Contre l’avis des Etats-Unis, l’ONU attribue de nouveaux pouvoirs légaux aux Palestiniens
Contre l’avis des Etats-Unis, l’ONU attribue de nouveaux pouvoirs légaux aux Palestiniens
Le Monde.fr avec AFP
Cette résolution leur permettra notamment en 2019, lors de la présidence du Groupe des 77, de « faire des déclarations » et « de soulever des motions de procédure ».
Le nouveau rôle attribué aux Palestiniens n’a pas tardé à être vivement dénoncé par les Etats-Unis. Mardi 16 octobre, l’Assemblée générale des Nations unies (ONU) a décidé de leur octroyer des pouvoirs légaux supplémentaires afin qu’ils puissent exercer en 2019 la présidence du Groupe des 77. Une résolution en ce sens, présentée par l’Egypte, a été approuvée par 146 pays sur les 193 composant l’ONU. Trois pays ont voté contre – Etats-Unis, Israël et Australie –, quinze se sont abstenus, le reste ne s’étant pas déplacé pour le scrutin.
Au-delà de son enjeu juridique, ce texte est accompagné d’une grande symbolique alors que les Palestiniens, au statut d’observateurs à l’ONU, n’ont pas d’Etat et que l’administration de Donald Trump ne cesse de retarder la divulgation d’un plan de paix pour régler le conflit israélo-palestinien.
Le 27 septembre, en marge de l’Assemblée générale annuelle des Nations unies, « le Groupe des 77 et de la Chine » – qui comprend en réalité 134 pays – avait choisi la Palestine pour assumer en 2019 sa présidence tournante. Créé pour favoriser les intérêts économiques de ses membres, le G77 – plus grosse coalition d’Etats en développement au sein des Nations unies – est aujourd’hui une force de négociation de poids, notamment sur les questions budgétaires.
Une reconnaissance internationale pour les Palestiniens
La résolution contient une série de modalités « pour la participation de l’Etat de Palestine » aux différentes sessions et conférences internationales auxquelles participera le G77 l’année prochaine. Une annexe jointe cite, entre autres, « le droit de faire des déclarations au nom du Groupe des 77 et de la Chine », « le droit de se porter coauteur de propositions et d’amendements » et « le droit de soulever des motions de procédure ».
Le texte de la résolution rappelle que « l’Etat de Palestine » est déjà « partie à de nombreux instruments conclus sous les auspices de l’Organisation des Nations unies et qu’il est membre à part entière de plusieurs institutions spécialisées et organes de l’Organisation des Nations unies ».
Cette résolution donne aux Palestiniens « la capacité de parler, de parrainer des textes, des prérogatives qu’ils n’ont pas » comme observateurs, explique un diplomate sous couvert d’anonymat. Présider le G77 « permettra aux Palestiniens d’obtenir une reconnaissance internationale, montrera qu’ils sont un acteur international capable de parler d’autre chose que du conflit israélo-palestinien », ajoute ce diplomate.
Une « erreur » selon les Etats-Unis
Brouillés avec les Palestiniens depuis la reconnaissance il y a près d’un an de Jérusalem comme capitale d’Israël, les Etats-Unis ont exprimé leur vif désaccord avec le nouveau rôle dévolu à la Palestine. « Les Palestiniens ne sont pas un Etat membre de l’ONU, et pas un Etat du tout », a réagi sèchement dans un communiqué l’ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley.
« L’erreur de l’ONU aujourd’hui sape les espoirs d’une paix en alimentant l’illusion entretenue par certains dirigeants palestiniens qu’ils peuvent avancer vers leurs objectifs sans négociations de paix directes » avec les Israéliens, a-t-elle ajouté, jugeant que « le vote n’aidait en rien le peuple palestinien ».
« Ce vote montre le multilatéralisme sous son meilleur jour », a au contraire lancé devant l’Assemblée générale l’ambassadeur palestinien à l’ONU, Riyad Mansour. « Ce vote est une expression de respect à l’égard de la décision du G77 » de confier sa présidence aux Palestiniens, a-t-il estimé.
Lorsque, fin 2017, l’Assemblée générale de l’ONU avait été saisie d’une résolution condamnant la décision américaine de reconnaître unilatéralement Jérusalem comme capitale d’Israël, 128 pays sur 193 l’avaient approuvée. Neuf, dont les Etats-Unis, s’y étaient opposés. Sous forte pression américaine, 35 pays avaient choisi l’abstention et 21 la chaise vide. Fin septembre, le président palestinien Mahmoud Abbas, notant que « 183 pays » de l’ONU avaient « reconnu » l’Etat de Palestine, avait appelé « tous les pays du monde, et ceux qui ne l’ont pas fait, à effectuer cette reconnaissance ». Mardi, plusieurs pays européens dont le Royaume-Uni et l’Allemagne ont tenu à souligner que leur vote positif n’équivalait pas à une reconnaissance de la Palestine comme un Etat.