On a testé… la ruche connectée
On a testé... la ruche connectée
Par Jean-Michel Normand
Le boîtier B-Keep permet à l’apiculteur de « lire » l’activité de son essaim.
Le boîtier à installer. / J.-M. Normand / Le Monde
C’est le fantasme de tout apiculteur : comprendre de l’intérieur ce qui se trame au cœur de sa ruche. La start-up française Hostabee propose de le satisfaire avec son module B-Keep, commercialisé depuis le printemps. Intercalé entre deux cadres de cire, ce petit appareil (7 × 8,5 × 1,2 cm) qui tient dans la paume de la main mesure la température et l’humidité qui règnent dans la ruche. Deux données qu’il compare à la température et l’humidité externes obtenues auprès de la station météo la plus proche. La transmission des données s’effectue via la technologie de communication bas débit de l’Internet des objets et l’apiculteur consulte les relevés – transmis environ toutes les deux heures – sur smartphone, ordinateur ou tablette. Leur interprétation doit permettre de réduire le nombre d’ouvertures de la ruche, opérations qui dérangent l’essaim, ou, au contraire, inciter à intervenir d’urgence si la survie de la colonie risque d’être menacée.
Hostabee diffuse son module B-Keep au prix de 96 euros. A partir de la deuxième année, un abonnement de 3 euros par mois est prélevé.
50 000 abeilles espionnées – Nous avons introduit le capteur-espion B-Keep le 26 avril dans une ruche du Loiret, en plein Gâtinais, où venait d’être installé un jeune essaim sur six cadres en provenance d’un apiculteur de l’Yonne. Après plusieurs tests, la pose d’un répéteur a été nécessaire pour amplifier le signal et assurer sa parfaite réception. Sur l’application Hostabee, deux diagrammes s’affichent (avec la possibilité de zoomer sur une journée ou de considérer une séquence plus longue mais aussi d’écrire des notes). L’un mesure la température (interne et externe) et l’autre l’humidité (interne et externe).
Nous plaçons d’abord B-Keep dans le corps de ruche, c’est-à-dire la partie basse, là où pond la reine, où se développe le couvain – les larves – et se stockent réserves de miel et de pollen. Les nouvelles sont rassurantes : malgré les fortes variations de la température extérieure, les abeilles stabilisent la température du couvain autour de 30-35 degrés en permanence. La période des miellées étant bien engagée, nous décidons rapidement de placer le capteur à l’intérieur de la hausse, c’est-à-dire la partie supérieure (amovible) de la ruche où l’apiculteur prélève sa part du miel produit par les 50 à 70 000 abeilles qui, à cette époque de l’année, vivent dans la ruche.
jmn/Le Monde
Le diagramme ci-dessus indique une progression de la température et son maintien à un niveau comparable à celui d’un corps de ruche. C’est le signe que beaucoup d’abeilles se trouvent dans la hausse, où le module a été placé, occupées à produire du miel (à l’extérieur, les acacias sont en fleurs). Hors période de récolte (grosso modo, entre mai et juillet), les variations de la température fournissent des indications sur le rythme de ponte de la reine. Surtout, en période de froid, elles donnent de précieuses indications sur la capacité de l’essaim, alors rassemblé en une grappe, à affronter les frimas. En cas de baisse durable de la température interne au-dessous de 30 degrés, il faudra apporter des réserves de nourriture (pain de candi, eau sucrée).
Pour l’heure, c’est le printemps et le diagramme est rassurant. Il laisse entrevoir une forte activité dans la ruche. En plus, l’absence de variations trop brusques sur plusieurs jours permet d’exclure le risque d’essaimage.
jmn/LeMonde
Ce second diagramme témoigne d’une baisse régulière du taux d’humidité interne, presque indépendamment de l’humidité extérieure. Encore un message codé qui signifie que les abeilles commencent à refermer (operculer) les alvéoles de miel avec un bouchon de cire. Le nectar n’est en effet transformé en miel que lorsque son taux d’humidité interne est abaissé à 14 %. Une fois l’opération terminée, l’humidité ambiante décline. Connaître l’hygrométrie dans une ruche est surtout important l’hiver. On mesure ainsi le risque de voir les abeilles – qui gèrent plus facilement le froid que l’excès d’eau – exposées aux nombreuses maladies provoquées par l’humidité. Au mois de mai, l’humidité est le signal d’une forte activité et son lent déclin confirme que l’on peut envisager une récolte… comme nous avons pu le vérifier dans la vidéo ci-dessous.
Où se trouve le capteur dans une ruche ?
Durée : 02:35
Précis et ludique – L’intérêt du système Hostabee est de fournir des informations complémentaires, plus faciles à interpréter que celles fournies par les ruches connectées montées sur une balance, beaucoup plus chères. En deux mois, les « intuitions » de B-Keep se sont révélées fondées et les données transmises avec régularité. Avouons aussi que la diffusion de ces bulletins a quelque chose d’assez excitant pour l’apiculteur, toujours curieux de savoir ce qui se passe dans sa ruche. Dernière précision ; le sens des données recueillies dépend de l’endroit où est inséré le module. En hiver, il faudra le placer bien au milieu d’un cadre central, sachant toutefois que l’on ne pourra pas avoir l’assurance que la grappe hivernale des abeilles se trouve en permanence à proximité immédiate.
Le B-Keep est pour vous, si :
- Vous voulez suivre la vie de vos abeilles en « direct-live » ;
- Vous ne pouvez pas être assez présent dans votre rucher.
Le B-Keep n’est pas pour vous :
- Vous êtes apiculteur depuis sept générations ;
- Vous n’êtes pas convaincu par son rapport coût-efficacité.