Eolien en mer : les professionnels déçus par les annonces du gouvernement
Eolien en mer : les professionnels déçus par les annonces du gouvernement
Par Nabil Wakim
La feuille de route énergétique annoncée par François de Rugy est très en deçà de ce qu’attendait le secteur.
Le premier ministre Edouard Philippe et le ministre de la transition écologique François de Rugy, le 27 novembre à l’Elysée. / Jean-Claude Coutausse / French-Politics pour «Le Monde»
L’éolien en mer va-t-il enfin prendre son envol ? L’annonce, mardi 27 novembre, de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) a déçu les professionnels du secteur, qui espéraient qu’elle serait l’occasion pour la France de rattraper son retard dans le domaine. La feuille de route énergétique prévoit de doubler la puissance installée dans l’éolien terrestre, et de quintupler celle du solaire. Mais pour l’éolien offshore, elle se contente de confirmer l’appel d’offres déjà en gestation à Dunkerque, d’en annoncer un autre qui sera attribué en 2020 dans la Manche. Enfin, elle promet la mise en œuvre de nouveaux projets en 2023 et 2024.
« Le déploiement de l’éolien en mer est sabordé ! », estime l’association France énergie éolienne (FEE), pour qui les annonces du gouvernement sont deux fois moins importantes que ce qu’espérait la filière. « Les chiffres sont décevants, la France a un potentiel important », explique Giles Dickson, le représentant de WindEurope, qui regroupe les entreprises de la filière au niveau européen. Il souligne que le texte de la PPE « laisse la France en bas de tableau sur l’éolien offshore, ce qui risque de lui faire rater des perspectives d’investissement et d’emploi ». « Le gouvernement cherche-t-il à décourager les industriels et perdre les investissements publics, alors qu’en juin, au cap Fréhel, le président de la République présentait l’éolien en mer comme une “réponse énergétique pour le pays” ? », fait mine de s’interroger Olivier Perot, président de FEE.
Une usine de General Electric en partie au chômage technique
« Je comprends que les industriels des énergies marines renouvelables veuillent plus, et tant mieux », a répondu le ministre de la transition écologique et solidaire, François de Rugy, mercredi, à Brest, à l’occasion des Assises économiques de la mer. « Pour autant, nous avons souhaité avoir des objectifs réalistes », a-t-il noté, assurant que, « évidemment, nous pourrons évoluer dans le futur sur l’augmentation des capacités, si on a une baisse de prix ».
Alors que la France possède le deuxième gisement d’Europe d’éolien en mer, le pays ne compte aucune éolienne offshore en activité. On en dénombre pourtant près de 4 000 sur le continent, installées dans dix pays. Les appels d’offres lancés en 2011 et 2013 n’ont toujours pas donné naissance aux six parcs prévus au large de la Normandie et de la Bretagne. Encalminés dans des procédures judiciaires et des renégociations tarifaires, les projets ne commenceront à sortir des eaux qu’à partir de 2021, au mieux.
Le résultat de ces délais imprévus met les industriels, qui s’étaient engagés aux côtés des développeurs éoliens, dans une situation difficile. A Montoir-de-Bretagne (Loire-Atlantique), l’usine de General Electric est en partie au chômage technique, le temps que les procédures se débloquent. Au Havre, l’usine promise par Siemens Gamesa attend toujours un feu vert. « Il est grand temps que la France prenne au sérieux l’éolien en mer », prévenait en septembre Markus Tacke, patron du leader mondial de l’éolien offshore. Il n’est pas sûr que son appel ait été entendu.