier tête-à-tête à Versailles, les deux chefs d’Etat se sont entretenus pendant plus de trois heures sous les ors du Palais Constantin, en périphérie de Saint-Pétersbourg, où Vladimir Poutine a accueilli le couple Macron sur des terrasses surplombant le Golfe de Finlande.
Lors de leur conférence de presse commune, Emmanuel Macron a loué un « dialogue extrêmement direct et franc ». « Je suis très lucide sur les incompréhensions qui ont pu exister et s’installer entre nous, une part, même l’essentiel ne nous est pas imputable mais elles sont là », a déclaré Emmanuel Macron. « J’attends de la Russie qu’elle respecte notre souveraineté et celle de nos partenaires européens », a-t-il lancé, sans préciser à quoi il faisait référence.
Mais « je souhaite que nous puissions avancer ensemble », a-t-il souligné, en plaidant pour un « dialogue constructif constant » avec la Russie, promettant de revenir pour le Mondial 2018 de football si la France « passe les quarts de finale ».
« Ambiance très ouverte »
« La France est notre partenaire traditionnel, nous tenons à nos relations et maintenons un dialogue politique très intense », a relevé de son côté Vladimir Poutine, estimant que les pourparlers s’étaient déroulés « dans une ambiance très ouverte et ont été très utiles ».
Prévue sur deux jours, la première visite d’Emmanuel Macron en Russie intervient à l’occasion du Forum international économique de Saint-Pétersbourg, principal rendez-vous des milieux d’affaires russes où il doit intervenir vendredi avec M. Poutine et le premier ministre japonais Shinzo Abe.
Elle doit permettre au président français, flanqué d’une imposante délégation d’hommes d’affaires, de montrer sa volonté de continuer à faire du commerce avec la Russie malgré des relations très tendues, telle l’entrée de Total dans un nouveau projet gazier dans l’Arctique russe pour 2,5 milliards de dollars. Mais aussi de ne pas éviter les sujets qui fâchent.
Parmi eux figurent depuis des années la crise ukrainienne et le conflit syrien, mais aussi plus récemment, l’empoisonnement en mars d’un ex-espion russe en Angleterre qui a provoqué une vague d’expulsions de diplomates.
Emmanuel Macron, qui doit rencontrer vendredi des représentants de la société civile russe, a assuré avoir évoqué avec son homologue les cas du réalisateur russe Kirill Serebrennikov, assigné à résidence, et du réalisateur ukrainien emprisonné Oleg Sentsov.
« Compléter » l’accord sur le nucléaire iranien
Dans un contexte difficile, les dirigeants ont insisté sur les points qui les rapprochent face aux Etats-Unis et ont affirmé leur détermination à préserver l’accord sur le nucléaire iranien signé en 2015.
Ils ont cherché à rapprocher leurs positions, la France en étant d’accord pour le « compléter » sans envisager un nouvel accord. Vladimir Poutine a réaffirmé sa détermination à s’en tenir à l’accord tout en se disant prêt à discuter indépendamment des trois questions soulevées par les Européens : la non-prolifération après 2025, les armes balistiques iraniennes et l’activité de Téhéran au Moyen-Orient.
Sur la Syrie, où le soutien russe a permis au régime de Bachar Al-Assad de reprendre la main, la volonté est de débloquer les négociations en rapprochant, par la mise en place d’un mécanisme de coordination, les deux formats concurrents : celui d’Astana, mené par la Russie avec l’Iran et la Turquie et celui dit du « small group » qui comprend des pays occidentaux comme les Etats-Unis, la France ou le Royaume Uni, et l’Arabie saoudite.
« Dialogue » plutôt que « confrontation »
Les deux dirigeants ont affiché leur unité sur la nécessité de poursuivre les efforts sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne, après l’annulation jeudi par Washington d’une rencontre très attendue entre Donald Trump et le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un.
Plus généralement, M. Macron a dit « respecter le rôle renforcé que la Russie se donne dans son environnement régional et dans le monde au particulier au Moyen-Orient », mais ajouté. « Avec ce rôle retrouvé vient aussi davantage de responsabilité ».
Citant les cyberattaques dont les Occidentaux accusent souvent Moscou, les deux présidents ont dit vouloir établir des « règles communes » et « échanger des informations ».
Sur l’Ukraine, MM. Macron et Poutine ont également appelé à la poursuite des efforts politiques en vue d’un « règlement pacifique » alors que les combats opposant depuis quatre ans gouvernement pro-occidental et rebelles prorusses ont fait 10 000 morts depuis 2014.
« Un dialogue, c’est toujours mieux qu’une confrontation », a souligné M. Poutine, alors que les Occidentaux accusent Moscou d’intervenir militairement dans ce conflit en soutien aux rebelles prorusses, ce que la Russie dément.