Etienne Daho enthousiasme le festival Days-off
Etienne Daho enthousiasme le festival Days-off
Par Stéphane Davet
Pour son début de tournée, le chanteur propose une belle relecture de ses mélodies à travers le prisme de ses racines rock.
Etienne Daho en 2015 aux Francofolies de La Rochelle. / XAVIER LEOTY / AFP
Sirènes d’alerte et rougeoiements de braise posent l’ambiance, avant qu’Etienne Daho et ses cinq musiciens fassent résonner, dans cette pénombre guerrière, le maelström de (trois) guitares, le martèlement de basse et la batterie tribale portant l’envoûtante cavalcade de Les Filles du canyon, titre d’introduction de Blitz, son onzième album (sorti le 17 novembre 2017), et du sixième concert du Blitz Summer Tour, donné le 7 juillet, à la Philharmonie de Paris, dans le cadre du festival Days-Off.
Sans doute parce que ces premières dates cherchent d’abord à capter le large public des rassemblements estivaux, seuls quatre titres de ce fascinant dernier opus figurent, pour l’instant, au répertoire de ce début de tournée. Cela n’empêche pas ce disque de donner le ton de tout le concert, en relisant les chansons passées à travers le prisme des racines rock du dandy rennais.
Car une des spécificités de Blitz est de nous rappeler que l’icône pop française a aussi été un enfant du rock. On avait eu tendance à l’oublier tant le chanteur avait cherché à fuir, au début des années 1980, les œillères du purisme électrique pour modeler un style se moquant des frontières.
Modèle de la légèreté pop synthétique des « eighties », Le Grand sommeil se pare aujourd’hui d’arpèges « sixties » et d’une batterie dont la résonance évoque les hits de Phil Spector, producteur dont les « girls group » et le « mur du son » figurent parmi les références majeures de Blitz. Tirées elles-aussi de son second album, La Notte La Notte (1984), des chansons comme Sortir ce soir ou Poppy Gene Tierney (plus jouée en concert depuis trois décennies) se zèbrent d’une intensité post-punk.
De fins néons et des éclairages à dominante crépusculaire
Si, lors de précédentes tournées, Daho avait parfois durci son vieux répertoire d’une énergie rock, jamais il n’avait autant plongé ses mélodies dans l’élégance millésimée de ses passions pour la pop des années 1960, le psychédélisme de Syd Barrett ou les tourneries hypnotiques et guitares venimeuses du Velvet Underground et de ses héritiers (Jesus and Mary Chain, My Bloody Valentine…).
Encadrés d’un périmètre de fins néons, baignant dans des éclairages à dominante crépusculaire, de vieux complices comme le batteur Philippe Entressangle, le bassiste Marcelo Giuliani, les guitaristes François Poggio et Mako, et le claviériste-guitariste Jean-Louis Pierot s’adaptent avec une impressionnante cohésion (à l’exception d’un approximatif Epaule Tatoo) à cette esthétique imprégnée des vapeurs enivrantes de Blitz.
Le groupe peut s’emballer avec entrain -Tombé pour la France, Bleu comme toi (au piano étrangement springsteenien) -, ou creuser des vertiges plus sombres - Réévolution, L’invitation, Des attractions désastres - fusionnant avec la voix d’un Daho souvent mixé façon rock anglais (au même niveau que les instruments) plus que mise en avant façon « chanson française ».
Le parti pris pourrait être frustrant s’il était systématique, mais le chanteur, habillé d’un polo noir laissant deviner une carrure athlétique, sait affirmer à propos sa sensualité vocale et une présence fraternelle entretenant, depuis plus de 30 ans, un rapport affectif immuable avec son public.
« Week-end à Rome », ralenti à la façon d’un vieux slow de la Motown
On se reconnaît dans ses danses, mains en avant semblant caresser ses fans, dans son petit déhanché d’éternel ado. On est touché quand il ouvre son cœur dans le dépouillement vibrant d’un Week-end à Rome, ralenti à la façon d’un vieux slow de la Motown (fondu-enchaîné avec le récent Les Flocons de l’été), dans les miroitements d’une reprise de Gainsbourg, Comme un boomerang, dédié à son interprète originelle, Dani (présente dans la salle, comme Lou Doillon, Emmanuelle Seigner ou la cinéaste Tonie Marshall) ou le romantisme préservé de classiques comme Ouverture ou Le premier jour (du reste de ta vie).
Avant de terminer, en anglais, avec un inédit, Summertime, signé Pierre Emery (leader du groupe Ultra-Orange, fasciné lui aussi par la mythologie du Velvet et des Stooges), Daho a joué en rappel un quatrième titre, Après le Blitz, de son dernier opus. La réussite live de ce morceau de bravoure disco-rock dansant, « léger face au danger », au rythme des tourments du monde, l’incitera, espérons-le, à inclure plus de titres de cet album audacieux dans la seconde partie d’une tournée qui passera, entre autres, à l’Olympia du 27 novembre au 2 décembre.
Concerts : Le 19 juillet, à Arles, festival Les Escales du cargo ; le 20, au Midi festival, à Hyères ; le 22, à Biarritz en été ; le 27, aux Escales de Saint-Nazaire ; le 1er août, au Monte Carlo Sporting Summer Festival, à Monaco ; le 11, au festival d’Erbalunga, à Brando ; le 17, à La Route du Rock, à Saint-Malo.