L’alerte du Haut Conseil des finances publiques sur le déficit structurel
L’alerte du Haut Conseil des finances publiques sur le déficit structurel
Par Benoît Floc'h
L’organisation estime que la France ne réduit toujours pas assez sa dette « à la différence de la quasi-totalité des pays européens ».
C’est un avis mi-figue, mi-raisin qu’a rendu, le 19 septembre, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) sur le projet de budget 2019 du gouvernement. L’instance indépendante, rattachée à la Cour des comptes, est chargée de s’assurer que les prévisions macroéconomiques du gouvernement sont réalistes et que son action en matière de retour à l’équilibre des finances publiques est cohérente avec les engagements européens de la France.
Pour ce qui est du projet de loi de finances pour l’année prochaine, le Haut Conseil considère que les données macroéconomiques sont globalement satisfaisantes. Ainsi, la progression du taux de croissance (que le gouvernement estime à 1,7 %) est « plausible ». Le Conseil note toutefois que « cette prévision est affectée d’un degré d’incertitude plus fort que les années précédentes. Comme évoqué précédemment, les risques portent essentiellement sur l’environnement international (montée des tensions commerciales, résultat des négociations sur le Brexit, situation de l’Italie, déséquilibres financiers en Chine, fragilité de plusieurs pays émergents…) ». De même, les prévisions d’inflation pour 2018 et 2019 sont « raisonnables » : respectivement 1,8 % et 1,4 %.
Même imprimatur pour l’évolution des prélèvements obligatoires, jugée « réaliste » par le HCFP, ou celle des dépenses publiques : le gouvernement prévoit une hausse de 0,6 % en 2019. « Le Haut Conseil estime que la prévision d’évolution des dépenses publiques, qui implique des efforts de maîtrise de la part de l’ensemble des administrations publiques, est atteignable. »
« Choix contestable »
Les choses se gâtent quand on aborde le déficit. Certes, le Haut Conseil considère que la prévision de déficit public nominal pour 2018 et 2019 (respectivement 2,6 et 2,8 points de PIB) est « plausible ». Mais, regrette-t-il, l’effort que le gouvernement promet sur le déficit structurel (c’est-à-dire hors conjoncture) est bien moins important que ce que prévoient les règles européennes. L’effort de la France devrait être de 0,5 point de produit intérieur brut (PIB) minimum, il ne sera que de 0,1 point en 2018 et de 0,3 point en 2019.
Par ailleurs, le HCFP a peu goûté le « choix contestable » qui a consisté à ne pas prendre en compte en tant qu’opération ponctuelle et temporaire l’augmentation, pourtant limitée à 2019, du cinquième acompte de l’impôt sur les sociétés. Cela permet au gouvernement d’enjoliver son effort structurel de 0,1 point. L’instance indépendante regrette également que la réduction du déficit public de la France soit aussi largement attribuable à la bonne tenue de la croissance. Le déficit structurel « reste à un niveau élevé », relève-t-elle. Et la France ne réduit pas encore la part de la dette dans la richesse nationale, « à la différence de la quasi-totalité des pays européens ».
Bref, le redressement des finances publiques manque de nerf en France, regrette le Haut Conseil. Cela limitera « significativement les marges de manœuvre » du pays si la croissance ralentit fortement, prévient le HCFP.