Les lauréats du premier « concours de start-up des territoires ruraux » organisé à Agen du 22 au 24 juin 2018. / Campus Numérique 47

Valoriser des projets entrepreneuriaux et numériques et accompagner la création de start-up, tel est l’objectif du concours des territoires ruraux qui était organisé par le Campus numérique 47, à Agen (Lot-et-Garonne), du 22 au 24 juin, événement dont Le Monde est partenaire. Il est réalisé sous la forme d’un incubateur éphémère de trois jours. Les candidats sont accompagnés par d’autres entrepreneurs et des experts métiers.

Le Lavoir pour les territoires ruraux

« Vendredi matin, c’était une idée, et dimanche soir, c’est une réussite » : Patrice Labrousse, Lot-et-Garonnais de 36 ans, savoure. Il est le premier lauréat de ce concours. Directeur délégué des formations dans un lycée professionnel de Villeneuve-sur-Lot, le jeune homme a vu son projet, appelé « Le Lavoir », arriver en tête des récompenses décernées par le jury. Il pourra, comme les autres lauréats, installer son projet à partir de la rentrée dans les locaux de l’ancienne école normale d’Agen, en cours de rénovation pour devenir un campus numérique.

Son idée, il l’a trouvée à force de faire la corvée de lessive à la maison. Il l’aurait bien sous-traitée, mais il n’existe pas, dans les territoires ruraux, de solution pour faire laver son linge. Il s’est donc posé la question d’un service de pressing passant par une application numérique. Quand cet ancien enseignant en mécanique, passionné de sport automobile, s’est lancé, voici quelques semaines, il n’avait pourtant « aucune » compétence dans ce secteur, dit-il.

Mais il a appuyé sur l’accélérateur pour combler son retard et constituer le dossier de présélection. Il a apprécié le soutien reçu pendant le concours : « J’ai beaucoup appris après ces trois jours. Des coachs très compétents et très à l’écoute m’ont aidé à formaliser mon idée d’une application Web simple qui permet de prendre en charge le lavage et le repassage de votre linge personnel du quotidien, plutôt en secteur rural, et de recréer un lien social autour du linge. »

Patrice Labrousse (à gauche), futur premier lauréat du « concours de start-up des territoires ruraux » à Agen, pendant les épreuves en juin 2018.

Les futurs « lavandiers » et « lavandières » pourraient ainsi recevoir un complément de revenus : Patrice Labrousse prévoit une plate-forme de paiement pouvant intégrer le paiement en chèque emploi service. Dès cet été, il se lancera dans le projet pour pouvoir « démarrer vraiment en septembre, avec l’installation dans l’incubateur du Campus numérique 47 ».

  • Une box pour terrasses et jardins

Concepteur et coach paysagiste qui propose des prestations d’aménagement de terrasses et de jardins, Florian Préault, 30 ans, fait preuve du même enthousiasme, après avoir reçu le deuxième prix du jury. L’entrée dans le nouvel de start-up est « la meilleure chose qui pouvait m’arriver » : « Cela va me permettre d’acquérir les connaissances que je n’avais pas en marketing, en commerce ou en outils numériques, en accédant à des profils et des compétences complémentaires des miennes », assure-t-il.

Titulaire d’une licence professionnelle d’infographie paysagère obtenue à l’Ecole supérieure d’agriculture d’Angers, il s’était d’abord lancé à Paris, comme coach paysagiste, en autoentrepreneur. Avant d’opter pour un changement de vie en famille, en mettant le cap sur le Sud-Ouest. « On voulait changer de rythme de vie. Agen me permet de me développer sur Bordeaux et Toulouse et de rester actif à Paris », explique-t-il.

Coach paysagiste, Florian Préault a remporté le deuxième prix du concours de start-up des territoires ruraux 2018 du Campus numérique 47 à Agen avec son Extérieur Creative Box. / Florian Préault

Le jeune homme a déjà lancé son projet, un coffret cadeau consacré aux espaces extérieurs, l’Extérieur Creative Box. Il permet d’offrir une consultation de coach paysagiste ou l’étude d’un projet d’aménagement d’une terrasse, d’un jardin… Cette boîte est disponible sur Internet, mais il voudrait aussi la proposer dans des jardineries, les fleuristes ou les paysagistes. « L’idée, explique-t-il, c’est d’accompagner le client qui revient chez lui avec ses plantes, mais qui, une fois arrivé à domicile, n’est pas sûr de certains choix ou se demande comment faire. »

Développée à partir de son activité personnelle, en autofinancement, son offre de box n’en est encore qu’à ses débuts : « A mesure que l’activité va se développer pour l’instant, seules quelques personnes l’ont vu sur mon site Web et je peux assurer la prestation dans le Sud-Ouest et à Paris , je constituerai un réseau de concepteurs paysagistes qui pourront intervenir ailleurs sur le territoire », explique Florian Préault.

« Ils doivent répondre à un cahier des charges et partager les mêmes valeurs pour assurer des prestations conformes au concept. J’ai déjà des contacts qui sont dans les starting-blocks », ajoute-t-il. Il a déjà commencé à se faire connaître, notamment à l’occasion d’un reportage du magazine de France 5, « Silence, ça pousse ! », en 2016, où il expliquait l’art de rénover à moindre coût un jardin pour valoriser une maison lors de sa revente.

  • Des huîtres de tout le territoire

Défendu également par une Agenaise d’adoption, le projet de vente en ligne d’huîtres « La Bourriche » occupe la troisième marche du podium. Une bonne nouvelle pour Marina Astié, 28 ans, ingénieure agronome qui voulait « créer sa boîte » après avoir travaillé cinq ans dans le marketing de produits phytosanitaires, une expérience professionnelle qui l’avait conduite à quitter la Seine-et-Marne pour s’installer à Agen.

La passion pour les huîtres l’a prise il y a trois ans : elle en achète régulièrement sur le marché à un producteur d’Oléron. La piste lui a semblé porteuse. « J’adore aussi le vin pour tout ce qu’il y a derrière : le travail des hommes passionnés et l’expérience sensorielle très riche. Mais le secteur est déjà saturé. Pour les huîtres, il y a beaucoup de possibilités pour raconter des choses, être dans l’accompagnement, offrir des conseils autour de la vente », explique la jeune femme.

Marina Astié, ingénieure agronome, a vu son projet de vente d’huîtres en ligne récompensé à l’issue des ateliers, au concours des start-up des territoires ruraux du Campus numérique 47 d’Agen. / Campus Numérique 47

Marina Astié escompte négocier, par les volumes générés, des coûts de transport inférieurs à ceux consentis aux ostréiculteurs, qui ont déjà leur propre boutique en ligne. Il existe quelques sites Internet de produits frais ou d’huîtres, mais elle pense pouvoir trouver sa place en proposant des huîtres de toutes les régions productrices, pour avoir différents goûts et des textures variées, afin de « faire découvrir les huîtres à ceux qui ne les connaissent pas, les faire connaître d’une autre manière à ceux qui les connaissent déjà et accompagner le choix et la dégustation des huîtres ».

Le site proposera une vente et une livraison directe du producteur au consommateur, garantie fraîche. Le nom « La Bourriche » étant déjà déposé, il reste à en inventer un pour le site, et beaucoup de travail en perspective. Le programme pour l’été est déjà bien rempli : « D’ici, je peux aller dans la journée au bassin d’Arcachon ou à l’étang de Thau. Pour la Bretagne ou la Normandie, ce sera un peu plus long… », explique-t-elle.

  • Le partage de loisirs, dans l’entreprise, avec Hubee

Enfin, le jury a décerné un prix coup de cœur à un projet d’application numérique permettant aux salariés d’une même entreprise de partager leurs hobbys et leurs passions : Hubee, présenté par une équipe intergénérationnelle de cinq personnes.

« Tout cela nous arrive de façon extrêmement rapide. Nous avons commencé à travailler à ce projet il y a à peine un mois. C’était une proposition, une idée, et on voulait voir où ça nous menait. Cela a été une énorme surprise de voir à quel point elle plaisait, et qu’elle répondait aussi à une attente du marché », explique l’une des porteurs du projet, Marie-Laure Brame-Jézéquel. Forte de trente ans d’expérience professionnelle en informatique, cette Orléanaise veut concevoir une application qui s’adresse à toutes les générations de l’entreprise « pour leur permettre de partager leurs passions et leurs talents et être un vecteur de lien social ».

L’outil, relié à une page Web, « doit amener les personnes de 45 à 60 ans à adopter le digital sans que ce soit trop compliqué ou rébarbatif ». D’ici l’installation d’un premier membre de l’équipe dans l’incubateur du Campus numérique 47, à Agen, à la mi-septembre, Hubee veut avoir créé son premier produit test. Le concours passé, les lauréats se sont déjà lancés dans un nouveau marathon.