« Gilets jaunes » : à quoi faut-il s’attendre pour l’acte X ?
« Gilets jaunes » : à quoi faut-il s’attendre pour l’acte X ?
Plusieurs figures du mouvement appellent au rassemblement, samedi 19 janvier, pour un dixième samedi de mobilisation depuis celui du 17 novembre 2018.
Manifestation de « gilets jaunes » à Toulouse, samedi 12 janvier 2019. / PASCAL PAVANI / AFP
« Gilets jaunes », acte X. Malgré le lancement du grand débat national, avec lequel le gouvernement espère enrayer cette contestation sociale inédite qui dure depuis deux mois, plusieurs figures du mouvement appellent au rassemblement, samedi 19 janvier, pour un dixième samedi de mobilisation depuis celui du 17 novembre 2018.
Samedi 12 janvier, près de 84 000 personnes ont manifesté dans le pays, une mobilisation en hausse par rapport aux 50 000 de la semaine précédente, mais bien inférieure aux centaines de milliers rassemblées en novembre ou décembre.
Paris : deux manifestations déclarées
A Paris, des « gilets jaunes » – dont Eric Drouet, l’une des figures du mouvement –, ont donné rendez-vous sur l’esplanade des Invalides en fin de matinée avec une ambition : « Le million à Paris ! » Ils invitent les participants à amener « une fleur ou une bougie en hommage » aux personnes tuées ou blessées « pour [leur] cause » depuis le début du mouvement. Un cortège doit partir à midi pour arriver à la place d’Italie (13e arrondissement) à 17 heures, en passant par la place Coluche, où un « hommage » à l’humoriste est également prévu.
Les revendications ? « Toujours les mêmes », écrivent ces « gilets jaunes » sur leur groupe Facebook : « Mise en place intégrale du RIC [référendum d’initiative citoyenne], baisse du nombre d’élus, de leurs privilèges, plus de transparence »… Le groupe prévient que « toute forme de violence » ne fera que « décrédibiliser ce mouvement aux yeux de l’opinion publique ». « Les journalistes ne sont pas non plus la cible. Ils font leur travail », peut-on aussi lire dans l’appel, alors que plusieurs reporters ont été agressés en marge des manifestations.
Leur parcours a été déclaré à la préfecture, selon un document de la direction de l’ordre public et de la circulation publié sur Facebook. Contactée par Le Monde, la préfecture de police de Paris confirme que deux déclarations de manifestation lui ont été adressées pour la journée de samedi, sans préciser lesquelles.
Sur les réseaux sociaux, d’autres « gilets jaunes » appellent au rassemblement dans la capitale – certains donnant rendez-vous avenue des Champs-Elysées, place de la Bastille ou place de la République, quand d’autres communiqueront le lieu au dernier moment.
Un appel au rassemblement à Toulouse…
Toulouse devrait également être un des points centraux de la mobilisation. « Nous invitons toutes les villes qui le peuvent à se joindre à nous, indiquent les organisateurs sur Facebook, qui ont fixé le rassemblement à 14 heures à la station de métro Jean-Jaurès. Marseille, Brive-la-Gaillarde, Nice, Bordeaux, Carcassonne […], Limoges, Montpellier, Foix et les autres villes. Venez tous à Toulouse ! » Maxime Nicolle, aussi appelé Fly Rider, autre figure du mouvement des « gilets jaunes », participera à l’acte X dans la Ville rose, annoncent ses partisans sur les réseaux sociaux.
Le journal local La Dépêche faisait savoir vendredi que « les commerçants s’attendaient au pire », certains protégeant leurs locaux par des barricades à la veille de cette nouvelle journée de mobilisation. Toujours selon le quotidien, la municipalité toulousaine a décidé de fermer l’hôtel de ville, et l’opération de don du sang organisée place du Capitole a été annulée.
La semaine dernière, 6 000 personnes avaient défilé dans la ville, selon la préfecture. Des heurts avaient éclaté sur la place du Capitole. Treize personnes avaient été « légèrement » blessées et 33 interpellées pour des « dégradations et des violences ».
… mais aussi à Marseille, Bordeaux, Lyon ou encore Béziers
A Marseille, où 3 000 personnes s’étaient réunies la semaine dernière, des « gilets jaunes » donnent rendez-vous samedi en début d’après-midi sur le Vieux-Port. « On veut que ça continue, qu’on arrive à faire sortir du monde qui ne sort pas d’habitude pour manifester, a expliqué à l’Agence France-Presse Luc Benedetti, un « gilet jaune » marseillais. La seule chose à faire maintenant, c’est d’envoyer une lettre de licenciement à Castaner et à Macron, puisque c’est nous leurs employeurs. De toute façon, Macron il ne tiendra pas jusqu’au printemps. »
Des rassemblements sont également annoncés à Bordeaux, où 6 000 personnes ont manifesté samedi dernier, Lyon, Saint-Etienne, Roanne, Valence, Clermont-Ferrand, Montélimar, Dijon, Nevers, Montceau-les-Mines, Toulon, Avignon ou encore Béziers.
« Beaucoup de forces de l’ordre dans la rue »
Interrogé vendredi matin sur la dixième journée de manifestation des « gilets jaunes », le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, a annoncé que le gouvernement allait « de nouveau mettre beaucoup de forces de l’ordre dans la rue », alors que la polémique enfle sur l’accumulation de blessures graves de manifestants causées notamment par les lanceurs de balles de défense (LBD).
Vendredi, il s’est dit « sidéré » par les accusations de violences policières. « Quand j’entends certains responsables (…) prendre le parti des casseurs plutôt que celui de la sécurité, quand j’entends parler de brutalité inouïe et illégitime, je suis sidéré, et c’est le mot le plus poli que je trouve », a déclaré le ministre lors d’un discours au centre d’incendie et de secours de Tomblaine (Meurthe-et-Moselle), près de Nancy, où il présentait ses vœux aux forces de sécurité civile.
Selon lui, il y a par ailleurs « de moins en moins de mobilisation ». « La pièce s’éternise, il n’y a plus grand monde sur la scène et dans la salle », a-t-il estimé vendredi sur Europe 1. « Il est temps de changer de pièce » et de passer au « débat national » lancé mardi par Emmanuel Macron pour mettre fin à la contestation, a-t-il déclaré.
Pouvoir d’achat, fiscalité, démocratie et environnement : les quatre thèmes proposés pour ce débat correspondent à ceux évoqués le plus souvent par les milliers de Français des classes populaires et moyennes, entrés en rébellion contre une politique gouvernementale jugée injuste.
Polémique sur le comptage des manifestants
A la veille de ce dixième samedi, un collectif de « gilets jaunes » a ouvert une page Facebook intitulée « Le Nombre jaune », sur laquelle ils proposent un décompte des manifestants, avec pour objectif d’opposer leurs chiffres à ceux du ministère de l’intérieur.
« Les chiffres donnés par l’intérieur sur la mobilisation sont néfastes au mouvement de par leur sous-estimation, indique leur message de présentation. Les grands médias relaient ces chiffres sans les vérifier ni les discuter. (…) Nous nous engageons à réaliser un travail pragmatique et impartial pour affiner ces chiffres, et à le communiquer aux médias qui n’auront plus l’excuse de l’interlocuteur unique. »