Hideto Iwaï, la ruée vers l’autre
Hideto Iwaï, la ruée vers l’autre
Par Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance)
Dans le cadre du Festival d’automne à Paris, l’ex-« hikikomori » donnera son premier spectacle en français. Revenu d’une période de réclusion volontaire, ce jeune metteur en scène a trouvé dans le théâtre matière à être « relié au monde extérieur ». A voir au T2G-Théâtre de Gennevilliers, du 22 novembre au 3 décembre.
Hideto Iwaï à Tokyo, en 2016. / TORU HIRAIWA
Comprendre l’autre et soi-même. Telle est la démarche d’Hideto Iwaï, acteur, auteur et metteur en scène de Wareware no moromoro (nos histoires…), sa première pièce en français, née de travaux réalisés lors d’ateliers à Gennevilliers. « J’aime vraiment interroger les gens et je veux continuer à le faire. Je veux partager leurs peurs et leurs intérêts, et ainsi écrire sur une variété de sujets », explique le natif de Tokyo aujourd’hui âgé de 44 ans, dont les créations restent très inspirées de son vécu d’« hikikomori » [expérience d’enfermement volontaire et de désintérêt pour le monde extérieur] entre 16 et 20 ans.
« La raison pour laquelle je suis resté à la maison n’était pas un cas habituel de maltraitance, mais un cas extrême de xénophobie, une peur des gens », expliquait-il, en 2011, dans un entretien accordé à la Fondation du Japon. Confronté à la violence paternelle dans sa jeunesse, il est lui-même agressif. L’intérêt pour la scène naît pendant cette réclusion. Les heures passées à regarder la télévision, notamment des programmes de catch, d’arts martiaux et des matchs de football italiens, font surgir une envie de faire des films.
Le déclic
Il reprend ses études pour intégrer l’université et suit en parallèle des cours d’art dramatique dans un centre culturel local, où l’a inscrit sa mère, conseillère psychologique l’ayant aidé à trouver ce qui pouvait le « relier au monde extérieur ». « J’ai participé à une comédie musicale avec un groupe de femmes dans la quarantaine et la cinquantaine. » Le déclic. « Quand j’ai commencé à faire du théâtre, j’ai découvert que, pour la première fois, grâce à la fiction, je pouvais sortir et apprendre ce que les gens pensaient. »
Il crée en 2003 sa propre compagnie, dont il est longtemps l’unique membre, se contentant de réunir ponctuellement des équipes, toujours réduites. Son nom : Hi-bye, une déclinaison des expressions hai-hai, qui qualifie un bébé qui rampe, et de bye-bye, « au revoir », comme une métaphore du cycle de la naissance à la mort.
Sa première pièce, Hikky Cancun Tornado, parle d’un jeune reclus qui aspire à devenir lutteur professionnel. S’enchaînent ensuite les créations et les collaborations. Il s’inspire entre autres d’Oriza Hirata – l’initiateur du « shizuka na gekijo » (théâtre du silence) − dont il intègre en 2007 la compagnie, Seinendan, pour travailler la mise en scène. Wareware no moromoro est sa seconde pièce présentée en France, après Le Hikikomori sort de chez lui, jouée en mars 2018.
Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec le Festival d’automne à Paris.