L’ambassadrice de France au Mali rappelée prématurément
L’ambassadrice de France au Mali rappelée prématurément
Par Cyril Bensimon
Selon les informations du « Monde Afrique », Evelyne Decorps devrait être remplacée par Joël Meyer, actuellement en poste en Mauritanie.
L’ambassadrice française Evelyne Decorps et le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, à Bamako, le 1er août 2017. / SOULEYMANE AG ANARA / AFP
Grand remue-ménage post-électoral à l’ambassade de France au Mali. Alors que les nominations se font en théorie pour trois ans, l’ambassadrice Evelyne Decorps a été, selon les informations du Monde Afrique, rappelée à Paris après seulement deux années passées à Bamako. La décision a été prise au début de l’été, mais la diplomate a été maintenue en fonction pour assurer le suivi du processus électoral ayant abouti à la réélection, contestée par l’opposition, du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) en août. Son retour en France devrait intervenir courant septembre.
Faut-il voir dans ce rappel une victoire du chef de l’Etat malien, avec qui les relations ont parfois été difficiles ? Pas forcément. Selon nos informations, la mesure a été prise à Paris dans l’optique, dit-on, « d’incarner un nouveau départ, une nouvelle volonté française au moment où IBK entame un nouveau mandat ». En somme, une « nouvelle narration » – un concept cher à Emmanuel Macron –, quand le président français espère obtenir des résultats rapides au Mali alors que l’accord de paix signé en 2015 peine à être appliqué, que les groupes djihadistes démontrent quasi quotidiennement leur résilience et que l’analyse d’un enlisement des soldats français de l’opération « Barkhane » se renforce.
Siège éjectable
Depuis six mois environ, des rumeurs circulaient à Bamako sur le remplacement de Mme Decorps, bien moins en phase avec la présidence malienne que ne l’était son prédécesseur, Gilles Huberson. Si son travail est salué par ses collègues – certains n’hésitant pas à parler d’un rappel « dégueulasse alors que rien ne pouvait lui être reproché » –, l’ambassadrice aurait aussi eu quelques frictions avec des officiers français. Ont-ils milité pour son départ avant d’entamer « un automne mouvementé », comme cela se murmure au Mali ? La question reste entière.
Personnalité élégante et subtile, tout à la fois franche en privé et mesurée en public, Evelyne Decorps avait occupé entre 2013 et 2016 les fonctions d’ambassadrice au Tchad, un autre poste stratégique au Sahel, où les questions militaires et diplomatiques sont étroitement liées – N’Djamena abritant notamment le poste de commandement pour les 4 500 soldats de l’opération « Barkhane ». Selon nos informations, Mme Decorps devrait être remplacée par Joël Meyer, l’actuel ambassadeur de France en Mauritanie. Afin que son départ ne soit pas interprété comme une sanction, de hautes fonctions dans l’administration publique lui ont été proposées pour la suite de sa carrière.
Quoi qu’il en soit, le fauteuil d’ambassadeur de France au Mali confirme son statut de siège éjectable. Des trois derniers titulaires, seul M. Huberson a été maintenu pendant trois ans. Son prédécesseur, Christian Rouyer, avait été débarqué en 2013 par Laurent Fabius, le ministre des affaires étrangères de l’époque, alors que le gros de l’offensive contre les groupes djihadistes qui occupaient le nord du pays venait à peine de s’achever. Paris pensait alors réduire très rapidement le nombre de ses soldats déployés dans la zone.